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Christophe Hondelatte Aujourd'hui, je m'attaque à un gros dossier dont vous avez forcément entendu parler. L'affaire Seznec de 1923. Guillaume Seznec a t il tué son ami Pierre Quémeneur en 1924? La justice française a dit oui et Guillaume Seznec a passé vingt ans au bagne de Guyane pour ce meurtre qu'il a toujours nié. Mais ses descendants sont convaincus que c'est une erreur judiciaire et depuis des décennies, ils essayent de le prouver. Les fidèles diront mais c'est une histoire que vous avez déjà racontée et c'est vrai.

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Mais depuis, il y a eu des rebondissements et je l'ai donc entièrement réécrite. Mise à jour et complétée. Sans pouvoir vous jurer aujourd'hui que c'est une version définitive avec l'affaire Seznec, on ne peut jamais dire on en a terminé nouvelle version, donc nouvelle réalisation signée Sending. Christophe Hondelatte. À Rennes, en Bretagne. Au petit matin du 25 mai 1923, deux quadragénaires replet font route vers Paris dans une Cadillac. Je vous présente celui qui est au volant s'appelle Guillaume Seznec, il a fait fortune pendant la guerre de 14.

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Grâce à sa blanchisserie avec sa femme, ils ont laver le linge de l'armée et de l'hôpital américain. Ils ont gagné beaucoup d'argent. D'ailleurs, il vient de vendre sa blanchisserie et de se lancer dans le bois. Il a acheté une scierie à Morlaix. Et puis celui qui est à côté de lui dans la Cadillac. Eh bien, c'est Pierre Quémeneur, lui aussi. Il a fait fortune pendant la guerre de 14 dans le bois, justement, qu'il a vendu aux armées françaises et américaines pour construire des barrières, des poteaux pour étayer des tranchées.

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Et maintenant, Pierre Quémeneur est devenu un notable. Il s'est fait élire conseiller général du Finistère.

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Bref, voilà donc deux profiteurs de guerre en route pour Paris. Un matin de 10 923. Ces deux là sont ils amis, amis? Pas vraiment. Mes proches, c'est sûr. Disons des amis d'affaires. Ils ont plein de projets en commun. Par exemple, quand les Américains sont partis, Seznec a récupéré un lot de couvertures de l'armée américaine et Quémeneur, ma foi et bien intéressé par leur revente. Quant à Seznec, qui est intéressé par un manoir qui est la propriété des Quémeneur, le manoir de Plourivo, dans le Finistère?

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Rien n'est signé. Quémeneur est dur en affaires, mais c'est en bonne voie. Il lui lâchera les couvertures et il aura son manoir. Voila, et ce n'est pas tout. Les deux hommes sont sur un gros coup. Ils ont des vues sur des Cadillac abandonnées par les Américains. Quand ils ont quitté la France, il espère récupérer le lot et aller le revendre à Paris et s'en mettre une fois de plus plein les poches. C'est d'ailleurs ce matin du 25 mai 1923.

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C'est dans l'une de ces Cadillac qu'ils sont en route vers Paris. Ils ont rendez vous avec un certain Chergui qui vend des voitures d'occasion dans la capitale et ils vont se faire des couilles en or. Ce qui s'est passé après? Honnêtement, je ne suis pas capable de vous le dire avec certitude. Je n'ai que la version de Guillaume Seznec et c'est d'ailleurs tout l'enjeu de cette affaire. Est ce qu'il ment ou est ce qu'il dit la vérité? Seznec raconte que la Cadillac est à bout de souffle et que sur la route de Paris, elle va de panne en crevaison.

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C'est Todd Tako, la qualité américaine. Tu parles, Seznec d'Ica? À un moment donné, Quémeneur n'en peut plus. Écoutez mon ami, cette guimbarde ne nous conduira jamais à Paris. Alors déposez moi à la gare d'Oudon. Je terminerai en train et vous vous faites comme vous voulez. On se retrouve à Paris. Seznec dit qu'il dépose son ami à la gare de Houdon et que, finalement, découragé par la succession de pannes, il renonce à se rendre à Paris et il fait demi tour.

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Et que de galère en galère! Il lui faut deux jours pour ramener la voiture à Morlaix Morlaix, où il arrive le 28 mai. Seul. Et quand on lui demande où est Quémeneur? Robache Tepos, Il a pris le train. Je n'ai pas revu. Et puis les jours passent et à Landerneau, les Quémeneur commencent à se faire du mauvais sang. Ils n'ont aucune nouvelle de pierre, alors au bout de trois semaines, ils portent plainte et c'est le début de cette affaire.

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Sauf que, surprise, le jour même, les Quémeneur reçoivent un télégramme du Havre ne rentrerais Landerneau que dans quelques jours. Tout va pour le mieux.

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Signé Quémeneur. Et là, on est tenté de dire ouf, il est vivant. Sauf que les Quemeneur ne sont pas du tout rassurés. Et vous savez pourquoi le télégramme signé Quéméneur? Il ne fait jamais ça d'habitude. Quand il écrit à sa famille, il signe toujours de son prénom Pierre.

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Et l'inquiétude monte encore quelques jours plus tard, quand on retrouve au Havre la valise de Quémeneur tachée de sable et de sang. Et ce n'est pas tout. Dans la valise, on trouve une promesse de vente qui concerne le fameux manoir de Plourivo. Quémeneur l'a vendu à Seznec et à un prix très avantageux.

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Et c'est ça. C'est cette promesse de vente qui, d'entrée, oriente la police vers Seznec.

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Est ce que Seznec n'aurait pas assassiné Quémeneur après lui avoir extorqué cette promesse de vente à vil prix? C'est séduisant comme piste et en même temps, c'est très fragile. Parce que réfléchissez à quoi servira t il de tuer quelqu'un qui ne vous a fait qu'une promesse de vente? Si Quémeneur est mort, l'avocat n'aura jamais lieu. Seznec peut dire adieu au Manoir de ses rêves. N'empêche que le 16 juillet 1923, Guillaume Seznec est arrêté et il ne sera pas libéré avant longtemps.

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Très longtemps.

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Cette enquête va être bouclée en douze jours. On commence par doubler les effectifs de la brigade de Rennes en faisant venir de Paris une équipe d'enquêteurs de la Sûreté générale dirigée par le commissaire Vidal. Oui, la victime est tout de même un conseiller général. Ça mérite qu'on mette les moyens. Enfin, quand je dis la victime, j'en sais rien. On n'a pas retrouvé le corps de Pierre Quémeneur et à ce jour, on ne l'a toujours pas trouvé.

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Guillaume Seznec dit qu'il dépose son ami à la gare d'Oudon en fin d'après midi pour qu'il attrape un train en direction de Paris. Mais renseignement pris, il n'y avait plus de trains ce soir là pour aller à Paris. Le premier train était à 3 heures 40 du matin le lendemain. Est ce qu'on a vu Kenner ce soir là et errer dans la gare d'Oudon ou Anvil? Eh bien non. Alors, il a pu passer la nuit à l'hôtel. Les policiers font le tour des hôtels de Houdan.

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Personne ne l'a vu. Guillaume Seznec fait alors une suggestion. Bah, il a peut être rencontré une fille chez qui il a pu coucher. Non. Une fille, il suggère que le conseiller général Quémeneur a passé la nuit dans le plumard d'une femme de petite vertu. Et puis quoi encore? Les notables de Houdan sont révoltés. Il n'y a pas de ça chez nous. En revanche, ce soir là, le chef de gare a aperçu deux hommes devant la gare, aux alentours de 22 heures.

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Bah oui, quand j'en ai vu deux. Il discuter. Ils se disputaient. Tiens, tiens! Il y a autre chose qui ne tient pas dans les déclarations de Seznec. Il dit qu'après avoir laissé son ami à la gare est exaspéré par une nouvelle panne. Il a décidé de faire demi tour pour rentrer en Bretagne. C'est une drôle de décision parce qu'à Houdon, il est à 46 km de Paris alors qu'il est à plus de 500 km de Morlaix avec une voiture en rade.

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Il était beaucoup plus simple d'aller à Paris que de rentrer en Bretagne. Non.

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Autre détail qui cloche quand Seznec arrive avec sa Cadillac à Morlaix, il manque le cric, un cric de 15 kilos. Est ce que ça ne serait pas avec ça qu'il a ce tourbillon Quémeneur? Je sais que ça n'est qu'une hypothèse, mais pourquoi pas? Autre chose, je vous ai dit que Guillaume Seznec venait d'acheter une scierie. Eh bien, les ouvriers racontent que quand ils arrivent à Morlaix, Seznec met en marche la chaudière de Sassier et qu'après, il va balancer des cendres dans la rivière.

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Est ce que ça ne ferait pas les cendres de Quémeneur? Je sais, ça n'est qu'une supposition, mais à l'époque, c'est comme ça qu'on mène une enquête.

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Et puis, il y a quelque chose que je ne vous ai pas encore dit et qui attise le soupçon sur Seznec pour se lancer dans le commerce de Cadillac.

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Le duo avait besoin de liquidités avant de partir. Pierre Quémeneur est donc allé voir son notaire qui lui devait de l'argent. 60 mille francs. Vous voulez 60 mille francs? Enfin, José, que je voulais doux, mais convenez qu'il n'est pas aisé de réunir pareille somme avant votre départ. Alors voilà ce que je vous propose. Je vous les envoie par mandat au bureau de poste du boulevard Malesherbes à Paris et vous les récupérer en arrivant à Paris. Alors, est ce que quelqu'un est allé récupérer l'argent?

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Les policiers de la Sûreté générale vérifient. Oui, on est venu chercher l'argent et il montre une photo de Quémeneur au guichet. Oh non! Non, ça, c'est pas lui. Et ensuite, une photo de Seznec? Pas non plus. Non, non, je le reconnais, Boidron. Qu'importe. Trois personnes seulement étaient au courant de la manœuvre Quémeneur, le notaire qui n'a pas bougé de Morlaix et Seznec. Si Quémeneur a disparu, c'est forcément Seznec.

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Il dit qu'il a fait demi tour à Houdon. Ça n'est pas vrai. Il est allé à Paris récupérer l'argent. Et puisqu'on parle d'argent, figurez vous que Pierre Quémeneur est aussi parti à Paris avec 4.000 dollars. Horth dans sa valise. Des dollars que lui aurait donné Seznec, qui les tenait de son commerce avec les Américains en dessous de table dans l'achat du manoir. Le deal était le suivant je te donne les dollars en espèces, pas vu, pas pris et on signe le manoir pour trente cinq mille francs.

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Et à partir de là, hypothèse Seznec, tu Quémeneur une fois signé la promesse de vente et il récupère ses dollars. Il est doublement gagnant. Il acquiert le manoir à vil prix et il reprend sa mise. Ça fait un mobile, ça, non? À part ça, il y a un gros doute sur la promesse de vente elle même qu'on a retrouvé. Je vous rappelle dans la valise de Quémeneur et si Sénèque l'avait écrite lui même, l'inspecteur Bonni perquisitionne chez lui à Morlot, et en fouillant, il tombe sur une machine à écrire une royale bis.

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Et il demande à des experts de comparer les caractères avec ceux de la promesse de vente.

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Je ne veux pas dire avec certitude que ce document a été écrit sur cette machine là, mais il a été écrit à tous les coups sur une machine similaire. Une Royal dit ça, je peux l'affirmer. Et d'où? Guillaume Seznec avait il cette machine à écrire chez lui? Une vendeuse de machines du Havre affirme sur présentation d'une photo qu'elle la lui a vendu le 13 juin. C'est très intéressant pour les enquêteurs parce que c'est du Havre qui est envoyé, vous vous souvenez?

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Le télégramme censé rassurer la famille de Quémeneur.

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Conclusion de tout ça Seznec est l'auteur du Télégramme. Et c'est lui qui a rédigé la promesse de vente, qui est donc fausse. Alors, on lui pose la question. Seznec. Vous étiez bien au Havre le 12 et le 13 juin. Pas du tout. J'étais un sale Brieux, je m'en souviens, je suis tombé une fois de plus en panne. Alors j'ai pris un train pour Saint-Brieuc. J'ai dormi à l'hôtel à Saint-Brieuc. Brieux. Et dans quel hôtel Mr.

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Seznec? C'est plutôt. Dommage, monsieur Seznec. Donc, il ne peut pas prouver qu'il n'était pas au Havre. C'est l'essentiel. S'il ne peut pas le prouver, c'est qu'il y était. Les raisonnements à la noix? Vous me direz, mais c'est comme ça que ça marche à l'époque. Et s'il y était, c'est qu'il est l'auteur du faux télégramme et de la promesse de vente. C'est logique, donc. Seznec a tué Quémeneur. Voilà le raisonnement.

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Du fond de sa cellule, Seznec cogite. Il cherche des moyens de se faire innocenter et il a une idée à la noix dans l'anse d'un panier de linge sale. Il glisse un message pour sa femme va donc trouver le perma goure. Dites lui que j'aurai passé le 23 mai, vers 6 heures ou 7 heures du soir et que je lui ai fait voir à cette date la promesse de vente. Ensuite, on va chez Laurus, appelle le bien de ma part et confie lui la même chose.

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J'espère que tu as trouvé quelqu'un pour dire que j'étais à Brest le 13 juin. Il demande à sa femme de mentir. Pas de pot, il se fait pincer et le juge lui demande. Mais enfin, qu'est ce que c'est que cette manigance Seznec? Je défends comme je peux, monsieur le juge, je n'ai contre moi que de faux témoignages. Je réponds par de faux témoins. Ouais, mais ça n'arrange pas ses affaires, comme sa tentative d'évasion juste après, on le retrouve coincé dans la buanderie de la prison.

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Le procès de Guillaume Seznec pour le meurtre de Pierre Quémeneur s'ouvre le 24 octobre 1924 à Quimper. Et ça commence mal. L'avocat que Seznec s'est choisi vient d'être nommé sous secrétaire d'État à l'Enseignement technique. Il ne peut pas venir et donc il envoie à sa place un Bleu qui n'a jamais plaidé aux assises. C'est mal parti. La salle est bondée. On a attendu des toiles rouges pour cacher les murs décrépis. Les chroniqueurs judiciaires de Paris sont là. Dehors, la foule crie Assassin à mort.

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Seznec à mort. Mais Guillaume Seznec se bat. Il nie tout. Il n'a pas tué Quemeneur, il n'a pas rédigé de faux. Il n'a pas envoyé de télégramme. Quant à la machine à écrire utilisée pour rédiger les fausses promesses de vente. Elle a été placée chez moi par la police pour me compromettre. C'est une machination.

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Évidemment, son goût pour l'argent et son passé de profiteur de guerre lui reviennent comme un boomerang. On rappelle que son premier commerce, une échoppe de réparation de vélos, a brûlé avant la guerre et qu'il a touché l'argent de l'assurance et qu'après la guerre, sa blanchisserie aussi a brûlé et qu'il a encore touché l'argent de l'assurance. Seznec se rebiffe. Le président l'interrompt Oui, de toute façon, monsieur Seznec, vous n'êtes pas jugé pour ça. N'est ce pas?

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Oui, je ne suis pas jugé pour ça, mais alors à quoi bon d'en parler? Il a raison, mais le président continue sur le même ton.

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Moi, voyez vous, monsieur Seznec, je ne sais qu'une seule chose, c'est que Quémeneur a été attiré dans un piège et assassiné, que son assassin la détrousser avant de disparaître et que cet assassin, vous le connaissez mieux que personne. On dit ce qu'on veut. Encore faut il le prouver, monsieur le président. Et le cric Seznec, qu'avez vous fait du cric? Vous êtes automobiliste, monsieur le président? Eh bien, si vous étiez automobiliste, vous sauriez qu'une panne est le moyen le plus courant de perdre ses outils.

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La sale bouffe de riz. La défense fait venir à la barre un Breton de Paris, un certain Lemaire, qui est receveur de tramway. J'ai vu monsieur Quemeneur sur la plateforme de mon tramer entre passé et hôtel de ville le 26 juin, j'en suis formel.

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Le 26, c'est à dire le lendemain du jour où il a disparu, il n'y a pas Klur. Un notaire de Landerneau vient dire à la barre qu'il l'a croisée Quemeneur en gare de Rennes le 26 ou le 27.

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Après douze jours de procès à minuit vingt, les jurés se retire pour délibérer. A la question. Guillaume Seznec est il coupable d'avoir volontairement donné la mort à Pierre Quémeneur? Les jurés, dans leur majorité, ont répondu oui. A la question Le crime a t il été commis avec préméditation? Les jurés ont répondu non. A la question y a t il eu Guetta tympans? Les jurés ont répondu non à la question. Est il coupable de faux en écriture privée?

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Les jurés ont répondu oui. Pas de préméditation, Seznec, sauf sa tête, il échappe à la guillotine. En conséquence, la Cour condamne Guillaume Seznec aux travaux forcés à perpétuité. Et à partir de là, Guillaume Seznec suit le parcours des Perpètrent de l'époque. D'abord le pénitencier de l'île de Ré. Si vous passez par là, allez le voir. C'est toujours une prison, une prison qui a la particularité d'avoir un petit port. D'où le 7 avril 1927, Guillaume Seznec embarque sur le bateau prison La Martinière, en direction de la Guyane.

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À bord de La Martinière, ils sont 700 700 bagnards entassés dans des cales pestilentielles avec les vagues. Ça dégoupiller à tour de bras. Puis l'urine, les maladies. Mais Seznec tient le coup. Et il débarque à Saint-Laurent-du-Maroni, où il est accueilli comme une vedette. Son procès a fait la une de tous les journaux et ça lui permet de bénéficier d'entrées d'une certaine protection des autres détenus.

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Assez vite, il est transféré sur l'île Royale, ce qui n'est pas plus mal, c'est plus aéré que le bagne de Cayenne. Il fomente plusieurs projets d'évasion. Il se fait pincer d'ailleurs, mais il échappe aux sanctions et on le mette à travailler d'abord dans les cuisines, puis au jardin, à l'église et au sémaphore. Et après de longues années, on finit par le mettre comme garçon de famille chez un notable de Caillette, dans une belle maison coloniale.

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C'est la planque et c'est comme ça qu'il tient le coup. Et les années passent et en 1947, après vingt ans de bagne, on lui annonce qu'il peut rentrer chez lui par ses propres moyens. Comment va t on l'accueillir à Morlaix? Voici un document unique exhumé des archives d'Europol, un enregistrement de Guillaume Seznec à son retour en France avec 20, oui.

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Et quand vous dormez? Et qu'est ce qui vous a paru le plus extraordinaire de retrouver cette vie qui ne ressemblait pas du tout à celle qui était la vôtre quand vous êtes là bas? Vous avez connu davantage. Les murs n'étaient plus les mêmes, les murs, les murs suppliants. Un tout. Rien n'était pareil au bagne. Évidemment, en 20 ans, il y a du changement. D'abord, sa femme est morte et l'une de ses filles aussi, et une autre de ses filles.

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Figurez vous, Jeanne vient d'être jugée pour meurtre et elle a tué son mari qui la battait. Mais elle a été acquitté. Crime passionnel?

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Et donc, quand ils rentrent en métropole, Guillaume Seznec ne va pas chez lui en Bretagne. Il s'installe à Paris chez une autre de ses filles, dans un tout petit deux pièces du 13ème arrondissement. Et là, il se retrouve au milieu de ses petits enfants qu'il ne connaissait pas. Et il va nouer une relation particulière avec l'un de ses petits fils, Denis, qu'on va retrouver quand il sera grand à la tête du combat pour la réhabilitation de son grand père.

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Parce que Guillaume Seznec ne va pas pouvoir se battre lui même. En février 1954, il est renversé par une camionnette dans la rue à Paris et il meurt. Il ne pourra pas défendre lui même son honneur parce que depuis qu'il est rentré, il n'a pas bougé d'un poil. Il n'a pas tué Quémeneur. Sa condamnation est une machination. Mais quand Guillaume Seznec meurt, son histoire ne s'arrête pas. L'affaire Seznec commence une seconde vie. Il n'a pas pu se réhabiliter lui même.

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Sa famille décide de le faire à sa place depuis 1954, année de la mort du patriarche. Mais Seznec, le petit fils, Denis en tête, ont déposé 14 demandes de révision de son procès. 14, toutes rejetées. Mais pendant toutes ces années, ils ont réussi au moins quelque chose. En 1924, quand Guillaume Seznec est condamné. Souvenez vous, les gens réclament sa mort. Amor Amor. L'opinion de l'époque est convaincue qu'il est coupable.

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En revanche, aujourd'hui, c'est tout l'inverse. C'est le tour de force du petit fils Denis. Il a mis l'opinion dans son camp pour l'opinion d'aujourd'hui. Seznec est victime d'une erreur judiciaire. Le problème, c'est que la justice, heureusement d'ailleurs, n'a que faire de l'opinion pour entrer dans un processus de révision d'une condamnation. Elle exige des éléments nouveaux et probants de nature à faire naître un doute. Pas des trucs Eider dans le dossier et qui n'ont pas été exploités.

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Non, nous, vous. Alors, qu'est ce qu'il y a de nouveau dans l'affaire Seznec? Depuis sa condamnation de 1924? Et bien d'abord, on a retrouvé cher, dit vous savez, le marchand de voitures d'occasion de Paris à qui les deux compères Seznec et Quéméneur venaient proposer un lot de Cadillac américaines. À l'époque, on n'avait pas retrouvé. On avait fini par penser d'ailleurs qu'il n'existait pas, que Seznec l'avait inventé pour faire oublier le vrai but de ce voyage.

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Tu es Quémeneur et le dépouiller bien cher dit existe enfin. Son vrai nom, c'est gardie. C'est un Algérien et vous savez ce qu'il dit. J'ai rencontré monsieur Quémeneur le 26 août à 8 heures à la Banque privée coloniale, avenue du Maine. Il venait de toucher un mandat de cinq mille francs qui venait d'arriver de Landernau. Or, le 26, c'est le lendemain de sa disparition, le 26, Seznec est sur le chemin du retour. C'est nouveau, ça.

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Si c'est vrai. Et puis, il y a de nouveaux témoins, un chauffeur de taxi affirme et on regrette qu'il ne l'ait pas dit plutôt qu'il a transporté Quémeneur jusqu'à sa propriété de Plourivo le 27 mai. Et là, c'est deux jours après sa soi disant disparition. Ça aussi, c'est nouveau. Si c'est vrai. La même nuit, six marins qui se trouvent sur un bateau au large du manoir disent qu'ils entendent des coups de feu. Donc, il y avait du monde au manoir et donc peut être Quémeneur, peut être.

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Dans l'histoire de cette tentative de révision du dossier Seznec, il se produit aussi un truc absolument unique. Six des douze jurés qui ont condamné Seznec en 24 à Quimper organisent une réunion. C'est absolument interdit. Les jurés sont tenus au secret du délibéré, mais bon, ils sont entre eux. Venez, tendez l'oreille, écoutez ce qui se raconte. Moi, j'ai voté pour la perpétuité. Je n'aurais pas dû. J'en dort plus que moi. C'est pareil.

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On doit réparer ce qu'on a fait. Six des douze jurés qui ont condamné Seznec ont des états d'âme, ils le font savoir dans une déclaration. Ils réclament la révision du procès. C'est du jamais vu.

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Enfin, tous ceux qui vont se battre pour la réhabilitation de Guillaume Seznec vont buter sur la personnalité du policier Pierre Bonnet Bonnet. C'est lui qui retrouve chez Seznec. Vous vous souvenez, la fameuse machine à écrire, la pièce à conviction qui a permis de le condamner? Et bien, ce boni étant sacré lascar. Attention, Bony n'est pas le patron de l'enquête de l'époque. Le patron, c'est le commissaire Vidal Moni, c'est un bleu, c'est un inspecteur stagiaire, mais c'est un ambitieux qu'on va retrouver dans tout un tas d'affaires de basse police qui ont déshonoré la police sous la Troisième République.

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L'affaire Stavisky, l'affaire du conseiller Prince, etc. Est d'ailleurs à ce moment là. Quand on va commencer à lui chercher des poux, il ira. Si on me vire, je sortirai toute l'affaire Seznec. J'ai pris trop de risques. Des risques qu'elle risque, M. Bonné, par exemple, aller planquer une machine à écrire dans la maison de Seznec pour le compromettre. C'est ça la question concernant l'inspecteur Boney. On n'aura pas de réponse. En 1935, Bogny se fait virer de la police pour corruption et il ne balance rien sur l'affaire Seznec.

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En revanche, vous allez adorer la suite de sa carrière. On le retrouve en 1941 au service de la Caisse des Dépôts. La police n'a pas voulu de lui. On l'a écarté avec dégoût. Qu'à cela ne tienne, la guest appeaux saura exploiter ses talents. Ce qu'il a fait pour eux, je n'en sais rien, mais on sait ce que faisait la Gestapo à l'époque. Elle a arrêté des Juifs, elle a arrêté des résistants, elle a arrêté des infiltrés.

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Quoi qu'il en soit, en décembre 1944, à la fin de la guerre. Pierre Bonnet fusillé pour collaboration. Il aurait dit à son fils avant de mourir. J'ai eu la certitude, pour ainsi dire formelle. Que Seznec était innocent. Oh, ça pèse lourd ça, s'il c'est vrai qu'il l'a dit, qu'il aurait dit aussi quelques années plus tôt en 36, la machine à écrire. Eh bien, c'est moi qui l'ai caché chez Seznec. Il l'aurait dit.

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Puisqu'on parle de la machine, la vendeuse du Havre qui avait dit à l'époque sur photo qu'elle avait vendu la machine à écrire à Seznec, eh bien, en 1993, elle a changé d'avis. Quand on m'a montré la photo, je l'ai pas reconnu. En vérité. Mais c'est Bonnet qui m'a dit de dire que j'étais lui. Brenet encore lui, vous savez ce que disaient les policiers bretons à l'époque. Robe dans l'affaire Seznec. Les connards de Paris ont fabriqué des preuves.

[00:32:38]

C'est ça la vérité. Dans Le combat de Denis Seznec, il y a sans doute eu un moment où il s'est dit Je ne me suis pas battu pour rien. On va y arriver. La justice va faire marche arrière. C'est en janvier 2001, sous Jospin. La garde des Sceaux est bretonne, Marylise Lebranchu, et elle milite depuis longtemps pour la réhabilitation de Seznec. Alors, le 28 janvier 2001, elle dépose elle même une demande de révision la garde des Sceaux.

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Le petit fils Donis est aux anges.

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Bouleversé. Pas dire autrement. Ému que 18 ans de lutte pour rentrer dans les records. Mais ma famille lutte depuis 8 ans. À l'époque, qui va demander la révision? Le petit pas ma mère, voyez le garde des Sceaux et troisième personnage de l'État, est une Bretonne. Connaît bien le dossier. Elle est là avec moi, pour la Grande Bretagne, en tant qu'élu. La seule étape qui encore à passer, c'est que les magistrats de la commission de révision ne comptent pas comme ils l'ont fait le 28 juin 80 ou après la belle opprimant Isabelle Opprimant.

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On les amène à condamner la justice comme des généraux de l'armée. Et pas du tout. Le cas n'est pas vrai. Et mon grand père? Au contraire, ils ne peuvent être honorés cinq ans plus tard, en 2006.

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On attend toujours la décision de la Cour de révision. Mais ça sent bon. L'avocat général a demandé à la Cour la réhabilitation de Seznec au bénéfice du doute. C'est le bémol. Il l'a dit qu'on ne pouvait pas être certain qu'il était innocent, mais que, dans le doute, on pouvait le réhabiliter. Le petit fils Donis sont concentrés sur le doute qui doit se prononcer.

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L'innocence, je crois qu'ils le savent que dans l'opinion et dans l'histoire, quelque part, elle est inscrite soi même.

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Je vous fais remarquer l'audace de l'avocat général parce qu'à l'époque, Marylise Lebranchu n'est plus garde des Sceaux depuis belle lurette. Il n'est pas assez hors.

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La Cour de révision prend deux mois pour délibérer et elle rend sa décision le 14 décembre 2006.

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Les magistrats de la Cour de révision ont donc décidé de ne pas annuler la condamnation de Guillaume Seznec, qui date de 1924.

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Les arguments de la Cour de révision? Il n'existe aucun fait nouveau ou élément inconnu de la juridiction au jour du procès. De nature à faire naître un doute sur la culpabilité de Guillaume Seznec et concernant le policier Baugnies, qui était l'argument numéro 1 de cette demande de révision. La Cour de révision ajoute que rien n'établit que boni, quelles qu'aient été son comportement. À partir des années 30, vous aurez dès les années 24 et 25, fabriqué de faux coupables et de faux témoins.

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Pour Denis Seznec, c'est la douche froide.

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La justice, avec son bandeau sur les yeux, se disait aveugle. Depuis l'affaire d'Outreau, ils sont présents. On la croyait sourde, eh bien, depuis l'affaire Seznec, elle est devenue folle, folle.

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Et ce jour là, franchement, tout le monde se dit on en a fini avec l'affaire Seznec. Mais avec les Seznec, voyez vous, ça ne sera jamais fini. Jamais.

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Un homme, notamment, continue le combat. Maître Denis Langlois, l'un des avocats qui a défendu les dernières demandes de révision en février 2015, il publie chez Plon Pour en finir avec l'affaire Seznec. Un livre dans lequel il révèle un document inédit, extraordinaire, qui éclaire d'un jour totalement nouveau cette affaire. Il s'agit de la retranscription d'un enregistrement du fils de Guillaume Seznec, qui raconte une scène qui est un tremblement de terre dans cette affaire.

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En 1923, l'un des fils Seznec, donc, dit qu'on appelait petit Guillaume et qui à l'époque avait onze ans, raconte qu'on est dimanche, qu'il fait beau, qu'il est en train de jouer dehors dans la cour de la maison de Morlaix, et qu'il entend sa mère, pas son père, sa mère, crier. Les cris viennent de la fenêtre de la salle à manger. Alors ils s'approchent. Il se hisse à la fenêtre et voilà ce qu'ils voient.

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Je vous lis la retranscription de l'enregistrement. J'ai vu Quémeneur par terre et ma mère debout devant lui. Elle m'a aperçu. Elle m'a appelé. La bonne Angèle était dans l'encadrement de la porte. Elle avait entendu aussi. Elle était toute pâle. Je crois que ma mère a dû se défendre et le frapper à la tête. Mon père est arrivé dans le courant de l'après midi. C'est la seule fois que je l'ai vu pleurer qu'il en était malade. Il était abasourdi.

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Il disait On est ruiné, on est ruiné. Tout l'argent qu'on lui a donné, on n'en reverra jamais la couleur. Alors, ils ont discuté. Moi, je n'étais pas là dans les discussions. Ils ont discuté avec la bonne tout l'après midi et moi, on m'a ramené à l'école le soir et on m'a fait juré de ne rien dire. Incroyable! Le fils Seznec dit que c'est sa mère qui a tué Quéméneur, pas son père, sa mère, sa mère, à qui Quémeneur aurait fait des avances qu'elle aurait repoussé.

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Quémeneur serait tombé et il serait mort accidentellement. Et dans ce scénario, Guillaume Seznec, pour protéger sa femme, endosse le crime qu'il n'a pas commis. Et il rédige le faux compromis pour l'achat du manoir de Plourivo uniquement pour récupérer le dessous de table qu'il a versé à Quémeneur, puisqu'il est mort par la faute de sa femme. C'est perdu, il n'aura pas le manoir et donc il veut récupérer sa mise. Autant vous dire que cette version de l'histoire.

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Celle de l'avocat Denis Langlois, ne plaît pas du tout, mais alors pas du tout au petit fils de Guillaume Seznec, Denis. Lui, il se bat pour faire innocenter son grand père, mais il ne veut pas, en échange, accuser sa grand mère, sa grand mère, qui est décédée jeune. Après avoir toujours soutenu son mari, mais en vain. De deux choses l'une ou bien on pense que plus de 90 ans après, on peut faire émerger la vérité sur ce dossier et dans ce cas, il faut être prêt à accepter, y compris les issues qui dérangent.

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Ou bien on considère qu'il est impossible de revisiter une telle affaire après tant de temps et auquel cas il faut renoncer. Le gamin Seznec dit que le corps de Quémeneur a été enterré sur place, dans la propriété des Seznec à Morlaix. Et il déroule une sorte de selliers qui est extérieur à la maison. Et bien, il n'y a plus qu'à creuser.

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En février 2018, une équipe de bénévoles se met donc à creuser avec un tractopelle et elle tombe sur des 100 et sur deux ossements et sur une pipe. Les cendres, ça colle. Vous vous souvenez qu'un ouvrier de Guillaume Seznec, dès qu'il le voit mettre en marche la chaufferie de la scierie quand il rentre à la maison, met les ossements? Ce sont des seaux de boeuf. Fausse piste. Mais ça n'est pas fini. En décembre 2018. Nouveau rebondissement la radio RMC diffuse le témoignage d'une Normande de 85 ans, Cécilia Morant, qui raconte que son père Georges, en 1923, a enterré en cachette dans le cimetière de son village de saint Lubin de La Haye, un cadavre que l'un de ses copains, un garagiste, lui a demandé de dissimuler.

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Un homme que le garagiste en question, un certain Raymond Lenn, avait zigouiller à mon père, s'appelait Georges Morand.

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Il était responsable du cimetière à cette époque là, tout en étant agriculteur. Un jour, Raymond l'Aimé venu le chercher en pleine nuit pour l'aider à ramener le corps Quémeneur. Raymond Lainé avait tiré et l'avait blessé au ventre et il aura mis en chantier là. Mon père a indiqué qu'elle tombe. Il fallait prendre. C'était des tombes abandonnées depuis des années et là, on déposait le corps dans le caveau.

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Et pour le coup, ça, c'est une piste qui plaît bien au petit fils Denis Seznec. Dans la version de son grand père, on s'est toujours demandé où était passé Quémeneur après qu'il l'a déposée à la gare de Houdan. Et bien là, on a une réponse. Il s'est fait zigouiller par un garagiste qui l'a enterré dans un cimetière. Donc, les gendarmes vont voir cette femme. Vous dites, madame, que votre père? Vous a dit qu'il avait enterré Pierre Quémeneur dans le cimetière du village.

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C'est ça? Enfin, oui! Enfin, il m'a pas dit Pierre Quéméneur. Ça, c'est moi qui ai fait une déduction. Il m'a dit qu'il avait enterré un homme. Moi, j'ai déduit que c'était Quémeneur. Le procureur, à juste titre, trouve que c'est un peu léger pour se lancer, 95 ans plus tard, dans la fouille intégrale du cimetière de saint Lubin. Et donc, on va en rester là pour l'instant, parce que pour le petit fils Denis, c'est une piste très crédible.

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Si vous voulez poursuivre cette histoire, je vous conseille le best seller de Denis Seznec. Nous, les Seznec, aux éditions Robert Laffont. Et si vous acceptez les théories mal pensant, lisez donc pour en finir avec L'affaire Seznec, de Denis Langlois, aux éditions La différence?

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