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Jusqu'à Sandalettes, je vous raconte L'affaire Farewell. Au début des années 80, un agent des services secrets soviétiques, Vladimir Vetrov, alias Farewell, décide de livrer aux Français des milliers de documents secrets du KGB. Un épisode incroyable de la guerre froide. Et ce qui rend cette histoire unique, ce sont les ressorts de Farewell. Il ne travaille pas son pays pour des raisons politiques. Il le fait pour des raisons intimes. Une histoire que je tire de l'excellent documentaire de Michel Fine, qui sera là tout à l'heure pour France 5 Farewell, l'espion qui aimait la France, une production de Tony Comiti.

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La réalisation est signée Céline le bras.

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Christophe Hondelatte. Je vous emmène dans les années 80 au coeur de ce qu'on a appelé la guerre froide froide parce qu'elle ne sait pas jouer avec des fusils, des bombes, des chars. Elle s'est jouer avec des espions KGB côté soviétique, CIA à côté américain et l'un des enjeux de cette guerre était technologique. Les Américains avaient beaucoup d'avance et les Soviétiques beaucoup de retard. Et donc, l'une des premières missions des agents du KGB était de piller les entreprises américaines.

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On ne l'a pas su à l'époque, mais c'était une guerre très déséquilibrée. La CIA américaine déployait un peu moins de vingt mille espions dans le monde. Les Soviétiques du KGB étaient sept cent mille vingt cinq fois plus. Et à ce petit jeu, l'Oncle Sam a bien failli se faire plumer. Et si ça ne s'est pas fait? Peut être bien que la France y est pour quelque chose. Un matin de novembre 1981, à Paris, le commissaire Raymond arrdt de la DST, c'est à dire du contre espionnage français, est dans son bureau et comme tous les jours, il ouvre son courrier et il s'aperçoit que par deux canaux différents, un agent du KGB soviétique a tenté d'entrer en contact avec la DST.

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Il s'appelle Vladimir Rétro et il propose de livrer des informations sensibles à la France. C'était énorme pour un espion français. C'est mieux que Noël parce que c'en est trop. Le commissaire sait très bien qu'il est au KGB. Il travaille pour la direction comme technologie. C'est un service d'espionnage soviétique qui collecte tous les secrets technologiques volés dans le monde entier. C'est Noël. Je vous dis. Pour prouver sa bonne foi, Vetrov envoie un premier lot de documents dans une chemise sur laquelle il est écrit, s'écriait en secret.

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À peine arrivé, le commissaire n'arrete, fonce chez le patron. Entrez, monsieur le directeur, vous avez sur le bureau des documents qui proviennent directement du KGB. Vous plaisantez? Raymond? Je ne me le permettrai pas, monsieur le directeur. C'est considérable. La source? Si vous le permettez, je la garderai pour moi, monsieur le directeur. Vous avez raison moyennement courant, mieux c'est bien, nous n'avons qu'à lui donner un nom de code à votre informateur, un nom de codants en anglais pour brouiller les pistes.

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Appelons le Farewell, ça veut dire adieu en anglais, ça vous va? Vous exploiter ces documents, bien sûr. La chemise atterrit sur le bureau de l'adjoint du commissaire N'arrete Jacky demain, elle contient une pile de feuilles de papier écrites en cyrillique.

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Alors oui, debain l'appareil. Vous pouvez m'envoyer un interprète en langue russe svp. Oui, c'est urgent puisqu'il est possible qu'on y passe la nuit. Merci. L'officier interprète arrive et il installe une lampe de chevet. C'est pas de la haute technologie et il commence à épingler sur la base pour les feuilles de papier en russe qu'il a tirés de la chemise. Je fais ça pour y voir mieux. C'est plus lisible comme ça, vous comprenez? Alors bon, au premier coup d'oeil, je dirais une liste de courses.

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C'est la liste des cibles des espions du KGB, tous les secrets qui doivent payer. C'est classé par pays. Donc, il y a la France, l'Allemagne, le Royaume-Uni, le Canada. Et puis évidemment, sans surprise, surtout les Etats-Unis. Alors, je vais tout vous traduire, mais en gros, ça cible. l'Aviation de combat? Les ordinateurs militaires? Atomes, norias, ça, c'est des sous marins nucléaires. Et puis les machines qui servent à les fabriquer, etc.

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Toutes choses que les Soviets n'auront pas besoin d'inventer. S'ils arrivent à les voler, si ce type se vetrov se faros, elle est capable de faire passer la liste de ce qui a déjà été volé. C'est de Laurent pas. C'est du jamais vu. C'est tellement énorme qu'il faut en parler tout de suite au président de la République et donc à François Mitterrand qui vient d'être élu. Yves chialé? Le patron de la DST appelle le nouveau ministre de l'Intérieur, Gaston Deferre.

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Le ministre. Chalet de la DST à l'appareil. Dites moi, il faudrait que je vois le président rapidement. Ce soir, on verra après la garden party. Le président Mitterrand reçoit Chalais dans son bureau de l'Elysée et Chalais lui remet le dossier qu'il lui a préparé. Mitterrand le lit. Eh bien, vous continuez, bien entendu. Et vous n'en parlez à personne, vous me rendais compte directement. Il faut en parler aux Américains, monsieur le président?

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Oui, bien entendu. Je vais voir Iguane à Ottawa. Je vais m'en parlerait personnellement. Ronald Reagan, lui aussi, vient d'arriver au pouvoir aux États-Unis et je vous le dis en matière de diplomatie, c'est une qui. Il n'y connaît rien. Il s'en remet à ses conseillers. En revanche, il est antisoviétique. Pourquoi? Il n'en sait rien. C'est viscéral. Et ce socialiste là, Mitterrand, allié avec les communistes, avec lequel il a rendez vous à Ottawa, ce n'est pas sa tasse non plus.

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Mitterrand pose le dossier Farewell sur la table. Monsieur le président. J'ai quelque chose d'important à vous dire. Nous avons un atout à Moscou. Il nous envoie régulièrement des informations de première main. Certaines de ces informations. Monsieur le président, concerne les Etats-Unis d'Amérique. Quelqu'un de haut placé au KGB nous aide, monsieur le président. D'après son conseiller, Ronald Reagan n'a pas vraiment saisi toutes les implications de cette histoire. Il avait du tram dans Reagan, mais ça lui a plu que ce Mitterrand soit aussi amical.

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Il s'était fait une fausse idée de lui.

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Et maintenant, la partie, à mon avis, la plus intéressante de cette histoire. Les motivations de ce Vladimír rétro. Pourquoi s'apprête t il à trahir son pays? C'est un officier du KGB. Pourquoi est ce qu'il fait ça? Vous allez voir. C'est une belle leçon sur le fonctionnement de l'être humain. Vladimir Ippolito, 23 ans, a une formation d'ingénieur, il est recruté comme espion par le KGB au début des années 60. A sa sortie de l'école d'officiers de renseignement et pour son premier poste à l'étranger, on l'envoie en France, à Paris, sous la couverture d'un employé du commerce extérieur.

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Donc, il débarque à Paris avec femme et enfants. Et d'après vous, est ce qu'il a aimé? Bien sûr qu'il a aimé qu'il a adoré l'appartement dans le 16ème arrondissement. Les sorties, les restaurants. Paris, quoi. Et donc, quand il est nommé au Canada en 1970, eh bien, il est malheureux. Et au Canada, ça se passe mal. Il se met à picoler. Il a des accidents de voiture et surtout, il se fait approcher par les services secrets canadiens.

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Il ne leur a pas dit oui, mais c'était déjà trop. Retour à Moscou. Au placard. Sa carrière est fichue. Il se retrouve dans une sous division d'analyse. La fameuse direction t il demande une promotion refusée. Il a le blues. Il plonge dans la dépression. Ça n'est plus le même homme. C'est ça, le petit moteur de Farewell. Se venger et offrir tout ça à un pays qu'il aime. Par dessus tout, la France, c'est pas la politique, le moteur de cette histoire.

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C'est un homme, juste un homme à poil. Et cet homme maintenant Farewell, eh bien, il faut s'organiser pour récupérer les documents qu'il peut transmettre sans se faire repérer par le KGB. Et là, il faut que je vous explique la DST. Normalement, c'est un service de contre espionnage qui travaille en France et qui n'a pas d'agent à l'étranger comme le SDEC, l'ancêtre de l'ADG. Mais c'est une opération secrète en ligne directe avec le président de la République et donc le commissaire n'arrete doit se débrouiller pour trouver quelqu'un.

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Il connaît quelqu'un sur place à Moscou, l'attaché militaire adjoint Patrick Kron. Il a un passeport diplomatique. Si ça tourne vinaigre, on pourra les exfiltrer. Patrick Clairance est l'homme clé de l'histoire. Il n'a parlé qu'une fois dans le documentaire Farewell, l'espion qui aimait la France. C'est le chef d'état major des armées qui lui a confié cette mission. On va vous demander une mission. Il faut prendre contact avec un gars du Cogéré.

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Il n'avait pas de quoi vous faire prendre? Non. Pourquoi risquer la prison? Le coup à la tête? Non, non, non, non.

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Parce que mon passeport diplomatique, tu te lautobus, lautobus, tu me faisais. Vous auriez pu vous faire écraser dans votre poche.

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Le commissaire n'arrete de la DST, lui explique la suite. Bon, ce qu'on vous demande, Ferran. C'est d'être le plus naturel possible. Comme si vous alliez voir un copain et vous devez prendre conscience qu'en livrant ses documents, lui prend un risque considérable. Donc, il faut l'aimer quoi? Vous devenez ami avec lui? OK. Patrick Ferrant dit que ça n'a pas été difficile, ça l'autre est plutôt sympa. Il est chaleureux, il est aimable, il est rigolard.

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Les premiers rendez vous avec les profs ont lieu après son travail dans un parc près du Musée Borodine. Sa femme travaille là. Il vient la chercher tous les jours et donc, lui et Ferran se voient sur un banc juste avant qu'elle ne sorte comme de vieux copains. Et Farewell lui confie à chaque fois un dossier constitué de documents originaux. En vérité, que Ferrand doit ramener à l'ambassade pour les photocopier et lui rendre. Le lendemain et plus tard, il se voit dans la voiture de Vetrov, une Lada, les trophées, tout simplement heureux de parler français.

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Il voudrait bien parler de Balzac, tiens, mais Patrick Ferrand n'est pas pointu sur le sujet. Dommage. Est ce qu'on le paie pour ça? Non. Si quelques roubles par ci par là et quelques bouteilles de gin et de scotch. Mais rien de plus qu'il ne fait pas ça pour l'argent ni pour la politique, mais pour se venger de l'humiliation qu'il a subie. Et il fait ça pour la France parce qu'il l'aime, c'est tout.

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Le rythme des livraisons s'accélère. Pharo, elle, fait passer de plus en plus de dossiers trois mille pages en moins d'un an. Patrick Ferrand n'arrive plus à suivre. Et comme les rendez vous se multiplient, ça devient très dangereux et ce sont les Américains qui trouvent la solution. Un appareil photo tout petit, quelques centimètres carrés. Genre inox. Un appareil qui tient dans la main et qui permet de photographier les documents sans sortir les originaux. Et Ferrand, pour récupérer les pellicules, les microfilms, décide de mettre à contribution sa propre femme.

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Elle va au marché. Au rayon des légumes, métro Fella, qui palpent des courgettes et lui fait passer un petit paquet et une salade par dessus. Et voilà. Alors, qu'est ce qu'il y a d'intéressant dans ces documents soviétiques? Bien d'abord, les noms des 400 agents du KGB qui opèrent aux Etats-Unis sous couverture, c'est incroyable. Et le nom de leurs sources, de leurs agents doubles. C'est très précieux, tout ça. Et puis, dans ces documents, il y a aussi des choses incroyables les plans d'avions, les plans de sous marins nucléaires, les plans de centrales atomiques volés aux Occidentaux.

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Les Américains et les Français, au passage, se rendent compte que le KGB est très efficace, beaucoup plus que ce qu'il n'imaginaient.

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Alors comment réagir à ça? Évidemment, pas question pour les Américains d'expulser des espions de Moscou. Il ne faut pas griller Farewell et là, à la Maison-Blanche, un scientifique qui s'appelle Gus Vaïsse a une idée de génie. Moi, je me dis et si, au lieu de les empêcher de récupérer nos documents, on les aider? Un. Laissez moi terminer! On leur livre des plans, mais on les fausse, on change les codes des machines, par exemple.

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Un centimètre, un millimètre. Un millier de millimètres, peut importe un kilo. Du coup, ça ne marchera pas. Le président Reagan est d'accord et une cellule secrète au Pentagone, composée d'une demi douzaine d'ingénieurs qui se mettent à fabriquer de faux plans avec de fausses cotes des missiles, par exemple, ou des machines outils qui servent à les fabriquer. S'ils appliquent les plans, ça ne marchera pas à l'autre bout. Bien sûr, Vladimir Vetrov, alias Sarouel, n'est pas au courant, mais sa carrière d'agent double va tourner court, comme elle a commencé, en vérité pour des raisons personnelles intimes.

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Le 26 janvier 1982, Patrick Ferrand a rendez vous avec Vetrov sur la place Rouge, au centre de Moscou. Quand il arrive près de lui, il voit tout de suite que l'autre est bourré comme un coin. L'alcool, c'est foutu. Patrick, tu es foutu, foutu. Il ne lui dit pas pourquoi Ferrand sort une bouteille de gin de sa poche. Allez, Volodia, moi, aller boire, boit, ça va te faire oublier le rendez vous suivant.

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Mais il n'est pas là. Et il n'est pas là non plus au rendez vous de rattrapage et sa femme fait savoir que c'est fini, il ne veut plus ou il ne peut plus transmettre de documents.

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Alors, qu'est ce qui s'est passé? Qui s'est fait repérer? Il a des états d'âme? Pas du tout. Les petits moteurs de profs sont décidément intimes. Il a une maîtresse, Lioudmila, qui travaille avec lui à la direction. D'après un journaliste russe qui a mené l'enquête sabar d'entre eux, Vetrov, ne veut pas quitter sa femme. Est ce qu'elle a deviné qu'il a trahi le KGB? C'est possible. Toujours est il qu'un soir, après le travail, Vetrov propose à Ludmila de la ramener chez elle sur le trajet.

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Il achète du shampoing Skien du champagne et lui offre à boire. Et là, d'un coup, pennines, il l'assomme avec la bouteille et il attrape dans la boîte à gants une pique en métal et il se met à la frapper. BAM, bam, bam! Et là, un homme à la vitre Vetrov ouvre la portière. Il a sa pique à la main et il poignarde l'homme. Et il tue.

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Lioudmila a réussi à s'enfuir. Elle ne dit pas aux policiers qu'elle a des soupçons sur lui, mais Vetrov est naturellement arrêté et jeté en prison. Et comme il appartient au KGB, il est interrogé par un de ses collègues qui, comme ça, au pif, sans que quelque chose ne tourne pas rond, qui a un problème pour le meurtre. Vetrov est condamné à 20 ans de prison. Il est envoyé dans un goulag de Sibérie. Mais le KGB ne le lâche pas.

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Il le surveille 24 24.

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En avril 1983, Paris décide d'expulser de France quarante sept Soviétiques, dont certains ont été balancés par Vetrov. Quant à 8000 kilomètres de là, au fond de son goulag, Vetrov l'apprends. Il dit à voix haute en Egidio Ils m'ont grillé. Un agent du goulag a tout entendu et il transmet immédiatement l'information à son supérieur. Et voilà sans doute comment Vetrov s'est fait pincer, à moins qu'il se soit fait balancer par une taupe américaine. On ne saura jamais.

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Le 1er janvier 1984, pour la nouvelle année, Les Profs envoie une dernière carte de vœux à sa femme. Cette l'Anas et à son fils Mladić. Je vous souhaite une bonne santé. Du succès du travail et que l'année 19 184 vous apporte à tous un tout petit peu de bonheur.

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L'année d'après, Ça va être l'Eanna est convoqué au parquet militaire à Moscou. On l'a fait asseoir dans une petite pièce étroite et on lui annonce, en vertu du jugement, Mme. Votre mari a été fusillé. Et on lui remet un acte de décès daté du 23 janvier 1985 et à la rubrique Causes de la mort, un trait souhaite l'Anas rentre chez elle et elle s'effondrant Marc. Il ne fait aucun doute que cet épisode de la Guerre froide a joué un rôle déterminant dans la suite des évènements, car il a définitivement fragilisé le KGB qui ne s'en remettra jamais.

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Six ans plus tard, en août 1991, la foule via déboulonnés devant la Loubianka, le siège du KGB, la statue de son fondateur Jezzine, skient. Et six mois après, l'Union soviétique n'est plus. Et sans doute que Farewell n'y est pas pour rien.

[00:22:23]

Dans cette histoire et dans ce monde où on veut croire que les choses changent par la politique, par l'idéologie, par les idées, c'est un homme seul, pour des raisons intimes, qui a fait bouger les lignes. Juste parce qu'on l'avait blessé, juste parce qu'on l'avait humilié, juste parce qu'il aimait la France.

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Alors, est il pensable de décorer un jour Vladimir Ippolito Tu Vetrov de la Légion d'honneur à titre posthume dans sa datcha près de Moscou? Sa femme Svetlana en rêve encore. Mais Poutine, sans doute, n'apprécieraient pas. Alors? Voilà donc pour cette histoire que j'ai directement tirée Michel, film de votre documentaire chez Tony Comiti Productions pour France 5 Farewell, l'espion qui aimait la France, la Légion d'honneur à titre posthume pour Farewell. Ça serait une idée formidable.

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Ça serait une idée formidable. Et Richard Allen, qui était le conseiller sécurité de Reagan, trouve que la France a pas suffisamment remercié Farewell et lui trouve que ça serait une bonne chose.

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l'Anas, sa femme, que vous avez vu qu'à 82 ans aujourd'hui, elle en rêve?

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Oui, vous êtes Lana. Elle a un petit goût d'amertume derrière la bouche. Parce qu'elle trouve que l'on n'a pas remercié son mari. Elle a l'impression que la France l'a laissé tomber.

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Elle touche pas une petite pension, par exemple. Elle touche pas une petite pension de la France. Ceci dit, souhaiter un avis bien, elle a toujours bien vécu. C'est un couple qui a toujours eu beaucoup d'argent. On ne sait pas trop comment, d'ailleurs, parce qu'il était assez riche en France. Il vivait bien.

[00:24:10]

Elle n'est pas Paris à Moscou. Non, elle n'est pas pariah. Et d'ailleurs, avec un peu de perfidie, Raymond arrdt me dit quand il a su que j'allais voir cette l'Anas Raymond arrdt, le commissaire à l'époque de la DST, me dit demander à Svetlana combien de temps elle est restée dans l'appartement du KGB. Pourquoi elle est restée aussi longtemps dans l'appartement du KGB.

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Ce que voulait dire Raymond arrdt, c'est que le rôle qu'a vraiment joué, c'est mettre la main dans cette histoire n'est pas claire, est un peu ambiguë. On n'exclut pas totalement l'idée qu'elle ait pu le donner.

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C'est ça. Alors il y a une multiplicité de facteurs pour lesquels Farewell est tombé. Il est tombé parce que la France a expulsé 47 espions soviétiques.

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D'une part, il est aussi tombé parce que quand il est arrivé en prison, comme il faisait partie du KGB, on a mis dans sa cellule un autre espion du KGB qui lui même avait été arrêté pour une histoire qui avait besoin d'un trafiquant.

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Oui, il a fait parler Vetrov parce que bon, ces gens là, ils sont comme ça. Et il a trouvé que c'était un drôle de type. Ce Vetrov et Vetrov lui parlait beaucoup des cadeaux qu'il recevait en France. Mais s'il recevait des cadeaux en France. Pourquoi il avait autant d'argent? Il jouait pas double jeu, donc. Il en a parlé aux juges du KGB qui était chargé d'instruire le dossier Farewell. Et donc, ils ont monté un espèce de piège.

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Ils ont permis à Svetlana d'aller voir Farewell en se disant peut être qu'il va lui faire passer des messages. Et effectivement, Farewell est tombé dans le piège et il a fait passer à Svetlana une lettre à destination de son contact à la DST en France, dans laquelle il disait Il faut donner de l'argent à cette l'Anas. Je suis en prison, il faut nous aider, etc.

[00:25:54]

Ce que dit la DST en français, c'est que cette l'Anas a donné la lettre au KGB. J'ai posé la question à cette Anna, cette l'Anas ne m'a jamais répondu, mais elle m'a montré une lettre et elle a gardé.

[00:26:07]

Donc, si elle l'a gardé, c'est qu'elle ne l'a pas fait passer. Ceci dit, son rôle reste quand même un peu ambigu.

[00:26:14]

En tout cas, on voit dans votre documentaire qu'elle rêve de la France. Toujours là, elle adore la France. Elle parle français. Ils ont adoré la France. Ils vivaient dans les quartiers chics et vivaient dans le 16ème. Ils avaient un très bel appartement. Ils avaient plein d'amis français, ils allaient dans les meilleurs restaurants, elle allait dans les meilleures boutiques et elle a gardé. Et elle m'a montré. Elle a gardé les très beaux vêtements des grands couturiers qu'elle s'était fait payer à l'époque et qu'elle a toujours aujourd'hui chez elle.

[00:26:42]

Votre scoop est d'avoir interviewé pour la première fois Patrick Ferrants, qui n'avait jamais parlé et qui s'est attaché militaire à Moscou, qui se retrouve à titre amateur. Finalement, en première ligne dans cette affaire d'espionnage, ça a été facile de le faire parler.

[00:26:57]

Non, il ne voulait pas. Il ne voulait pas. En fait, c'est Raymond Aron qui m'a mis sur la piste de Patrick Ferrand. Quand je suis allé le voir, il m'a parlé de faire Ferrol, dont on avait beaucoup parlé, sur lequel on livre la. De toute façon, il a fait un livre.

[00:27:10]

Il y a eu un excellent reportage d'Hervé Bronzini et Dominique Tierce sur Farewell. Farewell avait été.

[00:27:16]

Mais Raymond Artie avait quelque chose qu'il voulait raconter. C'est les implications géopolitiques de l'affaire Farewell.

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Et comment, selon lui et selon les Américains, les informations données par Farewell ont accéléré le cours de l'histoire et accéléré la chute de l'Union soviétique. C'est ça qu'il voulait raconter et uniquement ça. Donc, il m'a dit Vous devriez regarder le livre édité au CNRS par Patrick Ferrants sur l'affaire Farewell. Sans rien me dire de plus, sans me donner de numéro, etc. J'ai appelé les éditions du CNRS. J'ai eu le numéro de Patrick Ferrand et Patrick Ferrand m'a un peu pilotez dans cette enquête en me disant Vous savez, vous devriez regarder.

[00:27:52]

Vous devriez lire, vous devriez.

[00:27:54]

En fait, il faisait l'enquête à travers moi et au bout d'un moment, je suis monsieur Ferrand. Je veux vous interviewer, vous êtes formidables.

[00:28:00]

Il dit non, jamais. Je n'ai jamais parlé, je ne parlerai jamais et j'ai fini par lui dire Écoutez, je ne peux pas raconter cette histoire sans vous, c'est impossible. Il a fini par me dire d'accord, mais rien.

[00:28:11]

En mars, Patrick Ferrand, ce qui n'était pas le cas de ce qu'il m'a dit avant, a été embauché ensuite par l'ADG.

[00:28:20]

Ceux fait d'autres missions. Il a fait d'autres missions. Il ne veut pas qu'on le reconnaisse parce qu'il a des missions où on n'a jamais su qu'il était embauché par la France.

[00:28:28]

Il est furieusement sympathique. Enfin, il a l'air bonasse comme ça quand il a un humour dévastateur. Il raconte les choses. C'est le petit bout de la lorgnette. Moi, je m'en rappelle quand il nous raconte comment sa femme Madeleine Madeleine.

[00:28:42]

J'ai rencontré Madeleine.

[00:28:43]

Quand j'ai fait l'interview de Patrick Bruel qui va au marché, il va au marché récupérer les micros sous la salade, sous les salades, et je lui dis mais c'est pour ça que ça a marché. Parce que parce que parce que c'était au vu et au su de tout le monde sous la salade, il me dit Or, si ç'avait été des courgettes, ça aurait été pareil. Il a énormément d'humour. Patrick Ferrants, il vous raconte ça avec une espèce de bonhomie.

[00:29:02]

Il a été au cœur de l'histoire, il a pris des risques inconsidérés et ça me gave aussi. Et sa femme n'a pas voulu parler.

[00:29:08]

Alors c'est lui qui n'a pas voulu qu'elle parle. Moi, je lui ai dit Je veux vous interviewer. Absolument, Madeleine.

[00:29:13]

Elle me tient à corps et lui dit non, comme un militaire, comme un militaire.

[00:29:18]

Et donc, elle est partie, Madeleine. Et j'ai eu un seul regret c'est le prochain coup. Il est convaincu, lui, que c'est son amateurisme, son manque de savoir au fond, dans le contact avec les agents doubles, qui a été la clé de sa réussite. Oui, c'est terrible, ça, parce que c'est la constatation qu'il ne faut pas se former.

[00:29:36]

Alors, disons que tous les agents secrets en poste à Moscou, que ce soit la CIA, les agents des services en anglais, étaient suivis par le KGB, c'est à dire quand ils prenaient une voiture ou une voiture du KGB qui les suivaient.

[00:29:51]

Ils étaient répertoriés, ils étaient archi suivis. Et il y avait un accord entre l'Union soviétique et la France.

[00:29:57]

Et aux termes de cet accord, la France ne mettait pas d'espions français à Moscou.

[00:30:04]

Et le porte parole du KGB, le porte parole du KGB que j'ai vu et qui était absolument furieux de cette histoire, il me dit Mais Farewell, c'est pas Donas, c'était vrai.

[00:30:15]

Alors autant écrire un salaud fini.

[00:30:18]

Il dit ce responsable, ce haut gradé du KGB, il dit Mais la France nous a menti.

[00:30:25]

Il avait dit qu'il ne mettrait pas d'espions russes, alors que eux avaient passé des dizaines et des dizaines d'années à piller tous les secrets de l'Ouest. La France nous a menti. Il avait un espion et ils ne l'ont pas dit.

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Est ce que Patrick Ferrand est touché par la fin de Vetrov? Énormément. Patrick Ferrants Il a gardé beaucoup d'amitié à l'égard de Vetrov. Il m'a même dit un truc extraordinaire. Il m'a dit Vous savez si aujourd'hui, un jour, il frapper à la porte et si je voyais débouler, je ne serais pas étonné.

[00:30:57]

Il m'a dit que peut être, il est même pas mort a priori pour tout le monde.

[00:31:01]

Mais il est touché où il est révolté. Parce que non, il n'est pas révolté.

[00:31:05]

Parce que ce soldat, c'est un militaire. Donc, il a obéi. Et puis, la vérité, c'est que Farewell, il était un peu bredin. C'est un type qui était un homme exalté.

[00:31:16]

Il buvait trop. Alcoolique qui était soviétique.

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Doumbouya s'arrime. Non, mais c'est un type qui était capable de comportement, de faire des idées. Il pouvait faire beaucoup de conneries, comme c'est peut être ça qui a fait qu'il a pris des risques aussi aussi inconsidérés.

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Mais il était. Il était vraiment attaché à lui. Ils ont passé énormément d'heures ensemble. À quoi ils servaient? Patrick Péran.

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Il servait à récupérer les secrets, mais il servait surtout à gérer Farewell et Farewell. Il passait des heures et des heures dans la voiture ensemble, une petite Lada en plein Moscou, au nez du KGB. Sempronius LGB le sache et en fait, la seule chose que voulait faire Wei, c'était de discuter en français avec Ferran parce qu'il adorait le français, parler d'anecdotes ou raconter ses histoires de fesses entre sa maîtresse et sa femme. En fait, c'était son confesseur.

[00:32:08]

C'était son psy.

[00:32:09]

C'était voilà. C'était le plan.

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À la fin, c'était d'exfiltrer Vetrov vers la France, alors qu'il n'y avait pas de plan pour infiltrer Vetrov vers la France parce que Vetrov a refusé d'être exfiltré. Les services français lui ont proposé de lui donner un passeport français et de le faire sortir. Et il a dit Non, je ne quitterai pas.

[00:32:31]

Il est un peu suicidaire dans la démarche. C'était son dernier geste.

[00:32:34]

C'était son dernier geste parce qu'il n'avait pas de vie après. Parce que ce qu'il aurait aimé Vetrov, c'était de repartir en poste à l'étranger, en particulier en France. Il s'est rendu compte qu'il n'avait pas d'avenir. Non, c'était terminé. Il n'a pas voulu quitter l'Union soviétique parce qu'il n'a pas voulu quitter cette l'Anas ni son fils.

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Je veux qu'on parle des motivations intimes de devait trouv parce que moi, je trouve que c'est le moment le plus fort. C'est très instructif au fond sur ce qui fait l'histoire de l'humanité. On croit que c'est la politique, on croit que c'est le combat des idées et on fait là. On a un homme qui a un ressort très intime. Il a été humilié. Il veut juste se venger. Il. Une espèce de relation romantique avec la France, qui a été le premier poste de sa carrière d'espion.

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C'est fascinant.

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Moi, je trouve qu'il a beaucoup d'amertume parce que il a été con quand il a été en poste au Canada. Ça s'est mal passé. Les Canadiens ont essayé de le recruter. Il y a eu une histoire d'argent, une sombre histoire d'argent. Les services secrets canadiens ont essayé de recruter comme les services secrets canadiens étaient infiltrés par le KGB.

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Comme la plupart des services secrets du monde, ça s'est fait. Il y a le Sdec, etc. Ça s'est su et le KGB a rapatrié Vetrov et donc ils l'ont mis au placard et Vetrov s'est senti vraiment humilié. Et en plus, il commençait à détester ces gens du KGB, ces caciques qui pratiquaient le népotisme. Quand on voulait avoir de l'avancement au KGB, il valait mieux être le neveu de tel ou tel personnage bien placé plutôt que d'être un bon agent secret.

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Il supportait plus ce système et il avait aussi peur, il faut le dire, qu'une guerre éclate entre l'Est et l'Ouest.

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Il s'est dit qu'en balançant le KGB en cassant le KGB, il voulait casser le dos du KGB. C'était ça qu'il voulait faire.

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Il s'est dit qu'il arrêterait la guerre, mais il y a un autre passage que j'aime beaucoup dans votre documentaire et que j'ai tenté de faire revivre dans le récit. C'est le personnage de Richard Allen qui est le conseiller sécurité de Ronald Reagan. Il est terrible avec Reagan. Moi, j'ai dit Reagan est une quiche en diplomatie. Il dit pas Keach, lui, non. Il laisse entendre clairement qu'il ne comprend rien à rien.

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Alors il le laisse entendre, tout en ayant une admiration profonde pour Ronald Reagan, qui lui a dit En gros, il a fait ce qu'il lui a dit.

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Il raconte un épisode qui est juste énorme. C'est la première conférence de presse de Ronald Reagan, où Ronald Reagan arrive devant tous les journaux.

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Il vient d'être élu. Il vient d'être élu. C'est sa première conférence de presse et on lui dit alors qu'est ce que vous pensez des Soviétiques? Et il dit Bah moi, je pense qu'ils mentent, qu'il triche et qu'il vole.

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Et l'assemblée fait bref. Richard Alexandre, ex de ce mélange, un visage qui est le seul secret.

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Le secrétaire d'État, c'est la consternation. Reagan continue sa conférence de presse. Termines s'en va. Et après la conférence de presse dans le couloir, il se retourne vers Richard Allen.

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L'éditer, Richard.

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Est ce que c'est vrai que les Soviétiques mentent? Ils trichent et ils veulent absolument, monsieur le président? Absolument.

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C'est bien ce que je pensais. C'était énorme. J'ai vu tout à l'heure hier. Il y a du Traum dans Reagan, déjà, mais en vérité, il n'a pas de savoir diplomatique. Il improvise.

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Oui, alors, Richard Allen? Il improvise? Ouais, mais il a aussi une intelligence des situations. Et il a eu l'intelligence de profiter de cette situation et de dire eh bien, on va créer une petite équipe puisqu'il nous inouie, il vole nos secrets.

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Eh bien, vous savez quoi? On va les leur donner, mais on va les modifier et on va leur faire perdre la tête. Et finalement, ils ont assez bien réussi côté français.

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Vous avez donc les deux personnages essentiels de cette histoire, nouveautés devant Arte d'Aubin, qui étaient les deux seuls au fond dans la confidence avec le président de la République.

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Et ils ont envie de parler, d'y revenir. Ou ça reste malgré tout des militaires, des gens qui ont l'habitude de se taire?

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Non, parce que ils ne sont pas militaires. Ils sont policiers, n'est pas l'ADG. Ceux, c'est la DST.

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Ils sont très fiers de cette histoire parce que c'est quand même l'histoire d'espionnage la plus belle, la plus belle histoire d'espionnage de la France.

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Même si le KGB, les officiers du KGB aujourd'hui vous disent enfin, vous nous parlez de faire welfare welfare oil. Mais la France, vous n'avez que faire wel nous wel. On en a eu des centaines. C'est vrai, la France Nonaka, mais la France est très fière de ça après. Encore une fois, ce qu'il voulait, c'était d'expliquer les conséquences géopolitiques, de faire wel. Et en quoi l'action des services secrets peut changer le cours de l'histoire.

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Petit détail, genre le fait qu'ils accrochent des feuilles de papier autour de l'abat jour d'une lampe de chevet. Il a fallu les leur arracher. C'est pas ça qui les intéresse. C'est pas la petite histoire.

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Non, ça, ils adorent. Ils adorent raconter la grande histoire par la petite histoire, raconte aussi Le Soir, parce qu'ils ils faisaient les traductions des documents Farewell le soir pour que personne ne le sache. Personne au sein de la DST ne le savait. Donc, il restait très tard dans la nuit et il se rappelle toujours cette histoire où, un soir, vers 22 heures ou je ne sais quelle heure, il croise un des directeurs de la DST qu'il regarde dans deux ans.

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Mais je n'ai rien vu.

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En tout cas, c'était une histoire passionnante. Merci de nous avoir prêté avec votre enquête pour la raconter. Aujourd'hui, je vous rappelle le titre de ce documentaire produit par Tony Comiti Farewell, l'espion qui aimait la France. Vous le trouverez sur Internet, car désormais, au grand dam des auteurs, plus rien ne se perd et tout se transforme.

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Des centaines d'histoires disponibles sur vos plateformes d'écoute et sur.