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[00:00:03]

Raconte Christophe Hondelatte. Le 2 février 1933, en fin d'après midi, deux hommes bien mis, des notables face au roi, pénètrent dans le commissariat du Mans, dans la Sarthe. Ils ont l'air tout retournés. Messieurs! Je suis confus de vous importuner. Je me suis lancelin. J'habite non loin d'ici, au 6, rue Druillet. Ça fait un moment qu'avec mon gendre ici présent que nous essayons de rentrer chez nous. Je ne comprends pas. Enfin, en principe, ma femme est là avec ma fille si elle était sortie.

[00:00:38]

Ce que j'ai du mal à croire avec ce froid, à cette heure ci, elle serait rentrée. Et quoi qu'il en soit, il devrait y avoir au moins deux domestiques. Mais nous frappons, nous nous frappons, personne ne répond et la porte est verrouillée de l'intérieur. Je suis, je dois vous le dire, un peu inquiet. Bien, mais vous dites que vous résidez rue Bruyère? Oui, au numéro 6, ça n'allait pas assez loin.

[00:01:02]

La journée a été calme. Voulez vous que nous nous rendions sur place avec vous maintenant? Si vous pouviez et je vous en serais très reconnaissant. Un brigadier et deux gardiens de la paix se mettent en route à pied, suivis de monsieur Lancelin et de son gendre, monsieur Renard. Arrivés sur place, ils commencent par frapper la balance.

[00:01:23]

Là, madame, lance la police. Ouvrez! Je vous prie.

[00:01:30]

Bien à vous deux. Escalader le mur! Les deux gardiens de la paix escaladent le mur de la cour et ils vont à l'arrière de la maison. Jeff. La porte fenêtre du vestibule est fermée en français, enfoncée un petit coup d'épaule et la porte cède.

[00:01:52]

Les deux policiers pénètrent à l'intérieur. Dans la nuit est déjà tombée. On ne voit rien. Ils tendent l'oreille. Pas un bruit. Il allume leurs torches. Ils font le tour du rez de chaussée. Personne vient. Montons à l'étage. Les deux policiers s'engagent dans l'escalier et à peu près au milieu de l'escalier d'or le faisceau de leur lampe, ils voient un petit objet sur les marches.

[00:02:19]

Qu'est ce que c'est, ça? On dirait une bille. Il se pend. Si ça n'est pas une bille s'étonna, c'est un oeil humain. Alors, il monte les dernières marches dare dare sur le palier du premier étage.

[00:02:40]

Il tombe sur deux cadavres de femmes gisant sur le sol en montueux carnage.

[00:02:55]

Robe qu'elle porte. Il semble bien qu'il s'agisse de madame Lancelin et de sa fille. Elles ont été lacérés de coups de couteau et leur visage montueux leur visage. Leur visage est complètement écrasé. De la bouillie. Les deux policiers redescende les escaliers quatre à quatre.

[00:03:13]

Ils vont chercher leur brigadier resté dans la rue avec Moscou.

[00:03:16]

Lancelin et son gendre. À mes yeux, il vaudrait mieux que vous restiez ici. Pour l'instant, chef venait et le brigadier découvre à son tour la scène de crime. Il nous faut maintenant chercher les deux domestiques. Il a dû leur arriver malheur à Lucy. Les policiers font le tour du premier étage et fouillent les trois chambres une par une personne. Ils montent au grenier. Rien non plus dans la blanchisserie. Ils remarquent que le fer à repasser sur la table, près d'une chemise froissée.

[00:03:48]

T'as vu? On dirait que le travail a été interrompu. Il ne leur reste plus qu'une pièce à fouiller la chambre de bonne, il tourne la poignée fermée, verrouillée de l'intérieur. Police, ouvrez! Pas de réponse. Il commence à s'imaginer le pire. Les d'Eaubonne sont mortes elle aussi. Alors elle envoie chercher un serrurier. Et tant qu'à faire, il faut prévenir le patron. Le commissaire Dupuis, qui débarque quelques minutes plus tard avec le juge d'instruction et le médecin légiste.

[00:04:40]

Le serrurier déverrouille la porte et il voit les deux bonnes bien vivantes en peignoir, couchées côte à côte dans le même lit et sur un tabouret près du lit. Il y a une bougie et un marteau dégoulinantes sans. Vous attendez? Mais qu'avez vous fait à vos maitresses? Nos maîtresses? Elles ont voulu me frapper. Je me suis vengé. C'était nous ou elles. Et j'aime mieux avoir la peau des patronnes que leur laisser la note. Non. Comment vous appelez vous?

[00:05:15]

Moi, c'est Christine. Christine Papin et elle, là, c'est ma soeur Léa. Habillez vous! Pendant qu'elle s'habille, le commissaire tente d'établir le contact avec la plus jeune Léa, qui semble la plus fragile. Il sent qu'elle est sur le point de parler un regard de sa grande sœur et elle se mure dans le silence. Et les deux soeurs sont t'emmener pour être interrogées.

[00:05:51]

Le lendemain, l'affaire fait les gros titres du Journal de la Sarthe et de Ouest-Éclair. Il faut dire qu'il y a de quoi la scène de crime est une boucherie.

[00:06:04]

Alors, retournons sur place et observons les cadavres. Commençons par la fille Geneviève. Son corps repose sur le ventre. Sa culotte est baissée. Elle a le bras droit tendu et ses mains sont couvertes de sang.

[00:06:18]

Note. Présence de chevaux collés dans ses mains. Non, aussi profondes blessures sur le fessier. Mais ça n'est rien à côté du corps de madame, lance la mère. Il repose sur le dos, jambes écartées, culottes baissées. Là encore, il lui manque une chaussure au pied gauche. Mais ce qui frappe, c'est le visage, c'est la tête, tout le côté droit et complètement écrabouillé. Et surtout, il manque les yeux. Elle a été énucléé alors des yeux dans l'escalier, sur une marche.

[00:06:50]

Et le second, où était il?

[00:06:52]

Il nous faut trouver l'autre et il le retrouve sous le corps. Mais ce n'est pas tout. Quand on ouvre la bouche du cadavre de Mme Lancelin, elle n'a plus une seule dent pour les lui a tout arraché. Toutes, il y en a partout autour, sur le plancher et l'arme du crime. Alors? Eh bien d'abord, il y a ce marteau dégoulinant qu'on a retrouvé dans la Chambre des bogues. Et puis son couteau de cuisine posé contre le corps de madame, lance la mère.

[00:07:25]

Et puis, peut être ce pot d'étain massif très lourd, qui est là, posé par terre et qui est couvert de sang. Autant vous dire que les policiers du monde n'ont jamais vu un crime aussi atroce. Les yeux arrachés. C'est sans précédent, sans précédent. Mais qu'est ce qui s'est passé dans la tête de ces d'Aubonne? Les deux soeurs Papin ont été emmenées au poste, l'aînée, Christine, est interrogée le soir même. Elle ne fait aucune difficulté à raconter.

[00:08:23]

Je vais tout vous dire. Mettray sont sortis cet après midi. On était censé faire le repassage, on n'a pas pu le faire. Le courant s'est coupé à Courgis. Alors quand madame est rentrée vers 5 heures et demie, on lui a dit qu'on n'avait pas pu repasser comment elle voulait qu'on fasse un Salazariste toutes les deux dans une de ses colères. Vous étiez où à ce moment là bas, là où vous les avez trouvés sur le palier du premier et après?

[00:08:53]

Après, Mademoiselle a voulu me coller une gifle. Quand j'ai vu qu'elle allait se jeter sur moi, je n'ai pas attendu. Je voulais sauter à la figure et je lui arracher les yeux avec mes mains. Notez qu'elle dit ça sans aucune émotion. Elle dit qu'elle lui a arraché les yeux, comme elle dirait. Je suis allée me promener. Et Madame, lance la mère. Alors, comment avez vous fait à la mère? Ma sœur va lui arracher les yeux.

[00:09:25]

Ensuite, je suis descendu à la cuisine, je suis allée chercher un marteau et un couteau. Et puis on l'a frappée sur la tête avec le marteau et j'avais beau en état. Christine raconte qu'après, elle est redescendue pousser le verrou et fermé la porte du vestibule, qu'elles se sont lavé les mains dès qu'elles sont allées se coucher dans le lit où on les a trouvés, et elle ajoute, glacial! Je n'ai aucun regret. Je n'avais pas prévu de la tuer, je n'avais pas de haine envers elle.

[00:09:58]

Je n'ai pas supporté son geste. Voilà tout le geste. De quoi parlez vous? La gifle, la gifle qu'elle a voulu me donner.

[00:10:22]

Dans quelle histoire elle leur arrache les yeux et les dents, elle leur fracasse la tête à coups de marteau parce que leur maîtresse a failli leur donner une gifle. Quelle histoire!

[00:10:40]

La petite Léa est interrogée à son tour dans une autre pièce. Au début, elle reste de marbre. Le juge lui lit les déclarations de sa soeur Christine. Elle se contente de confirmer. Je vous lis le procès verbal. Tout ce que vous a dit ma sœur est exact. Les crimes se sont passés exactement comme elle, vous les avez. Mon rôle dans cette affaire est absolument celui qu'elle vous a indiqué. J'ai frappé autant qu'elle, commeles j'affirme que nous n'avions pas prémédité de tuer nos patronnes.

[00:11:10]

L'idée nous est venue instantanément quand nous avons entendu Mme Lancelin nous faire des reproches, pas plus que ma sœur. Je n'ai le moindre regret de l'acte criminel que nous avons commis. Comme ma sœur, j'aime mieux avoir eu la peau des patronnes plutôt que ce soit elle qui est la nôtre. Voilà, cette histoire est complètement folle. En attendant une explication, les corps sont d'abord transportés à l'amphithéâtre des Hospices en vue des autopsies. Les cercueils sont ensuite exposés à la cathédrale dans une chapelle ardente, et l'enterrement de Mme Lancelin et de sa fille Geneviève a lieu trois jours après le curé.

[00:11:53]

Les deux cercueils traversent seulement posé sur deux corbillard, le cercueil de madame Lance la mère est recouvert d'une toile noire et il est tiré par des chevaux noirs. Celui de Geneviève, qui avait 23 ans, est blanc et il est tiré par deux chevaux blancs. La foule des grands jours a assisté à la cérémonie et sur le parvis après la messe. Que disent les gens? C'est ça le papa Boisrond, Fall Fall, Judy Fall. Le juge, justement, a demandé une expertise psychiatrique et quand les psychiatres rendent leur rapport, ils sont formels.

[00:12:35]

Les sœurs Papin ne sont pas folles. Elles sont distille saine d'esprit. Il note que Christine a une intelligence supérieure à celle de sa petite sœur et Koléa a un caractère plus renfermé, moins expansif que son aînée. Mais surtout, et c'est bien intéressant. Les psychiatres écrivent qu'ils sont surpris aussi par leur caractère quasi identique. Elle, on distille une relation très particulière. Mais particuliere comment au cas où on aurait mal compris? Il précise Dans cette affection, on ne saurait déceler aucune explication équivoque ni aucun attachement d'ordre sexuel.

[00:13:18]

Il semble certain que l'affection de Léa pour Christine est d'un ordre filial. Christine représente pour Léa, la sœur aînée, la grande sœur, la remplaçante de la maman. Alors question est ce qu'au titre de cette relation particulière, Christine a pu entraîner Léa dans ce crime monstrueux? Est ce que Christine Angot a un role supérieur à celui de sa jeune soeur? Eh bien, selon les psys n'ont aucune des deux ne semble avoir agi sur la suggestion de l'autre.

[00:13:48]

Il faut simplement admettre que les deux soeurs ont agi ensemble avec le même acharnement, avec la même brutalité, uniquement en raison de la communion des sentiments et des idées qui sont les leurs. Conclusion des psychiatres. Les deux soeurs sont responsables de leurs actes. 2 Leur responsabilité est totalement partagée entre les deux. Tout cela, bien sûr, à resituer dans le contexte des connaissances psychiatriques de l'époque. Si les deux heures ne sont pas folles, alors qu'est ce qui peut expliquer?

[00:14:35]

Je n'ai pas dit à excusées. J'ai dit expliquer ce déferlement soudain de violence et ce détachement aussi, cette manière d'assumer sans s'excuser. Cette façon de raconter les choses, cette froideur de leurs parents. Peut être les liens qu'elle avait avec leurs parents. Les parents, on le sait, peuvent être le meilleur et le pire pour les enfants.

[00:15:02]

On apprend que le père Gustave était porté sur la boisson en matière de bibine. Il avait la consommation d'un petit tracteur. Quant à leur mère Clémence, comme on dit, elle tenait mieux sur le dos qu'une chef sur les cornes, mais voyait. Elle n'était pas farouche quand elle épouse Gustave. Tout le monde est au courant. Elle est déjà enceinte de Guy. Ça, on ne l'a jamais su. Est ce qu'elle le savait elle même? Ça n'est même pas sûr.

[00:15:28]

Et lui fait avec. Et ainsi naît en 1902 Emilia, leur premier enfant. Et d'après ce qu'on dit, la mère continue de batifoler. Alors, Gustave décide de s'éloigner du village. Il trouve un nouveau travail à la série de mariniers à huit kilomètres et il déménage. Et on raconte que sa femme Clémence apprend la nouvelle et entre dans une colère noire. Elle fait un chantage au suicide se tuer plutôt que de partir du village. C'est un coup à divorcer, mais pas de chance.

[00:15:59]

Elle est enceinte de son deuxième enfant et avec deux gosses qui voudraient d'elle, résignée, elle finit par accepter de s'installer à Marinier.

[00:16:09]

Et c'est là que naît sa deuxième fille, Christine, celle qui nous intéresse. L'aînée des deux sœurs, meurtrière, mais deux enfants. Elle dit que ça la fatigue. Et donc, elle décide de confier Christine à sa belle sœur Isabelle, la sœur de Gustave, qui habite aussi à Mariner et qui l'Iton tient les hommes en horreur, mais qui n'a pas d'enfants. C'est elle qui élève Christine jusqu'à ses 5 ans, comme si c'était sa vie. Et puis, à l'automne 1910, les parents la récupèrent et ils vont s'installer en ville, au monde et un an plus tard, naissance de leur troisième enfant, Léa.

[00:16:45]

C'est le moment que choisit la mère pour divorcer, laissant Gustave noyer son chagrin dans l'alcool. Mais une fois divorcé, les trois enfants lui pèse. Alors, elle confie Léa, qui est tout bébé à son frère. Et elle place Emilia et Christine à l'orphelinat du Bon-Pasteur, dont le but premier n'est que de fabriquer des nonnes. Et du coup, d'ailleurs, Emilia, l'aînée, rentre dans les ordres. Là dessus, le frère meurt et Léa échoue elle aussi chez des religieuses à Saint-Charles au Mont, à un moment donné.

[00:17:20]

Christine envisage de suivre l'exemple de sa grande sœur et d'entrer elle aussi dans les ordres. Et là, d'un coup, la mère se Thérèse, ses filles à son nom. Les Normands ont déjà pris ma grande barbe prendre la deuxième Châlon, et donc la mère retire Christine de l'orphelinat et la place comme bonne au début, d'après ce que disent ses patronnes de l'époque, ça se passe très bien, Christine. À l'époque, c'était une gentille fille sérieuse, travailleuse, très obéissante.

[00:18:07]

Comprenez quelle reprise, quelle récurent, quelle fraude, quelle cuisine, quelle Rappaz, quelle fait briller les sols à l'huile de genoux sans jamais rien réclamer et qu'elle mange les restes sans se plaindre. C'est comme ça qu'au printemps 1926, Christine Papin trouve une place de cuisinière chez les Lancelin. Et comme les Lancelin cherchent aussi une femme de chambre, et bien elle leur propose sa soeur Léa. Et après, il s'écoule sept ans. Sept années durant lesquelles les sœurs Papin sont des employés exemplaires, d'après ce que dit M.

[00:18:39]

Lancelin lui même. Alors, que se passe t il le 3 février 1933, pour qu'elles se ruent sur leur maîtresse et sa vie et finissent par leur arracher les yeux? Lance la mère et fille. Étaient elles des monstres qui, finalement, n'auraient tenu que ce qu'elle méritait? A quoi ressemblait avant le massacre, la vie des deux soeurs Papin chez les Lancelin? C'est vrai que Mme Lancelin était très exigeante, mais est ce qu'elle était pour autant maltraitant? Bien que l'enquête démontre que ça serait plutôt l'inverse.

[00:19:21]

L'après midi, les deux soeurs avaient droit à deux heures de temps libre. C'était très rare à l'époque, c'était moderne.

[00:19:28]

Par ailleurs, elles percevaient chacune des gache fixes de 150 francs par mois. C'est correct. Là encore, on est au dessus de la moyenne, sachant qu'elles étaient par ailleurs nourris, logés et blanchis. Et de temps en temps, madame, leur donner la pièce est la preuve qu'elles ne manquait pas d'argent. C'est que au moment des faits, elles ont des économies et même de sacrées économies. Vingt deux mille deux cents francs à elles deux à la banque.

[00:19:55]

C'est intéressant d'ailleurs, parce que avec cet argent, elles auraient pu s'acheter un petit commerce. Elles auraient pu devenir boutiquiers si rester chez madame Lancelin leur devenait insupportable.

[00:20:05]

Elles pourraient très bien s'en aller. Ajoutez à cela qu'au moment où on invente les premières assurances sociales, l'ancêtre de la Sécu, monsieur Lancelin, fait le nécessaire. Il adhère en leur nom. L'enquête ne trouve rien dans le comportement des Lancelin qui puisse justifier une quelconque vengeance. Et d'ailleurs, elle passe sept ans à leur service sans son nuage.

[00:20:42]

Au final, pour expliquer ce geste, il ne reste que la piste de leur enfance sans amour. Comme souvent, vous trouverez ça chez la plupart des grands criminels ne pas avoir été aimés, ne pas s'être construit sur un amour maternel solide, puissant, indispensable. Je vous rappelle que toute petite bébé, la mère papa, confie sa fille Christine à sa belle sœur et ensuite, elle l'arrache à ce semblant d'amour maternel pour la jeter dans les bras des bonnes sœurs qui, à l'époque, n'étaient pas toujours empreintes de charité chrétienne.

[00:21:16]

Et d'ailleurs, au moment du crime, elles ne voyaient plus leur mère. Elle était fâchée. Quand elle parle d'elle, elle disait Cette femme, Christine, elle est a papa ou manqué d'amour maternel, c'est clair.

[00:21:30]

Et une fois de plus, n'excuse rien. Mais ça explique un peu. Reste à résoudre une énigme. Ont elles vraiment commis ce crime et réalité comme elles le prétendent? Sens ascendant de l'une sur l'autre, dont l'aînée Christine, sur sa soeur Léa? C'est un chat, on pense bien sûr, d'abord en prison. Christine, l'aînée, fait plusieurs crises de démence et en juillet 1933, elle écrit au juge d'instruction pour être réentendu. Et voilà ce qu'elle lui déclare.

[00:22:13]

Je n'ai pas dit la vérité, Mme l'ENSA ne m'a pas provoqué. J'ai été prise d'une crise nerveuse, je me suis précipitée sur elle sans qu'elle s'y attarde. Je l'ai d'abord frappé d'un coup de pigez sur la tête, puis quand mademoiselle est arrivée, je l'ai frappée aussi avec le pichet en état. Là, elle m'a saisi aux cheveux. Je l'ai fait tomber et puis je lui arracher un oeil. Ma sœur est arrivée à ce moment là, vu que Mme Lancelin était sur le point de se relever et s'est jeté sur elle.

[00:22:46]

Je lui ai dit de lui arracher les yeux et puis je l'ai passée de l'empêcher pour qu'il lui fracasse la tête. Ensuite, je suis descendue chercher le couteau et le marteau pour les massacrer. Ça n'est plus du tout la même histoire.

[00:23:00]

Alors, du coup, le juge interroge la petite sœur et à sa grande sœur, elle était très énervée par des traitements du fer à repasser et était entré dans une fureur. Je n'avais jamais vu comme ça. Ça change tout.

[00:23:17]

Elles ne sont pas à égalité et à la veille du procès, le juge fait le distinguo. Christine Papin est renvoyée pour deux meurtres et est pour le seul meurtre de madame, lance la mère. Le procès est annoncé pour le 29 septembre 1933 devant la cour d'assises du moment. Il est question de mobiliser deux cents policiers pour contenir la foule. On s'attend à des centaines de personnes qui, depuis des mois, suivent toute l'histoire dans le journal, car La Presse, depuis Le crime, fait ses choux gras de cette histoire.

[00:23:54]

Paris Soir, Le Petit Parisien, Le matin, Le Quotidien. Ils auront des envoyés spéciaux au procès, bien entendu. A noter, à la veille du procès, la place un peu particulière comprise dans deux journaux, l'Humanité et Détectez, eux, contrairement à tous les autres. Ils ont pris fait et cause pour les sœurs Papin.

[00:24:20]

De la part de l'humanité, c'est une demi surprise. Les journalistes de l'Huma pensent que les sœurs Papin sont des victimes du monde bourgeois. Je voulais un extrait d'un article publié à la veille du procès dans l'Huma. Les sœurs Papin sont des esclaves d'une société, de nouveaux riches qui les exploités, de pauvres malheureuses qui, à force de courber l'échine, ont fini par se révolter. Elles ne savaient pas comment faire. Elles sont directement passées au crime. Bon, on est dans les années 30.

[00:24:48]

Les communistes lisent tout à la lumière de la lutte des classes. C'est comme ça.

[00:24:59]

En revanche, la position de détective est beaucoup plus surprenante. C'est un journal tout jeune, pas spécialement de gauche. Mais depuis le début, il soutient que c'est un crime de la révolte, un crime, de la misère, un crime, de l'exploitation. C'est peut être de la démagogie. Une manière de draguer le lecteur des classes populaires et détectives, dans cette démarche très iconoclaste, a reçu un sacré soutien, celui de Simone de Beauvoir et Jean-Paul Sartre, tous les deux fascinés par cette histoire et rallié à une lecture politique.

[00:25:40]

Dans son livre La force de l'âge. Simone de Beauvoir écrit Dès que l'ordre social est évoqué, il faut flairer la mystification. Car le mystère troublant de ce crime d'une indicible cruauté reste jusqu'à aujourd'hui insondable.

[00:25:55]

Autrement dit, puisqu'on ne peut pas expliquer ce crime, alors c'est une affaire de prolos contre les bourgeois. Quelle époque, quelle époque! Allons donc assister au procès maintenant. Les deux sœurs Papin seront jugées en une seule journée. Figurez vous. L'audience commence à une heure et demie de l'après midi et ce soir, ce sera plié. Soyons clairs, elles risquent toutes les deux la peine de mort.

[00:26:26]

Quand les deux soeurs entrent dans la salle d'Assinie, Oh à tous les regards se tournent vers elles Christine et Léa, et les gens sont un peu déçus et ils s'attendaient à voir débarquer deux harpies. Ça n'est pas du tout le cas. Christine porte un manteau clair beige. Elle a un petit chignon bas. Elle a les traits tirés. Elle est vêtue d'un manteau sombre. Elle a l'air d'un petit animal apeuré.

[00:26:50]

Elle ne ressemble pas du tout à l'idée qu'on se fait par avance de deux monstres qui ont arraché les yeux de leur patronne. Et Invests reste comme ça pendant tout le procès. Humble, timide, elle ne répondent aux questions que par des phrases courtes, murmuraient parfois inaudibles. Christine reconnaît d'entrée l'ensemble des faits, mais elle est incapable de fournir la moindre explication rationnelle. Les experts psychiatres viennent déposer. Ils confirment ce qu'ils ont déjà dit.

[00:27:21]

Nous les considérons et l'une et l'autre comme responsable de leurs actes. Nous n'avons constaté ni chez l'une et chez l'autre, aucun dérèglement psychique, aucun. Et nous leur disons né chez l'une, chez l'autre. Pour tenter de contrer leur avis, la défense a fait venir à la barre le docteur Logan, qui est médecin de la préfecture de police. Son regard sur l'affaire est très différent de celui de ses confrères. Je ne peux pas affirmer qu'elles sont folles. Bien entendu.

[00:27:55]

Mais personne ne peut dire qu'elles sont normales, n'est ce pas? Il note d'abord le contraste entre le mobile du crime est extrêmement faible, même inexistant, et la férocité des deux sœurs. Il pense que la personnalité de la plus jeune Léa est totalement annihilée par celle de l'aîné. Christine. Pour moi. Christine Papin serait possiblement atteinte de ce qu'on appelle une liste héros épilepsies. Et il pense que le coupable n'est ni Christine ni Léa. Il pense que le coupable est le duo qu'elle forme.

[00:28:28]

Évidemment, maître Chautemps, l'avocat de Léa, saute sur l'opportunité. Je demande subséquemment au témoignage du docteur l'OCR. Un complément d'enquête sur l'état mental des accusés. Un renvoi de l'affaire à une date ultérieure. Il le demande, mais sa demande est rejetée par la cour. L'avocat de M. Lancelin, parties civiles, se lève pour plaider. Je vous demande de vous montrer inexorables de pitié. Elle Norberto qu'une. Et puisque qu'elle avait au coeur de leur patronne, leur a inspiré dans les crimes qu'elles ont commis des raffinements de torture et de cruauté qu'on ne rencontre que chez les sauvages puisqu'elles se sont conduites comme des bêtes fauves, il faut les traiter en sauvages, il faut les traiter en bêtes.

[00:29:29]

Faut, il faut supprimer l'une puisque la loi vous permet de la supprimer et il nous faut mettre l'autre hors d'état de nuire à tout jamais. L'avocat de M. Lancelin vient de réclamer la guillotine pour Christine et la prison à vie pour les uns. La parole est à l'avocat général.

[00:29:50]

Ce ne sont que de monstrueuses L'arracheuse. Dieu, n'est ce pas? Je vous jure d'être impitoyable. Je requiert le maximum de la peine. L'échafaud pour Christine? Le bagne pour Léa? Reste à entendre les avocats de la défense Maître Brière. Pour Christine et maître Chautemps. Pour les uns, qui n'ont tous les deux qu'un seul argument une seule carte à jouer l'irresponsabilité pour raisons psychiatriques.

[00:30:22]

Elles sont malades. Malades, leur place est à l'asile. Il n'est pas en prison et encore moins, comme vous le suggère l'avocat général, sous la lame d'une guillotine. Elles sont malades. Le président du tribunal se tourne alors vers Christine Eléa. Mesdemoiselles, levez vous! Avez vous quelque chose à ajouter pour votre défense? Dents, elles n'ont rien à ajouter. La cour se retire pas longtemps 40 minutes, mais c'était comme ça à l'époque et le président énonce le verdict.

[00:31:12]

Mlle Pappa Christine. Après en avoir délibéré, vous condamne à la peine capitale et ordonne que vous soyez conduite en place publique dument pour avoir la tête tranchée.

[00:31:25]

Christine tombe à genoux. Mademoiselle Papalia. La Cour, après en avoir délibéré. Vous condamne à 10 ans de travaux forcés et 20 ans d'interdiction de séjour. La cour vient de valider l'idée que l'EI a été sous l'influence de sa sœur Cristina. La séance est levée à une heure et quart du matin. Le lendemain, le journaliste Maurice CORIM écrit dans Police Magazine. Le jury a condamné, il n'a pas jugé. Et maintenant, il faut se préparer à l'exécution de Christine.

[00:32:17]

Christine qui, dans sa cellule, se laisse mourir de faim. Elle est très affaiblie, très amaigrie. Son avocat fait un recours en grâce pour vous dire dans quel état elle est. Elle refuse de le signer.

[00:32:30]

Et pourtant, ça marche. Il faut dire que le terrain est favorable. Le président de la République, Albert Lebrun, est abolitionniste. Il est opposé à la peine de mort et le 22 janvier 1934, il écrit au procureur de la République Tu mens! Il commue la peine de mort prononcée contre Christiane Papin en travaux forcés à perpétuité.

[00:33:00]

Deux jours plus tard, Christine est donc transférée pour purger sa peine à vie à la prison centrale de Rennes. Mais son état mental continue de se dégrader. Le 12 mai, le docteur de la prison demande un examen psychiatrique d'urgence qu'il est très inquiet. Deux semaines plus tard, Christine est admise dans le service du docteur Guillerme à l'asile de Rennes. Il constate un état mélancolique, son refus de s'alimenter. Christine est en train de se laisser mourir. Elle refuse de manger.

[00:33:32]

Le docteur de la prison est très pessimiste. Vous voulez mon avis? Elle s'est engagée dans une évolution schizophrénique. C'est ta indubitables. Ah tiens, elle serait donc schizophrène. Finalement, on fait venir sa sœur à pour susciter une réaction. Christine ne la reconnaît même pas. Et finalement, en mai 1937, plus de quatre ans après le carnage, Christine Papin meurt d'une attaque pulmonaire consécutive à son refus de manger. Sa petite sœur, en revanche, Léa s'adapte à la vie carcérale en prison.

[00:34:15]

Elle travaille dans un atelier de confection imperméable. Elle est considérée comme une très bonne ouvrière et elle est toujours en contact avec sa mère, qui travaille au monde comme cuisinière et comme femme de ménage. Elle a été arrêtée en 1933 pour souvenaient qu'elle a pris dix ans et donc, en 1943, elle sort de prison. Encore jeune, elle a 31 ans et elle ne peut pas rester au Maroc puisqu'elle est interdite de séjour pour vingt ans. Alors, elle va s'installer à Nantes avec sa maman, où elle va rester toute sa vie.

[00:34:46]

Elle est morte à Nantes il n'y a pas si longtemps que cela. En 2001, à l'âge de 89 ans. Et si vous avez vécu à Nantes, vous l'avez peut être croisé sans savoir. Voilà, vous savez à peu près tout de cette histoire qui, depuis 1933, passionne les foules, à commencer par les psys, l'année du massacre. Par exemple, le célèbre psychanalyste Jacques Lacan a publié dans la revue du Minotaure une étude sur le sujet et il pense, lui, que le double meurtre de madame Lancelin et de sa fille est la conséquence d'une folie à deux.

[00:35:22]

Christine et Léa n'étaient pas conscientes. D'autres psychanalystes des années 30 ont envisagé une homosexualité incestueuse entre les deux sœurs. Voilà leur scénario.

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Christine et a sans surprise en pleine ébats par leur patronne. Alors, elles les tuent pour que leur amour reste secret et elles leur arrachent les yeux pour effacer les images, en quelque sorte. Pourquoi pas? Mais ça n'est qu'une supputation. Personne n'a jamais pu prouver que Christine et Léa étaient des lesbiennes incestueuses. Mais peu importe, puisque cette histoire, finalement, n'appartient plus aux soeurs Papin. Elle est devenue une propriété publique, un sujet à fantasmes et à interprétation.

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En plus de 80 ans, cette affaire a inspiré des romans, des pièces de théâtre. Vous connaissez peut être Les bonnes de Jean Genet et au moins trois films de cinéma Les abysses de Nicole Pataky en 1963, La cérémonie de Claude Chabrol en 1995 avec Isabelle Huppert et Sandrine Bonnaire dans le rôle des deux soeurs et plus récemment, Les blessures assassines de Jean-Pierre Denis avec Sylvie Testud et Julie Marie Parmentier et plus encore récemment, la psychothérapeute Isabelle Bédouet, qui est originaire Dument, a travaillé dix ans sur le sujet et elle a publié un nouvel ouvrage et elle a trouvé une nouvelle piste concernant le mobile.

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Elle a découvert que sept mois avant le crime, une affaire assez similaire a eu lieu dans la même région. En juillet 1932, à Rodhain, pas très loin du banc, un couple de personnes âgées, Léon et Batteux, sont retrouvés assassinés. Ils ont été tués par un autre couple, Louis et Juliette Angibaud, qui ont été condamnés aux travaux forcés à perpétuité. Isabelle Bédouet pense que ce crime a inspiré les soeurs Papin. Lisez son livre si vous voulez compléter ce récit Le crime des soeurs Papin, Les dessous de l'affaire, aux Editions Imago.

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