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Christophe Hondelatte Quand un mari ou un compagnon est violent, on sait à quel point il est compliqué de porter plainte, mais contre les gendarmes, c'est encore plus compliqué. Voici l'histoire d'Alizée Bernard, qui sera là tout à l'heure, tiré de son livre co-écrit avec Sophie Boutboul, qui paraît chez Grasset. Silence, on cogne. Il lui a fallu surmonter beaucoup d'obstacles pour faire condamner son compagnon gendarme. Je l'écris avec l'aide de Simon Veil. La réalisation de Céline.

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Christophe Hondelatte. Nos regards se croisent pour la première fois durant l'hiver 2005 dans une boîte de nuit. J'ai 18 ans et lui, 15 de plus. Il me parle à l'oreille, il me fait rire. Par moments, nos mains se frôlent et à la fin de la soirée, je pourrais avoir ton numéro. Non, pas maintenant. La différence d'âge. Moi, je vis encore chez mes parents. Et lui, il est en instance de divorce et il a déjà un enfant.

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Franchement, je ne vois pas ce qu'on a en commun pendant un mois. Il revient souvent dans cette boîte de nuit, accepterait de passer une soirée avec moi. C'est charmant. Tous ces efforts qu'il fait. Et puis, il me plaît bien. Alors, je finis par céder. Et début 2006, nous dînons tous les deux. Je me souviens, il fait très froid. Je suis collé au chauffage du restaurant. La soirée est agréable, mais on est trop différents.

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Je suis lycéenne, je passe mon bac et lui, les gendarmes et papa, j'écoute du Martin Solveig. Et lui, il écoute du Renaud, camarade amoureux de. A quoi toucher à l'outil taillé dans le chêne ou l'olivier? On est beaucoup trop différents. Cela dit, on a aussi des points communs et petit à petit, je tombe amoureuse.

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La première fois que je vais chez lui à la caserne, j'ai l'impression d'entrer dans un petit village clôturé. Je gare ma voiture sur le parking visiteur. Premier poste de garde, puis second. Vous pouvez me donner votre nom. Prénom. Carte d'identité et numéro d'immatriculation, s'il vous plaît, merci.

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Et dans le hall, une plaque émaillée. Les chiens sont autorisés. Les femmes sont tolérées. Pas tant que le port. C'est comme ça dans tous les bâtiments.

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Quelque temps plus tard, il m'invite à passer une semaine à la caserne. Il vient me chercher chez moi et moi, je ne vois pas qu'il rencontre mes parents pour l'instant, donc je lui ai demandé de m'attendre dans la voiture.

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Je suis en train de terminer ma valise à l'étage. Je l'entends qui frappe à la porte. Alors bonjour madame, je suis un ami de votre fille. Vous inquiétez pas, je vais faire attention, elle. C'est trop tôt. Ça me gêne, mais je l'aime, je l'admire et pour lui, pour lui, je suis la plus belle, la plus intelligente, la femme de sa vie. La 8ème merveille du monde.

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Son premier déplacement pour une mission de renfort et de maintien de l'ordre durant un mois. Il m'envoie des messages tous les jours et si je sors avec des amis, il s'inquiète alors pour le rassurer, je ne mets plus le nez dehors jusqu'à son retour. En septembre 2006, moi, je démarre un BTS.

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Je dors dans son appartement de plus en plus souvent et je finis par m'installer chez lui.

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Et là, il m'explique les usages de la vie en caserne, les règles officieuses, une communauté de wafer. Il faut dire bonjour à tous ceux qu'on croise, mais pas trop parler aux femmes qui se regroupent en bas avec les enfants. Tu verras sont des commères. Elles font beaucoup d'histoires, elles sont capables de semer la zizanie dans notre couple. Avec les hommes aussi discutent pas trop. Sinon, tu vas vite avoir une réputation de allumeuse. A part ça, on ne ferme jamais la porte chez nous, on ne risque rien.

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Et puis, les cloisons sont maigrelette. On entend tout ce que font les voisins quand ils déjeunent, quand ils vont aux toilettes, quand ils mettent en marche leur sèche linge qu'il faut faire avec.

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Au printemps 2008, je le rejoint en Martinique, où il est en mission, et le jour de mon départ pour Paris, parce que soi disant, il veut profiter de moi le plus longtemps possible.

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Il m'emmène à l'aéroport au dernier moment, en voiture de gendarmes avec le gyrophare. Je trouve ça bizarre. Il fait ce qu'il veut. Il est censé faire respecter la loi.

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Il ne la respecte pas et en même temps, je me dis ce n'est pas trop grave. Au début de l'été, on est en voiture. L'air est doux, je baisse la vitre côté passager depuis quelques temps. Il y a quelque chose que je ne supporte pas. Il continue de voir une de ses ex. Mais tu comprends, je ne veux plus vivre avec une autre femme qui est si présente dans notre couple. Je peux plus. Si ça continue, je te quitte.

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Et là, bam, Copwatch sur ma joue gauche, je suis éblouie, sonné. Arrête toi, je descends de la voiture, j'ouvre la portière, je me laisse tomber dans le fossé. C'est la première fois qu'un homme frappe. Je suis complètement paumé. Je sors mon téléphone. Je vais appeler un taxi, mais je ne sais même pas où je suis. Ils se garent plus loin. Il revient vers moi. Je suis désolé, je m'excuse.

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Remonte dans la voiture. C'est dangereux de rester sur le bord de route toute seule. Je remonte, alléché. Bon, calme, toi, t'as rien. Si j'ai mal avec moi à l'hôpital, je l'amène chez le médecin de la caserne, le docteur en question ne peut rien faire pour moi, alors il rédige un courrier pour les urgences de l'hôpital et à l'hôpital. Je ne peux pas parler. C'est lui qui parle. Je suis gendarme à la caserne d'à côté.

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Je m'entraînais ma compagne à la boxe pour lui apprendre des techniques de combat. C'est mal protégé. Elle a même monté sa garde. Elle a pris un mauvais coup.

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Ils s'y reprennent à plusieurs fois pour remettre ma mâchoire en place. Je ne peux plus ouvrir la bouche. Un certificat médical atteste que j'aurai des problèmes d'élocution pendant 21 jours, 3 semaines et demain. Demain, j'ai l'oral d'anglais de mon BTS. On rentre à la maison, il file acheter des médicaments et faire des courses. Il revient avec des parfums.

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J'en veux pas à tes parfums. Je suis pas à vendre. Qu'il s'excuse. Il s'effondre. Il pleure. MacLaine, la femme de ma vie. Puta, je t'aime trop. Pas voulu faire mal. Je lui dis que je ne peux pas rester avec un homme violent. Je lui dis Tu recommencera. Tu me fais peur et lui promet que ça ne recommencera pas, qu'il va prendre sur lui. Est ce que c'est le fait qu'on habite en caserne?

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Qui me retient de partir? Je reste, je le crois. Je l'aime aussi. J'ai passé mon examen sans pouvoir ouvrir la bouche, je leur ai montré mon certificat médical, pourtant, lui, il l'avait jeté à la poubelle, je l'avais récupéré. Et pourtant, adieu mon diplôme. On m'a proposé un poste de chargé de clientèle dans une grande ville. Il ne veut pas. Il a peur que je rencontre trop de monde, que je me fasse draguer.

[00:08:59]

Je trouve quelque chose. Je ne vais pas plus près de chez nous, quoi qu'on pense à la famille qu'on veut construire. Il règne sur mon existence. Désormais, il ne veut plus que je fume non plus. Il veut que je fasse du sport et moi, je n'ai pas encore compris la puissance d'un uniforme.

[00:09:29]

Il a recommencé, bien sûr à coups de claques. Je me suis retrouvé bloqué entre le canapé et la table basse. Les voisins ont entendu sans doute. Il n'a pas l'air très inquiet, a jugé à la caserne.

[00:09:42]

Beaucoup d'hommes frappent leurs femmes. Et puis il m'a pris dans ses bras, il m'a dit Tu es la femme de ma vie. Il m'a dit Je t'aime trop, c'est pour ça que je te frappe. Il m'a expliqué qu'il avait du mal à gérer son travail, qu'il avait beaucoup de pression, qu'il allait quitter la gendarmerie mobile. Et moi, je me suis raccroché au fait qu'il m'aimait. Je suis enceinte, je suis heureuse que c'était grosse. Qu'est ce que fait Moche une femme enceinte?

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Il a recommencé. Je ne suis pas d'accord avec lui. Ben, il me frappe. Il a recommencé encore sur la tombe de ma grand mère. Je ne sais pas. Il a dû trouver que je me recueillez trop. Il m'a pris par les cheveux. Il m'a traîné sur le gravier sur plusieurs mètres.

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Notre fils aîné, je suis au lit la lettre, il regarde un film d'action à la télé, mais c'est un peu.

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BIM! T'as pas à me dire ce que j'ai à faire une autre fois, il me frappe, je lui dis. Je vais quitter, je vais aller à la gendarmerie dire ce qui se passe. Ouais. Moi, je pense qu'ils me croiront, moi, quoiqu'il arrive. Les saisons de gendarmerie, je te rappelle que je ne suis assermenté. Je suis piégé. A la fin de mon congé maternité, je ne reprend pas le travail, ça m'isole encore plus.

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En 2013, j'appelle pour la première fois le 39 19. Mais j'ai trop peur qu'ils l'apprennent, alors j'en reste là. Cette année là, je découvre aussi qu'il a des maîtresses. Je le lui dis, il me rouent de coups. Et là, je rappelle le 39 19. Je vais vous donner un conseil, recueillez des preuves, le plus de preuves possibles. A partir de là, je me mets à l'enregistrer avec mon téléphone quand il m'agresse. En février, devant toute ma famille, il me demande en mariage, devant les autres, je joue le jeu, mais quand on est en tête à tête, je lui dis non, non, je suis pas un chien à qui on balance un sucre pour lui faire plaisir.

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Le samedi 16 avril 2016, énième dispute heurté par un coup de pied, je tombe sur la poubelle de la cuisine. J'essaye de me relever. Je n'y arrive pas. Et là, il me soulève en me tenant par le cou, il me bloque la tête et le buste contre l'évier. Il a un couteau dans sa main droite, un couteau sans la lame froide sur le haut de mon crâne et son autre main qui m'étrangler. Je vais te buter.

[00:13:10]

À ce moment là, j'entends notre fils de 5 ans à l'étage. Qu'est ce qui va arriver si je me retrouve dans la cuisine? Il finit par desserrer ses mains. Malade. Était complètement malade. Il faut que tu t'en ailles, c'est plus possible de vivre comme ça. Je vais appeler la gendarmerie, ça ne peut plus continuer comme ça.

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Arrête! Encore en vie, ça va. Et puis ils veulent prouver qu'ils veulent prouver ma vieille que je t'ai menacée avec un couteau. T'as une marque découpaient tu Sérigne? Non. Alors Taqa les appeler. Et puis moi, je dirai que c'est toi qui m'a menacé avec un couteau. 1 Je dirais que t'es folle.

[00:14:04]

J'ai appelé la gendarmerie. Je leur ai dit que je ne voulais pas d'intervention, que je voulais juste qu'ils gardent une trace de mon appel et que je lancerai une procédure. Après le week end, deux heures après, j'entends des voitures arriver dans notre impasse. Je regarde par la fenêtre. C'est la gendarmerie. Huit gendarmes, ils frappent. C'est lui qui le roux. Coco, entre je ambrés. C'est la qui vous a appelé. Vous voulez boire quelque chose?

[00:14:35]

Deux gendarmes s'isole avec moi. Je leur raconte tout. Le couteau, l'étranglement, les insultes, je leur dis que j'ai un enregistrement de tout ça. Enregistrement dans lequel il reconnaît qu'il m'a étranglé et menacé avec un couteau. Et de toute façon, il voit bien les rougeurs sur mon cou. Une demi heure plus tard. Pour Mme. Il a trouvé un endroit pour dormir. Il n'est pas placé en garde à vue. Je n'y crois pas. Je suis sans voix.

[00:15:06]

On vous auditionnera demain. OK, je vous appellerai demain matin pour vous dire à quelle heure. S'il revient à vous, appelez cela. Quand ils sont partis, je me barricade dans la maison. J'ai peur qu'ils reviennent dans la nuit.

[00:15:29]

Je m'assois sur une chaise dans le salon, face à l'entrée. Je fixe le portail avec un couteau à portée de main et une gazeuse. Le lendemain, j'arrive à la gendarmerie, je tremble, je m'installe dans la salle d'attente et là, il arrive et il s'assoit en face de moi. C'est une belle salope, pas d'avoir fait des enregistrements. Comment tu sais ça, toi? Pourquoi ils ont donné cette information qui est à l'origine de cette fuite? Ils veulent le protéger.

[00:16:13]

Il est interrogé par le directeur d'Enquête et moi par une gendarme dans un bureau étroit et régulièrement, le directeur d'enquête vient prendre connaissance de mes déclarations. Vous voulez porter plainte? Mme? Je ne sais pas encore. Il faut que j'en parle avec ma famille. Je veux être sûr d'avoir leur soutien. Vous savez, madame, mais il risque de perdre son travail. Le mieux serait sans doute d'en rester là un an pour vous séparer. Vous faites les choses intelligemment pour votre fils.

[00:16:42]

C'est. Vous voulez porter plainte alors? Je peux prendre un peu de temps pour réfléchir. Je vous recontacte demain, c'est possible. Et là, il imprimes le procès verbal, je le relis. Il n'est pas mentionné qu'il a utilisé un couteau. J'insiste pour que ce soit écrit noir sur blanc. Il ajoute Je signe! Le gendarme s'isole avec moi. Il faut que vous vous concentrez sur le bien être de votre fils. Madame, non. Séparez vous proprement.

[00:17:17]

Vendez la maison. Je vais pas refaire votre vie.

[00:17:22]

Quand on arrive à la maison, il me tend un papier qu'il a dans la main. C'est une composition pénale qui consiste en une amende de 250 euros.

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Tu vois, je m'en sors le cul propre. Grâce à mon pote. Je suis allé voir mes parents. Je vais déposer plainte le lendemain, j'appelle le chef d'enquête pour le lui dire. Mais ça n'est pas possible, madame le procureur s'est déjà positionnée. Il sera convoqué dans quelques semaines. Je ne peux peut être porter plainte, je ne sais pas, moi, pour les autres faits de violence.

[00:18:03]

Je suis allé aux urgences plusieurs fois. Alors maintenant, ça ne fait pas non plus. Votre procès verbal englobe tout. Mais je n'ai pas parlé tout hier. Mme Clinton semble. Refuser une plainte, c'est illégal, mais ça, je ne le sais pas. J'apprendrai plus tard qu'il aurait dû me rappeler 48 heures après pour me redemander si je voulais porter plainte. Ils ne l'ont pas fait. Deux semaines plus tard, je suis en rendez vous avec mon avocate.

[00:18:43]

Il m'appelle et me laisse un message.

[00:18:47]

Je connais du mandat. Baranger. Alors là, je ne fait pas vraiment mal, je fais écouter l'enregistrement à mon avocate. Là, vous allez tout de suite porter plainte. Et surtout, vous faites bien une plainte par un renseignement judiciaire, pas une main courante. Et si on refuse, c'est impossible qu'on vous refuse. Et pourtant, à la gendarmerie, il refuse et il appelle devant moi la brigade où je suis allé le jour du couteau et j'entends tout.

[00:19:21]

Aidez moi, j'ai madame Bernard devant Broyles. Elle veut déposer plainte. Tu connais le monsieur, je le connais. Écoute renseignement judiciaire. Il m'a donc imposé un renseignement judiciaire, ce qu'on appelle une main courante, qui a ensuite totalement disparu de la base informatique de la gendarmerie. Toutes les brigades et tous les commissariats de police ont l'obligation de recevoir les plaintes. Mais moi, on m'a tout refusé jusqu'à ce que je rencontre une avocate, Nathalie Tomasini. Elle a appelé.

[00:20:10]

Vous ne pouvez pas lui refuser une audition. Non, non, non, c'est la loi. La loi du 15 juin 2000. Monsieur Domains. Qu'on soit clair. Elle viendra déposer une plainte. L'accueil des gendarmes a été correct. On a repris toute la chronologie des faits depuis le premier coup de poing. Ils m'ont donné un récépissé de ma plainte et une convocation pour une unité médico judiciaire. Tout ce qui aurait dû être fait il y a deux mois.

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En octobre 2016, on me confronte à lui dans un poste de police. On ne se regarde pas. Vous vous rendez compte, monsieur? Vous avez utilisé des techniques de combat sur votre compagne? Je n'ai rien fait du tout. Elle n'a aucune preuve de tout à fait ça d'elle même. Il nie tout. C'est pourquoi je n'ai pas fait de certificat médical. Il ne sait pas que j'ai des enregistrements et que je les ai fait retranscrire. Je les donne à la policière et je sors de cette confrontation épuisée.

[00:21:30]

Son procès a lieu le 27 janvier 2017. Il est jugé pour quatre mois de violences seulement, alors que dans ma plainte, j'ai raconté huit mois de coups. Le juge n'a retenu que les périodes au cours desquelles je suis allé aux urgences. Quand il arrive, il rigole et il a l'air détendu. Moi, je suis au bord de l'implosion. Comment fait il pour être aussi serein? Des gens passent, il les salue et il semble connaître du monde au tribunal.

[00:22:03]

Il est interrogé à la barre. Je suis conscient de mon problème. Mon problème, c'est mon agressivité. Le stress, on l'évacue de plusieurs façons. Des gens, pour moi, c'est figé, quoi? J'aurais tellement aimé qu'il dise c'est vrai, j'ai pété un câble. Elle a subi. Je suis désolé qu'il ait une once de remords.

[00:22:31]

Mon avocate l'interroge. Vous avez des transports, n'est ce pas, monsieur? Je pratique des sports de combat depuis que je suis adolescent. Vous devez parfaitement savoir maîtriser vos coûts avec toutes vos médailles. Mais non, vous êtes monsieur GLK. Une petite pichenette et claque. Fracture du nez. Vous avez des états de service excellents. Des médailles d'honneur et des certificats en karaté. Vous avez plein d'atouts pour défendre la veuve et l'orphelin. Et vous? Et bien, vous, vous avez employé cette force pour vous en servir contre une femme qui fait la moitié de votre taille et de votre poids et en utilisant votre office comme un outil d'intimidation.

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Il est condamné à six mois de prison avec sursis, plus dix huit mois de mise à l'épreuve et une obligation de soins. Il doit aussi me verser 2.000 euros au titre des souffrances endurées, mais ça ne sera pas écrit au bulletin numéro 2 de son casier judiciaire. Il pourra continuer à travailler. C'est un traitement de faveur parce que quelqu'un qui fait un excès de vitesse, on lui retire son permis, même s'il doit aller travailler tous les jours. Eh bien, lui, on l'a épargné.

[00:24:03]

Voilà pour votre histoire. Alizée, tirée directement du livre publié chez Grasset avec Sophie Boutboul. Silence, on cogne. Alors, vous écrivez dans le livre que vous ne comptez pas en rester là. Qu'il manque quatre mois de coups que vous avez subis, qui n'ont pas fait l'objet de procès à ce jour et notamment cette menace de vous tuer à coups de couteau, menace d'ailleurs pour laquelle vous détenez un enregistrement. Est ce que vous avez avancé là dessus?

[00:24:34]

En fait, je ne compte pas forcément lancer une démarche des poursuites juridiques à son encontre. C'est contre, surtout les gendarmes qui ont été défaillants dans ma prise en charge de mes différentes prises en charge.

[00:24:47]

Vous vous êtes lancés dans du lourd. Je me suis lancé dans du lourd. Vous attaquez à l'institution? Oui.

[00:24:52]

J'ai déposé cette plainte l'année dernière et devant le procureur de la République. Et cette année, au mois de septembre, il a classé sans suite cette plainte.

[00:25:04]

Donc, vous pouvez vous constituer partie civile. Je me constitue partie civile devant le doyen des juges d'instruction. C'est risqué. Si vous n'y arrivais pas, vous devrez payer. Ca vous l'a dit? Oui, il y a notamment, par exemple, cette main courante qui a disparu de l'ordinateur de la gendarmerie. Une bonne expertise informatique fait par un bon labo devrait la retrouver. Alors, en fait, elle était déguisée.

[00:25:28]

C'est que moi, j'ai véritablement eu sur le moment la sensation de déposer plainte parce que c'est bien écrit noir sur blanc. Je dépose plainte pour les faits mentionnés ci dessous. Sauf que, en réalité, la façon dont le document est constitué, ce petit encadré qu'il y a en bas du document, montre que c'est un renseignement judiciaire. Mais lui même a disparu. Ce renseignement judiciaire houet dans la base de données.

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Moi, j'ai une copie de ce document que j'ai fourni à l'Inspection générale de la Gendarmerie nationale. Et en effet, l'enquête administrative prouve qu'aujourd'hui, il n'y a plus de trace de ce document.

[00:26:01]

Ça va être dur de faire condamner la gendarmerie pour la négligence. Vous faites la même démarche que ceux qui attaquent le cardinal Barbarin dans sa ville de Lyon parce qu'il a couvert un curé pédophile. C'est à dire? C'est très dur d'atteindre le haut de la pyramide? Tout à fait. Alors quand vous le rencontrez au tout début, il est en instance de divorce. Est ce que vous savez aujourd'hui si il a déjà été violent avec sa compagne précédente, qui était en l'occurrence sa femme?

[00:26:28]

Non, je n'ai pas eu plus d'info que ça et c'est pas des choses sur lesquelles il se serait penché ou des confidences qu'il aurait pu me faire au début de notre rencontre.

[00:26:38]

Vous savez d'où lui vient cette violence qu'il ne semble pas contrôler puisqu'il l'a regrette juste après.

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Je ne sais pas si c'est quelqu'un de sang. A la base, c'est quelqu'un qui fait du sport, qu'il ne fume pas, qui ne boit pas. Donc, il n'y a même pas. Il ne se drogue pas non plus, donc il n'y a même pas de facteurs extérieurs. Il pourrait finalement engendrer ce type de violences, mais il a été battu par lui même.

[00:27:02]

Non, il n'aurait pas cherché à raconter ça devant le tribunal, en tout cas. Non, du tout. Alors, le premier coup de poing, c'est là que se trouve au fond, le nœud de votre histoire. Parce que vous fracasse la mâchoire, ce qui vous empêche d'obtenir votre autre BTS. C'est la première fois, dites vous, que un homme vous frappe. Vous avez 18 ans en même temps, donc assez peu d'expérience des hommes. Et c'est à ce moment là qu'il faut partir, qu'il aurait fallu partir.

[00:27:31]

Et comme explication, vous dites je l'aime? Oui, et ça doit bien. Vous travaillez ça? Mais un homme qui vous frappe sur le moment, on y est.

[00:27:41]

J'y crois vraiment. Quand il me dit je suis désolé qui se met à pleurer, je ne recommencerai plus. T'es la femme de ma vie. C'est quelque chose qui vous prend aux tripes. Au final, vous vous dites on est conscient de ce qu'il a fait.

[00:27:53]

Il le regrette. Il ne refera pas. Il le refera pas. C'est la deuxième fois qu'il faut partir. Oui, ça devrait être la devienne la deuxième fois et la deuxième fois, vous dites? Je me suis raccroché au fait qu'il m'aimait.

[00:28:05]

Vous étiez en dépendance d'amour? Possible. C'est un truc que vous attendiez et que quelqu'un vous aime totalement entièrement, et c'est le piège qui s'est refermé sur vous, en fait, puisque c'était lui. Je ne sais pas véritablement comment, comment ça se met en place. On a traversé des choses ensemble et pour moi, il évoque des faits, des choses qui se passent dans sa vie pour justifier ce qui se produit. Le stress du boulot, le stress du boulot, le stress de ce qui peut se passer.

[00:28:35]

Le maintien de l'ordre et les gardes mobiles, gendarmes ou gendarmes mobiles.

[00:28:40]

C'est quelqu'un qui qui, par exemple, intervient sur des manifestations. Oui. Et donc, il iVox?

[00:28:47]

Pas que ça aussi, ce qui peut se passer au niveau familial. Mais c'est une excuse. En fait, il n'y a pas d'excuse au fait de frapper sa compagne et sur le moment, je l'entends. Et comme ce n'est pas quelque chose de régulier, de coutumier, ce n'est pas tous les jours, c'est pareil. On parle des violences conjugales, mais on parle pas finalement du fait que à partir du moment où il n'y a même qu'un seul coup, on est victime de violences conjugales.

[00:29:11]

Mais ce que les gens peineront toujours à comprendre, je suis sûr que, typiquement, vos parents ont du en parler des heures avec vous. C'est pourquoi t'es pas partie la première fois. Pourquoi tu nous en a pas parlé la première fois? On vous en parlait une copine à un moment? Oui, Alexandra, dans mon souvenir. Tout à fait. Je ne l'ai pas évoquée dans le récit. Vous lui dites pas tout. Rien. On lui dit pas qu'il recommence.

[00:29:33]

Oui, pas aller là le lendemain.

[00:29:37]

Du coup, au niveau de la mâchoire. Et donc, je lui dis clairement que c'est un coup. C'est un fait de violence et que ce n'était pas du tout lié à la boxe ou quoi que ce soit, à ce qu'il avait pu lui lui exposer comme excuse. Et après? Pour les autres faits de violence?

[00:29:52]

Non, je n'en parle pas. J'ai pas enflammé mes parents. Jamais, parce qu'au moment où il est question de porter plainte et où vous tergiversait, ce qui est une erreur, vous auriez dû évidemment porter plainte le jour même parce que ce jour là, il pouvait pas vous la refuser. Le lendemain, il trouve un échappatoire, vous vous dites il faut que je m'assure que mes parents vont me soutenir.

[00:30:11]

Je ne sais pas. Je les connais pas vos parents, mais j'ai une sorte d'intuition qu'ils vont vous soutenir, évidemment. Alors soutenir, oui, mais c'est surtout que j'étais dans une situation précaire à ce moment là également. J'étais en licenciement économique, j'avais repris mes études et se lancer dans des procédures, ça coûte extrêmement cher. J'avais besoin de leur soutien et moral, physique et financier pour qu'on en vienne.

[00:30:36]

Donc, au fait qu'il est gendarme et que, sans doute, ça change pas mal la donne. Je n'ai pas compris, écrivez vous. La puissance d'un uniforme. C'est à dire que vous même, au fond, le fait qu'il est en uniforme vous impressionne. C'est surtout les menaces qui sont associées aux violences qui m'impressionne et sur le moment.

[00:30:59]

Sincèrement, je ne pensais pas que l'on pouvait finalement le laisser dans une impunité totale en étant auteur de violences conjugales.

[00:31:09]

Il y a un moment, il vous dit et on se demande si des voisins ont entendu la fois. Oui, il vous balance contre la table basse et il vous dit à la caserne, il y a beaucoup de gendarmes qui frappent leurs femmes. Est ce que c'est vrai? Oui, c'est ce qu'il m'a dit.

[00:31:25]

Après, je n'avais pas de contact avec les autres femmes à la caserne. J'ai suivi les règles, donc je ne sais pas. Au final, si véritablement il y en avait d'autres qui étaient victimes de violences conjugales, je n'en ai pas entendu. Mais je pense que ce soir là, on m'a entendu parler.

[00:31:41]

Vous êtes sûr qu'on vous a entendus? Persuadé? On entend tout, on entend tout.

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Forcément, le bruit et les claques et les cris ont fait que les voisins ont entendu le fait que des gendarmes qui sont censés défendre le droit, la veuve et l'orphelin vous battent leur femme. C'est lié à quoi? D'après vous, qu'est ce que c'est lié à un sentiment d'impunité? Ils peuvent le faire à peu près certain qu'il leur arrivera rien. Ou pas? Non, je ne pense pas. Je pense que véritablement, la difficulté dans le fait qu'ils soient gendarmes, c'est surtout qu'on cherche à déposer plainte.

[00:32:16]

Je ne pense pas que ce soit un acteur, un facteur pour être violent avec sa compagne. Il y a des gendarmes et des policiers qui sont très bien, mais tous ne sont pas comme ça quand même.

[00:32:26]

Ce n'est pas lié au fait qu'ils savent qu'il leur arrivera rien. Parce que ce qui est intéressant, c'est que en ce moment, face à la question des violences conjugales, un cercle de gens disent qu'il faudrait durcir les sanctions et il faudrait les incarcérer tout de suite, c'est à dire les s'écarter de manière à ce qu'ils ne puissent pas revenir et frapper à nouveau. Et en fait, quand on regarde l'histoire du crime, on n'a jamais mis autant de prison de gens en prison en France et le crime ne baisse pas pour autant.

[00:32:51]

C'est à dire qu'il n'est pas certain que la menace d'une sanction empêche les gens de frapper quand ils frappent. Il le dit en stress et c'est physiquement que ça s'exprime. Et donc, là, y'a pas la raison irréfléchis, pas il pas. Oulala, je risque de me faire avoir. Non du tout. Vous décrivez très bien évidemment la relation de corps de corporatisme qui a dans la gendarmerie. On peut sans doute d'ailleurs reprocher, je ne sais pas, de la manière dont les évêques ont protégé les curés dont les proviseurs de lycée ont protégé les profs dont les hommes politiques ont protégé les hommes politiques pendant des années.

[00:33:29]

C'est assez humain, ce sont des corps très solidaires.

[00:33:34]

C'est assez humain, mais en même temps, c'est gravissime. Je pense notamment au cas on évoque dans la partie enquête du livre de Karine 24ans, qui a été tuée par son ex-compagnon de trois balles dans la tête devant son fils. Il lui policier, policier, et il l'a tué avec son arme de service. Elle avait déposé plainte. Elle avait signalé les faits. Elle avait appelé le 17. Ils n'étaient plus ensemble. Et pourtant, quand la gendarmerie, à l'époque est intervenue, ils lui ont donné une tape sur l'épaule en lui disant qu'on ne te revoit plus ici.

[00:34:09]

Là, c'est même l'esprit de corps. C'est même entre la police et la gendarmerie, simplement parce que son représentant de la loi, parce qu'il y aurait une solution, c'est que quand on veut accuser un gendarme, on a la police.

[00:34:19]

Et quand on va jusqu'à accuser un policier, on a à la gendarmerie parce qu'on sait qu'il y a la guerre des polices entre eux.

[00:34:24]

Mais non, mais non. Parce qu'en plus, l'enquête ne va pas forcément être au profit de l'autre.

[00:34:33]

L'autre corps de métier FinCEN pour la police. Quand certains gendarmes ou la gendarmerie, quand c'est un policier, ça peut venir aussi sur le secteur et traitées par les gendarmes directement. Donc aujourd'hui, ce n'est pas forcément. Il n'y a pas de certitude dans le fait d'aller déposer plainte justement au commissariat ou en brigade, à l'inverse lui même devant le procureur de la République, puisque l'enquête après doit être menée et donc redonner aux enquêteurs.

[00:35:00]

Les gendarmes sont des militaires. Ça, ça change un peu la donne quand même, parce qu'il y a chez les militaires quelque chose qui relève de l'énorme solidarité, presque de la fraternité de principe. Quand même, vous l'avez ressenti? Ah oui, j'ai beaucoup entendu. On est des frères d'armes. Donc oui, je l'ai ressenti. Lui, il était très comme ça. Ah oui? Oui, très, très engagé auprès de ses collègues. C'est une famille.

[00:35:26]

Au final, c'est une grande famille. Ils bossent beaucoup, tous, beaucoup, et ils sont tout le temps ensemble. Tout à fait. Passent énormément d'heures ensemble, notamment les gendarmes mobiles quand il part en Martinique. Ils partent tous ensemble. Ils se racontent toute leur vie. Ah oui, c'est c'est la famille, les maîtresses. Ils sont tous au courant. Ah oui, merci. En tout cas, Alizée, d'avoir accepté de me confier vos histoires.

[00:35:53]

Je renvoie donc à ce livre qui a la vertu de partir, de qu'apprécie et d'élargir et de rendre compte d'un vrai phénomène. Personne n'avait jamais parlé. Qui sont donc les coups portés par des gendarmes et des policiers sur leurs femmes? Sujet jamais évoqué, ce livre s'appelle Silence. On cogne. Il paraît chez Grasset. Il est soigné, donc, Alizée Bernard et Sophie Boutboul.

[00:36:16]

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