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Christophe Sandalettes, je vous raconte en deux épisodes et voici le deuxième comment Alain Jakubowicz est devenu en 2017 l'avocat de Normal, le, qui a avoué être l'assassin de la petite Maïlys et celui du caporal Noyer dans un livre qui paraît chez Plon. Soit je gagne, soit j'apprends. Maître Jakubowicz raconte avec beaucoup de franchise pourquoi et avec quel état d'âme il a accepté ce dossier. Le premier épisode est disponible sur votre application de podcast. Voici donc le deuxième épisode.

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Réalisation Céline Brace.

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Christophe Hondelatte. Dans le premier épisode, en septembre 2017, Alain Jakubowicz accepte de devenir l'avocat de Nordin le Landais, accusé d'avoir enlevé au cours d'un mariage à pont de Bonvoisin, dans l'Isère, une petite fille prénommée Maïlys, qui, depuis, a disparu. Dès leur première rencontre, Nordin le landais dès qu'il est innocent. Fidèle à son serment d'avocat et malgré le lynchage de son client dans la presse, maître Jakubowicz défend donc l'innocence de son client. Il va même, sur la base du dossier, jusqu'à déposer une demande de mise en liberté.

[00:01:24]

Mais entretemps intervient un élément nouveau.

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Le 18 décembre 2017, je reçois un appel de la gendarmerie.

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Maître Jacques Barré oui, c'est moi. Dites moi, je vous rappelle que votre client normal, le Landais, vient d'être placé en garde à vue dans le cadre d'un dossier instruit à Grenoble et donc, il requiert votre présence pour la Chiflet.

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Une autre avenue. Mais de quoi? Je prends tout de suite la route et je le découvre en écoutant France Info.

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Normal Hollander, déjà mis en examen dans l'affaire de la disparition de la petite Marie-Lys à Pont de Bonvoisin, dans l'Isère, vient d'être placé en garde à vue dans une deuxième affaire. Il est maintenant suspecté d'avoir tué un jeune militaire à caporale qui l'aurait pris en stop au mois d'avril dernier. J'arrive à la gendarmerie, je parviens à éviter la presse avant que son interrogatoire de garde à vue commence. Je me entretien avec N'ordonne le lendemain une rencontre glaciale. Il ne me semble pas du tout paniqué, mais seulement abattu.

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Et moi, à ce stade, je n'ai pas eu accès au dossier et donc je découvre les faits qui lui sont reprochés. Au fur et à mesure des questions posées par le juge, le caporal disparu s'appelle Noyez.

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Moi, je n'ai rien à voir avec ce monsieur. Je vous assure rien du tout.

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Àl'issue, il est présenté au juge d'instruction qui le met en examen pour assassinat. Ce qui veut dire d'abord que le juge pense que le caporal Noyez est décédé et que, par ailleurs, le l'ondée l'aurait tué avec préméditation. Quand je découvre le dossier, je me demande bien d'où il sort. Certes, son téléphone a borné au même endroit que celui du caporal, mais rien de plus. Et voilà comment je me trouve entraîné dans ce second dossier.

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La presse, évidemment, s'en donne à cœur joie. Et pour cause, on a changé de registre et ça permet de jouer à faire peur. La France a désormais un nouveau tueur en série et les commentateurs se succèdent à nouveau sur les plateaux pour discourir pendant des heures sur un dossier dont il ignore tout. Et sur un homme qu'ils ne connaissent pas non plus, mais qui présente, selon eux, toutes les caractéristiques du tueur en série. La question n'est plus de savoir s'il est coupable des deux crimes dont on l'accuse, mais de combien d'autres.

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Il est l'auteur.

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Parole de spécialiste. On finira par en trouver un troisième, car il faut trois crimes minimum pour être un serial killer.

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Et moi, moi, je suis emporté par ce tsunami et je ne peux rien dire et rien faire parce qu'il n'y a rien à dire et rien à faire. Pour être honnête avec vous, à ce moment là, je songe à refuser ce deuxième dossier.

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Le premier, je l'ai accepté, mais celui là, il m'est imposé.

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On en parle au cabinet, oui, mais là, c'est pas cohérent du tout.

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Afin de rester l'avocat dans l'un dans l'autre.

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D'accord, un avocat ne quitte pas le navire dans la tempête.

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Dans la ferme, Maïlys, ma collaboratrice, débarque dans mon bureau, livide.

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Alain Alain, on vient de recevoir de nouvelles pièces qui viennent d'être versées au dossier. C'est un rapport d'expertise scientifique. Ce rapport, je le lis. On a trouvé une minuscule tache de sang dans le coffre de Nordbank Lelandais. Et ce sang est celui de Maïlys. On se regarde avec ma collaboratrice en silence. Et là, des larmes montent aux yeux. Je me sens seul, terriblement seul, face à un obstacle que je me serais capable de surmonter.

[00:05:47]

Ce n'est pas anormal. Le lenders que j'en veux, c'est moi. J'ai présumé de mes forces. J'ai commis le pire péché pour un avocat l'orgueil. Je suis entré dans ce dossier pour faire triompher la vérité seul contre tous, et c'est la vérité qui triomphe de moi. Et je me retrouve seul contre tous.

[00:06:10]

Le roi est nu. Échec et mat. À ce moment là, je n'ai qu'une envie tout envoyer balader. Mais je ne peux pas partir. Je ne dois pas partir. Je dois boire le calice jusqu'à la lie. Le lendemain matin, je vais à la maison d'arrêt avec en poche le rapport d'expertise qui me brûle les doigts et qui torture ma conscience. Ça doit se lire sur mon regard. Il comprend tout de suite que quelque chose de grave est arrivé.

[00:06:47]

Un long silence s'installe et moi, je ne sais pas trop quel ton employer la manière forte. Ça ne servira à rien. Je dois rester professionnel coûte que coûte. Bon, Hordain. Voilà, j'ai dans les mains un rapport de la police scientifique.

[00:07:08]

On a trouvé une tache de sang dans ta voiture et ce serait celui de Maïlys.

[00:07:14]

Normal, il a les yeux humides, le teint blafard. Il me regarde sans me voir. Il a compris que la partie était terminée et qu'il avait perdu Elyes. Il prend son visage entre les mains et il pleure. Je pense que tu as compris la situation, Nordin. Est ce que tu sais où est le corps de Marylise? Oui, tu serais capable de le retrouver. Oui, je crois. Et là, je ne lui laisse pas le choix.

[00:07:52]

D'autres auraient sans doute proposé une stratégie différente. Mais persister à nier est suicidaire. Quand je vais sortir normal, je vais appeler la juge d'instruction. Je vais lui dire qu'il faut qu'elle te réentendu de toute urgence. Et toi, tu devras reconnaître devant elle que tu es, tu es Maïlys et que tu acceptes de l'accompagner où tu la mise. On est d'accord Norden. Rover est pour aujourd'hui. C'en est assez. Le temps viendra où il devra donner des explications.

[00:08:32]

Mais là, il en est incapable. Et moi aussi. Arrivé sur le parking. Je reste prostré un moment dans ma voiture et puis je compose le numéro de la juge d'instruction, mais elle est absente. C'est un de ses collègues qui décroche, dites. J'ai pris connaissance des derniers éléments du dossier. J'ai rencontré mon client ce matin. Je sorte de la prison. Vous pouvez faire passer un message à la juge qui souhaite être entendue dans les plus brefs délais.

[00:09:11]

Le problème, c'est qu'elle est en vacances, donc elle vous convoquera dès son retour.

[00:09:16]

Non, non, non, ça, ça ne peut pas attendre.

[00:09:21]

Bon, je vais tenter de la joindre. Pour rappel, ils ont compris.

[00:09:26]

Nous sommes convoqués demain.

[00:09:34]

Le 14 février, nous prenons avec ma collaboratrice la route de Grenoble en sachant que la journée sera longue et pénible. Quand on arrive au palais de justice, je demande à m'entretenir avec mon client.

[00:09:47]

On est d'accord. Normal, on fait comme on a dit. Tu reconnais que toi, tu es Marie-Lys, tu dis à la juge que t'es prêt à la conduire là où se trouve le corps. On est d'accord. D'accord. Et c'est ainsi que devant la juge en larmes, il reconnaît qu'il a tué Maïlys. Vous êtes d'accord pour nous conduire à l'endroit où vous avez abandonné le corps?

[00:10:14]

Monsieur, oui, madame maître, nous allons donc organiser un transport de justice.

[00:10:24]

On partira de la gendarmerie de Bonvoisin où je vous invite à vous rendre tout de suite et à partir de là, nous allons suivre le trajet parcouru par votre client le soir du drame, depuis la salle des fêtes où se déroulait le mariage, jusqu'à l'endroit où il a abandonné le corps de l'enfant.

[00:10:42]

C'est entendu. Sur place, les gendarmes ont pour mission d'éloigner les journalistes. Mais en écoutant la radio, je m'aperçois vite qu'ils sont informés au fur et à mesure, sans doute par une personne proche du dossier. Et donc, une longue procession se lance. Précédés par des motards qui bloquent les carrefours Nordin Lelandais et dont la première voiture. C'est lui qui montre la voie et il collabore. Il répond aux questions. Il explique par où il est passé, ce qu'il a fait ou il s'est arrêté.

[00:11:19]

On roule, on s'arrête, on repart. Et moi, je me dis s'il menait tout le monde en patauds, pourvu qu'il trouve l'endroit, alors je lui parle, je l'encourage. Manifestement, il veut y arriver et à un moment, on se retrouve bloqué par la neige.

[00:11:39]

Bon, ce n'est pas praticable. Il faut faire venir un engin de déneigement. Ça va prendre un peu de temps. On attend.

[00:11:48]

L'engin finit par arriver et la progression reprend.

[00:11:54]

Je vous chertok selon Surjouant. Mais à quel endroit précis ça s'est passé en été et avec la neige, ça n'a plus rien à voir.

[00:12:14]

Il s'arrête un bon moment au bord d'une pente boisée. Il hésite. Il est tenu en laisse avec ses menottes par les gendarmes. Il fait dix mètres vers le haut, puis vers le bas. Puis encore vers le haut. Puis il descend la pente. Il bifurque vers la gauche. Il passe sous les arbres. Il s'arrête près d'un rocher. Il cherche. Il tourne la tête à droite, à gauche. Il se baisse. Il balaye le sol de la main et il se relève comme si, comme s'il sentait les lieux.

[00:12:45]

C'est long. Tu es sûr, Nordin? Tu en es sûr? Oui, je veux tellement qu'on découvre cet enfant tellement les gendarmes fouillent superficiellement. Rien.

[00:13:00]

Bon, compte tenu de l'état du sol et de leur avancée, on va suspendre les recherches pour ce soir.

[00:13:09]

Sur le chemin du retour, Nordin le des s'effondrant larmes. Attention, je ne veux pas qu'on se méprenne sur mon propos, mais c'est simplement ce qu'il fait pleurer. Chacun peut le voir et il n'y a pas besoin de l'interpréter. Moi, je rentre à pied, ça a été une journée éprouvante. J'ai marché à l'endroit où se trouvent les restes d'une petite fille de 9 ans qui a été tuée par l'homme que je défends. J'ai besoin d'être seule. J'ai besoin de respirer.

[00:13:49]

J'ai besoin de silence.

[00:13:51]

Arrivé à ma voiture, je tombe sur le procureur de la République àmettre. Je voulais vous prévenir. Je vais faire une conférence de presse. C'est normal qu'il s'exprime, mais moi, je ne le ferai pas. Je nordet ni le courage, ni la force. Et d'ailleurs, que dire?

[00:14:19]

Nous reprenons la route de Lyon et à la radio se déroule le procès en direct de Norden, le Landais et moi je me dis dans l'adversité et la détresse. La défense doit rester debout. L'homme que je suis est anéanti. Mais l'avocat n'en a pas le droit. Cette schizophrénie professionnelle m'habite depuis toujours et je crois que ce soir, elle est à son paroxysme. Nous écoutons en direct la conférence de presse du procureur.

[00:14:51]

Bon demi tour, on va à la mairie de Pont de Bonvoisin où ça se déroule.

[00:14:55]

Finalement, je vais parler et c'est en arrivant que je la prends maître. On a retrouvé les restes du corps de la petite Maïlys.

[00:15:09]

L'endroit désigné par Nordin Le Landais était donc exacte. Il a dit la vérité et ça me rassure autant que ça me terrifie.

[00:15:21]

Les journalistes sont là, mais moi, je ne sais pas quoi leur dire. Pas trop.

[00:15:28]

Dans ces conditions, maître, vous resterez l'avocat de Länders? Oui, bien sûr.

[00:15:35]

C'est moi qui l'ai aidé à dire où se trouvait Maïlys s'il ne l'avait pas dit. Je crois que je serai parti, car ce dont on l'accuse me fait horreur. Mais je ne défends pas sa cause. Je défends un homme.

[00:15:53]

Comment vont réagir tous ceux qui croyaient à son innocence? Ses parents, son frère, sa soeur, sa mère et sa soeur ont beaucoup de difficulté à accepter la réalité. Mais pas question pour elle d'abandonner leur fils. C'est leur frère. Pour elle, c'est terrible, mais elles vont le voir à la maison d'arrêt. C'est le seul lien qui rattache Ghorbal le Landais à la vie. Le dernier soutien moral qui lui reste. En écoutant la radio vers 22 heures, Nordin Lelandais a été extrait de sa cellule.

[00:16:31]

Il a quitté le centre pénitentiaire de Saint-Quentin-Fallavier pour être conduit vers un lieu indéterminé.

[00:16:38]

Ses parents m'appellent évidemment alors, mais on vient d'entendre à la radio. Ils l'ont amené et comme personne ne m'a prévenu, je décide d'appeler le procureur sur son portable.

[00:16:55]

Ecoutez, je ne suis pas moi même. Ça me fait rire et je comprends qu'il est vexé de ne pas savoir.

[00:17:04]

Je comprends surtout que ses relations avec les juges d'instruction ne sont pas des plus cordiales. En vérité, Nordin le Landais, qui était dans un sale état à son retour à la prison, a été hospitalisé à l'IUT HSA de l'hôpital psychiatrique du Vinatier, à Lyon. C'était une prison dans l'hôpital. Les médias ont dit que c'était moi qui me l'avait demandé. C'est faux. C'est l'équipe médicale de la prison qui l'a décidé et c'est donc là que je lui rend visite.

[00:17:33]

Au début de la semaine suivante, on se retrouve dans une salle vaste et claire. Il a l'air complètement drogué. Il est là, assis devant moi, droit, figé, l'air hagard. Il me fixe sans me voir. Il a les deux mains calées sous ses cuisses et dans ma tête, je revois les images de Vol au dessus d'un nid de coucou, le film de Milos Forman. Aucune discussion n'est possible aujourd'hui, alors je me lève et repartons.

[00:18:01]

Je me surprends à lui adresser une petite tape sur l'épaule.

[00:18:06]

Je ne pense pas que je me serais souvenu de ce geste anodin, mais c'est lui qui me l'a rappelé à ma visite suivante Merci meutres! Ça m'a fait du bien, vous savez ce geste. Un instant d'humanité, Dieu que l'homme est complexe. Le lendemain, Nordin, le Länders, est à nouveau entendu par les juges d'instruction, mais il était pété. Il a la bouche pâteuse. Il est manifestement gavé de médicaments. Il n'est pas en état de répondre à la moindre question.

[00:18:43]

Et puis, au cours des semaines suivantes, peut être grâce au suivi psychiatrique, il commence à parler. Même évoquer les faits devient plus facile. Et c'est pile à ce moment là que l'enquête sur le meurtre du caporal Noyez avance enfin.

[00:19:04]

Dans cette affaire, les gendarmes ont déjà retrouvé le corps, mais jusque là, Nordine le a toujours nié l'avoir tué. Il a reconnu qu'il l'avait pris en stop, mais rien de plus. Et là, il est convoqué pour un nouvel interrogatoire.

[00:19:19]

Et moi, en préparant l'entretien avec lui, je sent qu'il est prêt à reconnaître qu'il l'a tué le lendemain avant d'entrer dans le bureau du juge de Chambery.

[00:19:30]

Je vérifie qu'il n'a pas changé d'avis. Je pas changé d'avis. Je vais faire comme on a dit et il le fait.

[00:19:41]

Et vous acceptez, monsieur le Landais, de nous conduire là, vous avez abandonné son corps?

[00:19:46]

Oui, j'accepte, dans la mesure où on a déjà retrouvé les ossements du caporal. Il s'agit juste de vérifier qu'il dit vrai.

[00:19:55]

Un nombre impressionnant de voitures de gendarmerie est mobilisé, précédé de motards qui ouvrent la voie, suivie bien sûr par une cohorte de journalistes. Je refuse qu'on couvre la tête de Nord thaïlandais. Je ne sais pas pourquoi ces images évoquent pour moi le lynchage. La peine de mort, quoi qu'il le fait, un homme n'a pas à se cacher.

[00:20:17]

Il doit assumer et affronter les regards. Le trajet donné par le Lenders correspond à celui de son téléphone portable et à celui du caporal Noyez la nuit des faits. A un moment, il fait arrêter le convoi. Stop, c'est Borland! Et il explique ce qui s'est passé, ce qu'il a fait ensuite et ensuite nous reprenons la route et il nous amène à un endroit où, au mois de décembre dernier, des promeneurs ont retrouvé les ossements du caporal Wala.

[00:21:00]

Il a reconnu les faits et moi, je reste convaincu que c'est grâce au travail des psychologues et des psychiatres de l'hôpital du Vinatier.

[00:21:09]

Et pourtant, on décide que son hospitalisation n'est plus nécessaire. Je le regrette. On le prive d'un suivi médical dont il a grand besoin. Comme dans toutes les affaires criminelles, N'ordonne le lenders est soumis à une expertise psychiatrique et psychologique. Les psychiatres et les psychologues doivent dire s'ils souffrent de pathologie. Si son discernement a été altéré ou aboli au moment des faits, j'avoue que la manière dont ces expertises se déroule a toujours été pour moi un mystère. Les experts doivent être sacrément doués pour arriver à diagnostiquer des pathologies et a asséné des vérités péremptoires après avoir passé pour certains quelques minutes et pour d'autres quelques heures avec l'intéressé.

[00:21:58]

Nordin le Landais m'a dit que pour lui, ça a duré 20 minutes. Il dit qu'il n'a pas pu placer un mot en dehors des réponses aux questions. Ça me fait penser à l'expert psychologue de l'affaire d'Outreau qui avait dit Quand on paye des expertises au tarif d'une femme de ménage, on a des expertises de femme de ménage. Et puis, je me suis souvent demandé comment sont rédigés les rapports de ces experts quand ils sont deux ou trois experts. Comment font ils pour être toujours d'accord?

[00:22:26]

Un jour, l'un de ces psychiatres de renom m'a raconté que ça se finissait souvent comme ça. Bon, cette fois, tu me suivra à la prochaine là. Genre renvoi d'ascenseur.

[00:22:45]

Je vais voir Nordin, le Länders, quelques jours après son retour à la prison de Saint-Quentin-Fallavier. Il a retrouvé le quartier d'isolement et les insultes. Je le trouve abattu, abruti par les médicaments et par les heures passées devant la télé. Ça va, Nordin, comment est ce que tu passes des journées? Moi, je regarde la télé et bien sûr, tu regardes les émissions qui te sont consacrées, n'est ce pas? Bah ouais, tu devrais plutôt lire Redal.

[00:23:16]

T'as déjà lu des livres? J'en ai lu. 3. Lesquels? Bah d'abord, la véritable histoire du Bouddha. Je suis tombé dessus dans la chambre de ma soeur. Retour à terre, attiré par le bouddhisme est aimer ou heureux. Et puis quoi encore? Charlie et la chocolaterie, on devait le lire à l'école, on joue bien. Un troisième livre, un livre sur l'affaire Patrick Dils.

[00:23:47]

Je l'ai trouvé à la bibliothèque de la prison. Il me demande régulièrement combien il risque. Quelle peine! Alors un jour, je lui dis Bah, tu vois un organe. Tu sortiras quand t'auras mon âge à peu près. Alors ça veut dire que serait pas là quand je sortirai une autre fois, je rentre du Sénégal. Obama, j'ai eu sacrément peur que votre avion tombe. Une autre fois encore, au lendemain d'une soirée télé où on avait beaucoup parlé de lui et de moi, je suis énervé, surtout pour vous mettre au bout de dix jours, vous?

[00:24:31]

Chacun fera ce qu'il voudra de ça, mais quand on voit un homme pendant des mois et des années dans quelques mètres carrés, on se retrouve dans une relation humaine. C'est la différence qui existe entre ceux qui ont un avis définitif sur un homme qui n'ont pas vus et un avocat qui passent des centaines d'heures avec lui, même si moi, j'ai toujours veillé à maintenir une distance.

[00:24:59]

Les juges attendent l'été pour procéder à la reconstitution de la mort de Maïlys pour qu'elle se déroule dans les mêmes conditions que le soir des faits. Ils sont là avec leur greffière, le procureur, les parents de Maïlys, leur avocat et des experts, et beaucoup de gendarmes, et aussi des figurants bien hollandais.

[00:25:22]

Est ce que vous acceptez de refaire les gestes, c'est à dire de jouer votre propre rôle? Ou est ce que vous voulez être représenté par ce qu'on appelle un plastrons, c'est à dire un figurant? Je le convint de faire face. Il accepte. Dans la voiture, un mannequin de tissu est installé sur le siège passager et lui est au volant. Et la scène est filmée via le rendez vous.

[00:25:47]

Allez refaire les gestes que vous avez fait le soir du drame. Attention, top départ.

[00:25:54]

Et là, je suis à terre, bloquée, comme sans doute tous ceux qui sont là. Je n'imaginais pas qu'on puisse porter des coups d'une telle violence. Je suis tétanisée. Je pense aux parents qui sont là à quelques mètres.

[00:26:11]

Je ne veux pas croiser leur regard, mais qu'est ce que je fais là? Qu'est ce que je fais là? Voilà, je ne veux pas en dire plus. Et peut être d'ailleurs parce que j'en ai trop dit et j'accepte par avance tous les reproches qui me seront faits. Mon but n'est pas d'humaniser celui qu'on présente comme un monstre, et pas non plus de plaider avant l'heure. On m'a tellement demandé pourquoi j'avais accepté ce dossier. Pourquoi vous mettre pas vous mettre?

[00:26:47]

J'avais besoin de l'expliquer, de m'expliquer, de l'expliquer. Il ne s'agit pas de moi. Il s'agit de la fonction de l'avocat. J'en ai entendu des synopsis à ce sujet et des insultes. Et des gens qui disent Mais pourquoi diable l'avocat du procès Barbie, du procès Touvier et du procès Papon? Le défenseur des droits de l'homme est devenu l'avocat de Nortel. C'est à eux que je m'adresse pour leur expliquer que c'est le même avocat qui, après 40 ans de métier, a toujours la même passion, le même amour de la barre, la même combativité, la même foi en la justice.

[00:27:27]

Il n'y pas d'avocat des bonnes causes et d'avocats des mauvaises. Il n'a pas non plus d'avocat, des accusés et des avocats des victimes. A ceux qui veulent diviser, je dis toujours je suis avocat. Ma robe est la même, quelle que soit la cause ou l'homme que je défends. J'ai tiré cette histoire du livre d'Alain Jakubowicz chez Plon. Soit je gagne, soit j'apprends une histoire en deux épisodes. Le premier épisode est déjà disponible sur votre application de podcast.

[00:28:05]

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