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Raconte Christophe Hondelatte. Voici comment Natascha Kampusch raconte cette journée du 2 mars 98 qui l'a fait basculer dans une autre vie. A cette époque là, la petite Natascha habitait avec sa mère, un quartier au nord de Vienne, le quartier de Donnchad, le matin. Elle dit qu'elle s'est réveillée de mauvaise humeur. C'était un lundi et elle venait de passer le week end chez son père, en Hongrie. Il l'avait ramené très en retard et sa mère, inquiète et furieuse, lui avait dit quelque chose du genre.

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Puisque c'est comme ça, t'es pas prête de retourner chez son père. Alors elle avait mal dormi. Et quand elle s'était levé, le matin du 2 mars, elle était toujours très fâché contre sa maman. Depuis la rentrée de Noël, elle avait négocié d'aller toute seule à l'école à pied, à 10 ans. C'était plus un bébé. Mais en vérité, tous les matins, elle avait la trouille. C'était une petite fille timide, discrète, solidaire.

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Elle n'avait pas beaucoup d'amis. Elle était mal dans sa peau à cause de son poids, peut être 45 kilos. A 10 ans, on se moquer d'elle. On l'appelait la grosse. C'est pour ça qu'elle n'avait pas confiance en elle. C'est pour cela qu'elle avait peur. Sur le chemin de l'école.

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Ce matin là, elle enfile la robe que sa mère lui a préparé, celle avec le angines et le bas en flanelle grise. En vérité, cette rebelle la déteste. Dedans, elle se trouve horrible, Baudinet. Mais tant pis, elle n'a pas le choix. Elle récupère le goûter sur la table de la cuisine. Elle enfile son anorak rouge, elle caresse d'une main les chats de la maison et elle sort de l'appartement sans un mot pour sa mère.

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Elle est en colère. Elle veut marquer le coup. Et pourtant, combien de fois sa mère lui a dit Il ne faut jamais se séparer fâchés. On ne sait pas si on se reverra. Il est 7 heures quand elle quitte son immeuble en direction de l'école, qui n'est pas très loin. À travers les petites rues du quartier, en rentrant dans la rue, mélange gazeux, il y a une fourgonnette blanc. Et à côté, il y a un homme debout, de taille moyenne, mince.

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Il est seul. Il semble regarder autour de lui comme s'il attendait quelque chose. C'est idiot. Mais quand elle le voit, Natacha raconte qu'elle a commis une sorte de pressentiment. Si elle pouvait, elle ferait un détour. Mais c'est idiot. l'École est juste derrière la suite. C'est elle qui la raconte le mieux.

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À l'instant même où le regard baissé, je m'apprêtais à passer devant cet homme. Il m'a frappé par la taille. Il me souleva et me poussa par la portière ouverte à l'intérieur de la fourgonnette. Tout cela se fit d'un seul geste, comme s'il s'était agi d'une chorégraphie que nous aurions répété ensemble crier, criais, je ne crois pas. Et pourtant, tout en moi n'était qu'un cri. Il monte en moi et resta coincé dans ma gorge. Un cri muet comme dans ses rêves, où on veut hurlés, mais où on n'arrive pas à émettre le moindre son dans lequel on veut courir, mais où les jambes sont comme enfoncées dans le sable mouvant.

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Son ravisseur n'a aucun mal à la pousser à l'arrière de la camionnette. Elle écrit dans son autobiographie J'ai su que j'avais été enlevée et que j'allais vraisemblablement mourir au moment même où la portière du véhicule se referme derrière moi. J'ai vu passer devant moi, dans un scintillement, les images de la messe d'enterrement de Jennifer violée, assassinée au mois de janvier dans une voiture alors qu'elle avait tenté de s'échapper. Les images de la peur des parents de Karla, victimes de sévices sexuels, trouvée inconsciente dans un étang, est morte une semaine plus tard.

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A l'époque, je me suis demandé ce que pouvait être la mort et ce qui lui succéder. Si on avait mal juste avant et si l'on voyait vraiment une lumière. Maintenant, la fourgonnette blanche roule un long moment, elle s'arrête dans une forêt de pins comme il en existe beaucoup autour de Vienne. L'homme sort de la voiture et il passe un coup de téléphone. Il semble attendre quelqu'un. Natasha est maintenant persuadée qu'elle va être livrée à un réseau pédophile.

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Puis le ravisseur remonte dans la fourgonnette. Il dit seulement qu'ils ne sont pas venus. Et ils se remettent en route. Cette fois, il roule jusqu'à Tarasov, dans la banlieue Nord-Est de Vienne. Il arrive dans un garage. Il lui dit de rester assise, puis il descend chercher une couverture dont il lui couvre la tête. Ensuite, elle sent qu'il la soulève, qu'il la cale sur son épaule. Elle ne voit rien, mais elle sent qui descend des marches et qu'il la pose par terre.

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Il lui enlève la couverture noire. Pas longtemps.

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Il allume la lumière, une ampoule vissée sur une douille. Elle est dans une pièce qui fait cinq mètres carrés, pas plus. Dans un coin, il y a une couchette, des toilettes sans couvercle et un lavabo. Il n'y a aucune fenêtre. Natasha se dit qu'à cette heure ci, sa mère et la police, peut être, doivent la chercher partout. Elle n'est pas loin de chez elle. La voiture n'a pas roulé longtemps. On va bien finir par la retrouver.

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Si elle savait, Repin raconte. L'homme qui a enlevé Natascha s'appelle Wolf Gang Priklopil. C'est un Autrichien de 36 ans, ingénieur électricien chez Siemens. Ses voisins le décrivent comme un homme très discret. On pourrait même dire distend. Pas de femme, pas d'amis. On ne lui connaît qu'une seule passion, la grosse BMW rouge qu'il a hérité de son père. Tout comme la maison, d'ailleurs. C'est son père qui a fait aménager la cave sous la maison.

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C'était dans les années 70 et à l'origine, ce devait être un abri antiatomique. La cachette est introuvable. Si on ne sait pas qu'elle existe, l'entrée est dissimulée sous une trappe dans le garage. Un premier escalier conduit à un passage secret très étroit et deux mètres plus bas se trouve une porte qui, elle, ouvre sur la petite pièce devenue ce 2 mars 1998 la prison de Natascha Kampusch. Le jour de son enlèvement et de son arrivée dans le cachot, elle est encore pleine d'espoir.

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Elle supplisson kidnappeur de la laisser partir. Je ne raconterai rien à personne si tu me laisse partir maintenant, personne ne remarquera rien. Je dirais juste que j'ai fait une fugue. Si tu ne me garde pas toute la nuit, il arrivera rien. Évidemment, Priklopil n'en tient pas compte. La première nuit, Natacha ne ferme pas l'œil toute seule dans cette cage. Elle est terrifiée, alors, et c'est étrange, mais c'est vrai, elle n'attend qu'une seule chose qu'il revienne, qu'ils redescendent dans la cave.

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A partir de ce moment là, Volle Gang Priklopil devient le centre de son monde. D'autant que les premiers jours, il est aux petits soins. Il lui apporte des gâteaux qu'elle réclame. Il va même jusqu'à lui lire une histoire et à l'embrasser avant de dormir. Enfin, dormir, un bien grand mot quand il quitte la cave. Elle est dévorée par l'angoisse et de toute façon, impossible de dormir avec le bruit du ventilateur qu'il a installé pour renouveler l'air de la pièce.

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Le cliquetis de ventilateurs, ça la rend folle. Elle en fait des crises de nerfs. Elle tape contre les murs avec ses petits points ou avec ses bouteilles d'eau. Elle espère que quelqu'un va l'entendre. Priklopil la traite comme une toute petite fille. Il lui épluche ses fruits. Il lui lave les dents. Il lui coupe les ongles avec elle. Il joue à la poupée. Elle, ce dont elle a peur, c'est d'être seul. Alors elle joue le jeu pour qu'il continue de s'occuper d'elle.

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Elle raconte C'est ainsi qu'au bout de quelques jours, je me trouvais dans ma prison à jouer avec mon ravisseur aux dames et aux petits chevaux. La situation me paraissait irréelle. J'avais l'impression d'être dans un film absurde. Personne dans le monde extérieur ne croirait que la victime d'un enlèvement ait pu faire des pieds et des mains pour jouer aux petits chevaux avec son kidnappeur. Mais le monde extérieur n'était plus le mien j'étais un enfant, j'étais seul, il n'y avait qu'une personne capable de me sauver de cette solitude accablante, celle qui m'y avait plongé.

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Le temps passe et un jour, elle demande à Priklopil un ordinateur et il lui en donnant pas relié à Internet, évidemment, mais au moins elle peut jouer. Et quelques jours plus tard, il lui apporte quoi? Se faire à manger toute seule? Une plaque de cuisson, un petit four et, avec le temps, une table de jardin, deux fauteuils pliables et un torchon pour faire office de nappe et quelques couverts. Elle raconte à ce sujet Lorsque le ravisseur arrivait avec le repas, je mettais les torchons sur la table.

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J'ai ajouté deux verres et je déposer soigneusement les fourchettes à côté des assiettes. Il n'y aurait plus manqué que les serviettes. Mais il était trop radin pour ça. Puis nous, nous essayons ensemble à cette table pliante. Nous mangions les plats réchauffés et buvions du jus de fruit. Il ne me rationnée pas encore à cette époque là et j'ai apprécié de pouvoir boire autant que je le voulais. Une petite forme de vie douillette s'installa et je commençais à me réjouir de ces repas pris en commun.

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Il apportait une coupure dans ma solitude. Il devint important pour moi, mais Priklopil ne va pas tarder à changer de visage. Jusqu'à en faire sa chose. Par exemple, quand il la menace de la livrer à d'autres hommes qui, eux, d'utiles, vont lui faire vraiment mal. Il commence aussi à procéder à un lavage de cerveau. Tes parents ne t'aime pas, tes parents se fichent de toi. Tes parents ont déjà arrêté de te chercher. Et elle se dit Et s'il disait la vérité?

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Et maintenant, ils utilisent le chantage. Si tu ne fais pas ce que je te dis, je te couperait la lumière. Si tu n'es pas gentil, je vais devoir te ligoter. Ça fait deux semaines maintenant qu'il a enlevé Natasha et le protecteur des premiers jours s'est mué en manipulateur, paranoïaque et violent. Le 25 mars, ça fait trois semaines que Natasha n'a eu aucun contact avec le monde extérieur et c'est l'anniversaire de sa maman. Alors, elle est triste.

[00:12:18]

Elle est très triste. Elle supplisson kidnappeur de la laisser enregistrer. Un message pour elle, pour sa mère sur un magnétophone, il finit par accepter. Il lui promet d'envoyer la cassette. Évidemment, il ne le fera pas. Au contraire, il lui raconte qu'il a contacté ses parents et qu'ils ne tiennent pas particulièrement à l'avoir libéré. Tes parents ne t'aime pas. Ils ne veulent pas te voir. Ils sont heureux de s'être enfin débarrassés de toi pour une petite fille qui manque cruellement de confiance en elle.

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Ses mots sont comme des coups de couteau dans l'estomac. Mais Natasha se mord la lèvre. Elle prend sur elle. Non, elle ne peut pas y croire, c'est sûr. Ses parents et la police la cherchent partout.

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Mais alors, que fait la police, justement? Henrotin. De la tricotent. Quand Natacha ne rentre pas à la maison le soir du 2 mars, sa mère, évidemment, prévient immédiatement la police. On la cherche partout, dans les jardins, dans les rues, près de son école et même dans le Danube. Rien. Les médias, eux, continuent pendant quelques temps de diffuser son portrait. La petite fille mesure environ un mètre 45 pour 45 kilos.

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Elle est d'assez forte corpulence. Elle a des cheveux châtains bleach, une frange des yeux bleus. Le jour de sa disparition, elle portait une veste de ski rouge, une robe engines bleue, des collants bleu clair, des lunettes à verres ovales et un cartable à rabat jaune avec des courroies turquoise.

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En quatre jours, la police reçoit plus de 130 signalements. Une fois, quelqu'un l'a vu avec sa mère dans un supermarché. Une autre fois, on l'a vu seul sur une aire d'autoroute dans le Tyrol. Evidemment, les parents étant divorcés, une équipe de policiers se rend dans la maison du père, en Hongrie, au cas où c'est lui, le père, qui l'aurait enlevée. Six jours après la disparition, le chef de la police déclare lors d'une conférence de presse Nous ne baissons pas les bras.

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L'espoir s'amenuise cependant de revoir l'enfant vivante. C'est ça l'état d'esprit de la police autrichienne, six jours après la disparition de Natascha. Elle est probablement morte. Si Natascha avait pu entendre ça de sa cave, elle aurait tué les Ménon. Mais non, je suis vivante. Venez me chercher. Je suis juste à côté. Et le pire, c'est que la police va passer plusieurs fois tout près d'elle, un jour, elle va même venir à la maison.

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Elle va interroger Priklopil. Ce jour là, les policiers ont enfin décidé d'exploiter un témoignage qu'ils ont pourtant recueilli le lendemain de l'enlèvement. Et là, on n'est plus d'un mois après. Une fillette de 12 ans leur a raconté qu'elle a vu une enfant poussée de force dans une camionnette blanche aux vitres teintées. Les policiers ont identifié 700 fourgonnettes blanches et parmi elles, celle de Priklopil. Il aura fallu un peu de temps pour les retrouver, toutes ces camionnette blanche.

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Mais le vendredi avant Pâques, Natacha est retenue à ce moment là depuis 35 jours. Les policiers autrichiens se présentent chez Priklopil et lui demandent de leur montrer la camionnette, mais lui, à la télé. Il a entendu parler de cet intérêt pour les camionnettes blanches, alors il a chargé sa fourgonnette de gravats et il prétend qu'il s'en sert pour faire des travaux de rénovation. Et le 2 mars, le 2 mars, vous étiez où? Vous faisiez quoi?

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Il n'a pas d'alibi. Il dit qu'il a passé toute la journée seul chez lui. OK, c'est entendu, monsieur. Merci beaucoup. Et joyeuses Pâques! Et elle, elle est là, elle est juste en dessous du garage et ils s'en vont. Et ce n'est pas fini un jour, la police reçoit un appel téléphonique anonyme beaucoup plus précis, qui désigne carrément un ingénieur électricien qui serait un nom original qui aurait de grosses difficultés relationnelles qui auraient un penchant sexuel pour les enfants.

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Et la personne qui a passé. Cet appels anonymes donne une adresse à Arnaud, mais une adresse. Ils n'ont pas exploité cette piste. Ils n'ont pas exploité ce témoignage à leur décharge, il faut savoir que dans ce genre d'affaire, des dingos qui racontent n'importe quoi, il y en a toujours beaucoup et des radios existent et des voyants, etc. Etc. Constatons juste qu'ils n'ont pas exploité la piste qui pouvait les amener à Natacha. Si elle veut sortir de son cachot, elle devra se débrouiller toute seule.

[00:17:35]

On raconte sur Europe1. Pendant ce temps, Natacha a bien compris que si elle veut survivre, il faut qu'elle s'adapte. Qu'elle négocie. Elle obtient de Priklopil des produits d'entretien et elle passe désormais des journées à récurer et à astiquer sa cellule. Mais le temps est infiniment long et l'angoisse de l'enfermement s'ajoute bientôt l'ennui.

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Elle arrive à convaincre son ravisseur de lui donner une télé et un magnétoscope, et il lui fournit de vieilles cassettes vidéo des séries des années 90. Avec les vidéos et les livres, Priklopil a trouvé un bon moyen de chantage. Elle raconte Le ravisseur savait à quel point j'avais besoin d'être alimentée en films et en lecture. Il disposait ainsi d'un nouvel instrument de pouvoir. La privation lui permettait de faire pression sur moi. Le chantage qui tombe bientôt à la torture psychologique, puis à l'esclavage pur et simple.

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Il commence par installer une minuterie dans le cachot tous les jours. La lumière s'allume à cette heure. Pendant 13 heures, elle peut cuisiner, lire ou regarder une série. Mais à 20 heures, il coupe l'électricité. Je me retrouvais ainsi d'une seconde à l'autre dans une obscurité totale. Le téléviseur s'arrêtait au milieu d'une série. Je devais poser mon livre sans avoir terminé ma phrase. Et si je n'étais pas déjà couché, je devais revenir à ma chaise longue en tâtonnante à quatre pattes.

[00:19:08]

L'ampoule, le téléviseur, le magnétoscope, la radio, l'ordinateur, la plaque de cuisson, le chauffage, tout ce qui a apporté un peu de vie dans mon cachot s'éteignaient. Et puis, six mois après son enlèvement, Natacha sort enfin de sa cellule. C'est la première fois. Ça fait des semaines qu'elle supplie Priklopil de lui laisser prendre un bain en eau chez lui et un soir, il cède. Mais avant, il lui dit Si tu cries, je vais être obligée de faire quelque chose.

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Tu dois savoir que toutes les portes, toutes les fenêtres sont piégées. Si tu ouvres une fenêtre, tu te fais exploser. Il l'a fait monter chez lui. Il lui fait couler un bain moussant. C'est la première fois, ça ne sera pas la dernière. À partir de ce moment là, régulièrement, elle aura le droit de monter dans la maison. La fin de l'année approche et Priklopil va exaucer un de ses vœux les plus chers. Elle veut fêter Noël.

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Il lui offre tout ce qu'elle a demandé un petit ordinateur pédagogique, un bloc à dessin, une boîte à crayons et à aquarelle. Il faudra attendre la fin de l'année suivante, une longues années de captivité de plus pour qu'il accède à un autre de ses grands souhaits sortir dehors. C'était une nuit froide et claire de décembre. Quelques jours auparavant déjà, l'homme avait communiqué les règles à respecter pour cette sortie. Si tu cries, je te tue. Si tu cours, je te tue ou je tuerai n'importe quelle personne qui entendra ou te verra si tu commets la bêtise d'attirer l'attention sur toi.

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C'est pour cela que pendant très longtemps, elle ne va pas oser s'échapper quand il me prit fermement par le bras et ouvrit la porte du jardin. Un profond sentiment de bonheur s'empara de moi l'air frais, me caressait doucement, le visage et les bras, et j'ai senti l'odeur d'air confinée et corrompue qui s'était fixé dans mon nez se dissiper peu à peu en me libérant l'esprit.

[00:21:24]

En 2000, Natacha a 12 ans. Un matin, elle se réveille. Elle découvre des taches de sang dans son pyjama. Ce sont ses premières règles. La voilà donc obligée de demander à Priklopil de lui acheter des serviettes hygiéniques. L'air de rien, cette séquence va tout changer et peut être attendait ce moment depuis le début, qu'elle ne soit plus un enfant, qu'elle soit une femme. Alors, elle devient la femme de la maison. Avantage elle passe plus de temps en haut que dans le cachot.

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Mais en réalité, elle quitte en enfer. Car elle devient son esclave. Elle cuisine, elle nettoie les briques dans une maison où les volets sont fermés en permanence pour qu'on ne la voit jamais s'échapper. Elle a trop peur, comme il dit, qu'il y ait des alarmes sur les fenêtres. Elle ne veut pas mourir. Et maintenant, voilà qu'il veut rénover la maison. Natacha, qui n'a que 12 ans, va abattre un travail de forçat. Plaques de marbre, sacs de ciment, elle porte tout.

[00:22:32]

Elle ne dit rien. Et quand elle fait une bêtise, il lui lance une scie à la figure où il lui plante un cutter dans le genou. Et parfois, il la frappe. Vous vous demandez à ce point de l'histoire s'il l'a violée? Dans son livre, Natascha Kampusch est restée un peu évasive sur ce sujet. Elle raconte essentiellement une scène dans la nuit, en haut dans sa chambre. Il l'attacher à lui. Il la saucissonner avec lui et lui réclamer des câlins.

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Elle n'en dit pas plus. A 15 ans, la prison psychique qu'il s'est employé à construire autour d'elle est terminée. Natascha ne pense même plus à s'enfuir.

[00:23:17]

Henrotin Delettre raconte. Au fil du temps, Natascha Kampusch, enlevée à l'âge de 10 ans le 2 mars 98 sur le chemin de l'école, est devenue l'esclave de Volkan Priklopil. Elle fait la cuisine, le ménage, les sévices qu'elle subit, son quotidien. Son ravisseur n'hésite plus à se montrer violent, aussi bien physiquement que psychologiquement. Natascha a 16 ans quand les travaux de la maison sont enfin terminés. Envolés, la petite fille dodue. Elle est maintenant rachitique.

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Elle mesure 1 mètre 57 et pèse 38 kilos. Il faut dire que maintenant, dès qu'elle a l'air trop forte, il la prive de nourriture. Elle n'a plus que la peau sur les os. En vérité, les dépressive, elle passe des heures à pleurer. Elle n'a plus la force de se lever et un soir, elle décide d'en finir. Ce n'est pas la première fois qu'il pense au suicide. A 14 ans, elle a déjà essayé, en vain de s'étrangler avec ses vêtements.

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A 15 ans, elle a voulu s'ouvrir les veines avec une grande aiguille à coudre, mais elle n'a pas supporté la douleur. Ce soir là, elle décide de s'asphyxier en laissant allumée la plaque de cuisson. Une fumée envahit peu à peu la pièce. Et puis, sa volonté de vivre la rattrape. Elle éteint la plaque. Si elle ne veut pas mourir, il ne lui reste qu'une solution s'enfuir. C'est à cette époque que Priklopil n'emmène pour la première fois en dehors de la maison.

[00:24:55]

Une courte balade en forêt, évidemment, il va la tuer. Si elle dit Tomo, elle ne bronche pas. La deuxième fois, ils l'emmènent à la droguerie du coin pour être certain qu'elle ne parle pas ou ne tente pas de s'échapper. Ils se collent juste derrière elle. Une vendeuse lui adresse la parole. C'est la première fois depuis sept ans que quelqu'un d'autre que son ravisseur s'adresse à elle. Natascha raconte dans son livre qu'il ne lui même pas venu à l'esprit d'appeler à l'aide, qu'elle était tétanisée, que Priklopil mette sa menace à exécution et tue la vendeuse à cause d'elle.

[00:25:34]

Un jour, ils sont en voiture tous les deux quand ils tombent sur un contrôle de police. Natacha n'a qu'un mot à dire pour que son cauchemar s'arrête. Mais là encore, elle n'ose pas. Elle cligne des yeux. Elle leur roule des yeux pour prévenir les policiers, mais il ne la regarde même pas. Ils vérifient les papiers de la voiture. Ils sont en règle. Il les laisse repartir. Quelques semaines avant ses 18 ans, il va se passer quelque chose d'incroyable.

[00:26:02]

Il décide d'emmener Natascha au ski. Ils vont skier à Oscar, qui est la station la plus proche de Vienne. Pendant tout le trajet, elle se répète en boucle. Cette fois, je dois réussir à m'échapper. Cette fois, je dois réussir à m'échapper. Cette fois, je dois réussir à m'échapper.

[00:26:22]

Une fois arrivé à la station, elle va aux toilettes. Elle tombe sur une dame blonde. Elle se précipite sur elle et lui dit dans un torrent de paroles qui héler le calvaire qu'elle vit depuis des années. La femme lui sourit et elle tourne les talons. C'était une touriste hollandaise. Elle ne parlait pas allemand. Elle n'a rien compris. Hier, elle a franchi le pas. Elle a osé. Elle ne fera plus marche arrière. Le 23 août 2006, vers midi, Priklopil demande à Natacha de passer l'aspirateur dans la fourgonnette blanche, celle qui a servi à l'enlèvement.

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Elle se mettent au travail, commencent à nettoyer l'intérieur, puis les sièges. Soudain, le téléphone portable de Priklopil sonne. Il n'entend rien à cause du bruit de l'aspirateur. Alors, il s'éloigne. C'est maintenant ou jamais. Natacha raconte. J'étais seule pour la première fois depuis le début de ma détention. Le ravisseur m'avait quitter des yeux. Je restais pétrifiée un instant devant la voiture. Puis tout va très vite, dans un geste d'une violence surhumaine. Je m'arracher aux sables mouvants qui paralysait mes jambes.

[00:27:34]

La voix de mon second, moi, me martelait Si tu avais été enlevé hier, tu courrai maintenant comporte toi comme si tu ne connaissais pas le ravisseur.

[00:27:44]

C'est un étranger au cours Bordeaux-III. Au cours, je laisser tomber l'aspirateur et je me précipiter sur la porte du jardin. Elle était ouverte. Alors, Natascha court, elle court, elle s'arrête à la première maison qu'elle croise. Elle sonne. Pas de réponse. Elle court jusqu'à la maison d'après. Elle aperçoit une vieille dame à la fenêtre. Elle frappe. Elle appelle doucement. S'il vous plaît, s'il vous plaît, aidez moi à appeler la police. Je suis victime d'un enlèvement.

[00:28:14]

Appeler la police. Méfiante, la dame ne la laisse pas entrer. Elle lui demande d'attendre près de l'entrée dans son jardin. Mais quelques minutes plus tard, Natascha voit au loin le gyrophare des policiers qui s'approchent. Elle raconte son histoire. Les policiers sont un peu sceptiques, mais ils l'emmènent au commissariat et du commissariat, à la direction de la police et de la direction de la police, dans les bras de sa mère. Elle raconte J'ai reconnu ma mère aussitôt 3000, 96 jours avait passé depuis cette matinée où j'avais quitté l'appartement sans dire au revoir.

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Louis Noël. D'innombrables soirées où j'aurais tant souhaité un mot de sa part, une caresse. Et elle était maintenant devant moi, presque inchangée, comme un rêve qui se matérialise soudain. Ça n'est que le lendemain de son évasion que Natacha pose la question qui le hante. Depuis qu'elle s'est échappée à un policier. Elle demande. Et lui, vous avez des nouvelles? Oui, dit le policier avec prudence. Il est mort. Il s'est donné la mort à 20 heures 59 à la gare de Vienne en se jetant sous un train.

[00:29:39]

Repin de la tricotent. Tout finit donc et tout commence pour Natacha, car le monde entier s'intéresse à son histoire. Le monde entier veut l'interviewer et on lui propose des sommes astronomiques pour une interview.

[00:30:01]

Le 7 septembre 2006, Natascha Kampusch donne une longue interview à la télévision autrichienne. Elle a l'air bien, étonnamment bien. Que vous avez regardé l'entretien en intégralité d'abord Hélène, très simplement, qu'est ce qui vous a marqué? Ce sont les multiples visages de Natacha, d'abord, presque celui d'une madone, les traits très régulier, les yeux limpides, la tête même, parfois un peu inclinée sur le côté. C'est une jeune femme qui se présente aussi très forte, intelligente, équilibrée.

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Elle manie l'ironie et l'humour. Et pourtant. Et ça, c'est terrifiant. Quand elle parle, on ne peut pas s'empêcher d'être saisi par un sentiment désagréable, celui qu'elle ne va pas bien du tout. Elle se confie les yeux fermés pendant de longues minutes, comme si elle avait encore besoin de se sentir enfermée dans son cachot pour parler. Les mains se crispent entre les genoux. On voit que ses ongles rongés deviennent tout blancs. Elle pleure aussi un petit peu.

[00:30:53]

Bref, ce qu'on voit, c'est terrifiant. Natacha est dévastée. Il y a une tempête dans son crâne. Elle décrit ensuite la terreur de ces premiers moments dans son cachot. Elle utilise le mot cachot, le ventilateur qui tourne en permanence et qui lui porte sur les nerfs. Les crises de claustrophobie, le cauchemar d'une petite fille qu'on laisse mourir de faim. Et puis la vie qui reprend le dessus progressivement. Elle a insisté, par exemple, pour fêter Noël, Pâques et ses anniversaires.

[00:31:17]

Elle a même reçu des cadeaux de la part de son ravisseur. Il avait mauvaise conscience, ça, c'est sûr, dit elle. Et elle affirme n'avoir eu qu'une seule chose en tête pendant ces huit années s'enfuir pour avoir une vie normale. Aujourd'hui, elle veut passer son bac et peut être devenir comédienne.

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Il y a autre chose qui surprend tout le monde. Elle n'a ni haine ni agressivité envers son ravisseur. Mieux, elle va sur sa tombe plusieurs fois se recueillir. Et là, tout le monde dit syndrome de Stockholm classique. Elle s'est entiché de son ravisseur, mais elle, elle dit plus simplement qu'elle a créé des liens avec cet homme, qu'il a été son unique interlocuteur et son seul point de repère pendant toute sa jeunesse et que tout ça est un peu compliqué.

[00:32:03]

Et puis, on ne fait peut être pas tout, car en 2008, une rumeur dit que Natascha serait tombée enceinte pendant sa captivité.

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Si vous voulez pousser un peu plus loin, alors lisez bien entendu le livre de Natascha Kampusch, paru en 2010 chez Jean-Claude Lattès 3000 96 jours. Et sachez que sort un deuxième livre à l'occasion des dix ans de son évasion chez le même éditeur. Centaines d'histoires disponibles sur vos plateformes d'écoute et sur Europe1.fr.