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On raconte sur un Robyns avicole de la nouvelle série nordique de polars, plus seulement avec Canal+, Sylvain, un jeune enquêteur finlandais envoyés résoudre un crime commis dans le village de son enfance, va devoir affronter son douloureux passé. Tous les dimanches, dès le 6 décembre, en exclusivité sur Polar pieuse et en intégralité via Bacchanales. Raconte Christophe Hondelatte. Une grande aventure de montagne. Aujourd'hui, la tentative en 1992 de deux alpinistes français, Pierre Béjean et Jean-Christophe Lafaille, de vaincre l'Annapurna dans l'Himalaya par la face sud et par la voie directe.

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Une aventure qui se termine en tragédie puisque Pierre Bégin, il laisse la vie et que Jean-Christophe Lafaille ne réussit à redescendre seul que par la force tellurique de sa volonté. C'est à partir du livre de Jean-Christophe Lafaille, publié à son retour en France aux éditions Guérin, Prisonnier de l'Annapurna, que j'ai bien entendu bâti mon récit. Et comme malheureusement depuis, Jean-Christophe Lafaille est mort quelques années plus tard, avalé à son tour par la montagne dans l'Himalaya. J'ai demandé à l'un des meilleurs connaisseurs de l'alpinisme, le journaliste Charlie Buffet, d'être là.

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Bonjour à vous fait, vous êtes l'auteur d'un très beau livre, Annapurna, une histoire humaine, publié lui aussi aux éditions Guérin. Merci d'être là. Voici donc cette histoire absolument unique et bouleversante. Je l'ai écrite avec Emmanuelle Denise. Réalisation Céline Le Braz.

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Christophe Hondelatte. D'abord, l'Annapurna, ce n'est pas une montagne, c'est un massif, un massif de six sommets reliés par des crêtes au centre de l'Himalaya. C'est le premier 8000 mètres à avoir été gravi par un homme. Deux hommes, en vérité, deux Français, Maurice Herzog et Louis Lachenal. C'était en juin 1950 et sur les six sommets, celui qui intéresse nos deux héros du jour, Pierre Bégin et Jean-Christophe Lafaille. C'est le plus haut, forcément.

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8080, 11 mètres depuis le début de l'histoire. Cent quatre vingt onze bonhommes sont montés là haut. 61 y ont laissé la vie. Le sommet numéro de l'Annapurna, c'est certes 800 mètres de moins que le reste, mais c'est l'un des sommets les plus difficiles de la planète, surtout par la face sud. Et vous vous doutez que c'est celle là qu'ils ont choisi? Un mur de 3000 mètres, parfois vertical. Et tant qu'à faire, ils ont choisi d'aller tout droit la voie directe.

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Et sa personne n'est jamais passée par là. Personne. Ce que je vais vous raconter aujourd'hui, c'est sans doute l'une des plus grandes aventures humaines de toute l'histoire.

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Alors voilà comment ça a commencé un soir de 1992. La Fédération française de montagne et d'escalade organise à Chamonix une grande soirée pour les César de l'alpinisme pour récompenser ses héros de l'année. Pierre Bégin reçoit un prix pour son ascension du K2 avec Christophe Profi, son sixième sommet himalayen, et Jean-Christophe Lafaille, un prix lui aussi pour son enchaînement des deux piliers du mont Blanc en solitaire l'été d'avant. C'est ce jour là qu'ils font connaissance au cours du Pô, qui suit la cérémonie.

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Salut, salut! Félicitations pour ton enchaînement des deux piliers du Mont-Blanc. Arrête ton cadeau quand même. Ce n'est pas rien. Merci, mais tu vois, ça m'a pas calmé. J'ai l'intention de m'attaquer à l'Annapurna. l'Annapurna. Cet automne, je pense par la face à eux. J'ai juste un seul souci. Christophe Profit n'est pas partant. Alors, je cherche un équipier, je le trouve. Ça s'appelle tendre une perche et c'est assez étonnant parce que ces deux là ne pratiquent pas vraiment le même alpinisme.

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Pierre Béjean, c'est un Himalaya iste. Il a grimpé son premier 8000 à 30 ans et dix ans plus tard, il en a fait cinq de plus. Et tout ça sans porteur, sans bouteille d'oxygène et sans corde installé avant l'ascension. L'homme seul, brut de décoffrage face à la montagne, alors que Jean-Christophe Lafaille. D'abord, il est plus jeune. Il a 27 ans et l'autre, 41. Et lui, son domaine, ce sont les Alpes et rien que les Alpes.

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Escalader à toute berzingue les sommets alpins. Il n'est jamais allé dans l'Himalaya. Jamais. Mais l'idée de Pierre Bégin vient de se ranger dans un petit coin de sa tête.

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Et puis, au printemps 1992, coup de téléphone. Jean-Christophe Fagus, Pierre Béja, Sarah. Dis donc, tu te souviens de ce que je t'ai dit à Chamonix? Ça se confirme. Je fais l'Annapurna cet automne. Et la réponse est tout de suite oui, Jean-Christophe est partant pour être le compagnon de cordée de Pierre Bégin dans la conquête de la face sud de l'Annapurna. Alors, comment est ce qu'on se prépare à un truc de fou comme ça, deux garçons qui ne se connaissent pas, qui n'ont jamais rien fait ensemble?

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Est ce qu'ils vont faire une petite sortie? Une petite paroi? Un petit rocher? Je ne sais pas. Un truc, quoi. Eh bien non, ils n'ont pas le temps. Ils se contentent d'étudier les cartes dans le détail. Et puis voilà. Début septembre 1992, il débarque à Katmandou, au Népal, et ils rejoignent directement le camp de base sous une météo épouvantable. Pas un rayon de lumière, le ciel bas comme une chape de plomb, du brouillard, de la pluie.

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Bienvenue dans l'Himalaya, au camp Base. Ils sont à 4000 mètres d'altitude. Et quand ils se réveillent le lendemain, le ciel s'est dégagé un peu. Il la voit, la fameuse face sud de l'Annapurna. Il la voit et c'est vertigineux. Une muraille de trois kilomètres de haut, dix tours Eiffel posées les unes sur les autres au début, bien raide sur les 1000 derniers mètres, quasi vertical. C'est une dinguerie. Mais putain, que c'est grisant.

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Quand on aime la pierre sur la main. Et ils passent tous les deux quelques semaines à s'acclimater à l'altitude et à explorer le début de la face. Et le 7 octobre au petit matin, un thé brûlant. Et c'est parti! Je vous rappelle qu'ils partent sans oxygène et ils partent aussi sans radio pour ne pas s'encombrer. Et s'ils partent aussitôt, c'est pour profiter du gel qui fixe les roches sur les parois. Parce que quand ça dégèle, il pleut des pierres.

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Ils ont choisi d'aller tout droit sur la paroi, selon une technique assez simple de la grimpette. L'un d'eux escalade quelques mètres, assuré par son compagnon en cas de chute. Et là, il plante un point d'ancrage, une broche à glace ou un piton qui lui fixe la corde, ce qui lui permet d'assurer la montée du deuxième et ainsi de suite de points d'ancrage en points d'ancrage. Et celui qui est en dessous récupère éventuellement les pitons. C'est très fatigant, c'est très long.

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La nuit, il fait moins 20 degrés et le jour, avec le soleil, ça peut monter à +30. Ma fois le premier soir, ils atteignent 6600 mètres et ils installent une toute petite tente. C'est leur premier bivouac. Le lendemain, ils grattent 300 mètres de plus, 6 000 à 900 mètres et ils font une pause d'une journée pour attendre des conditions plus favorables pour entamer le gros morceau. Les 1000 derniers mètres presque verticaux.

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Et le 10 octobre, vers 4 heures du matin, ils repartent. Et d'entrée, ils s'aperçoivent que c'est plus difficile que prévu. Ils mettent plus de deux heures pour avancer de 30 mètres sur un mur gelé et presque vertical. Et ils ont tellement le nez dans le guidon qu'ils ne voient pas le mauvais temps qui arrive. Un froid de canard et des rafales de vent terribles. Ils prennent du retard, beaucoup de retard, ils n'arriveront pas au point de bivouac qu'ils avaient repéré, alors ils vont passer la nuit là.

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Là, sur cette toute petite plate forme de moins d'un mètre de large sur laquelle, évidemment, il est hors de question de monter une tente. Alors, il passe la nuit dans leur jus, accrochés à la roche comme des trapézistes, à sept mille quatre cents mètres d'altitude, malmenés pendant des heures et des heures par des vents titanesques. Une nuit de merde. Une nuit à chialé. Pierre et Jean-Christophe sont maintenant à 600 mètres du sommet de l'Annapurna et le lendemain matin, à l'aube.

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Les voilà repartis. Putain, que c'est dur, il neige, le ciel est tout noir, le vent est terrible. Il leur reste six cents mètres à gravir. Et au bout d'une heure, ils n'en ont fait que 25. Ça va? Putain, ça va arriver avec le vent, ils sont à 3 mètres l'un de l'autre. Ils ne s'entendent pas. l'Annapurna est en train de se refermer sur eux et à un moment épuisé. Congelez, Pierre, crie putain, c'est mort, c'est mort, on dégage.

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11. Bardenas. Ils vont donc redescendre. Pierre Plantin, premier point d'ancrage. Il passe la corde dans le baudrier et il se laisse glisser le premier en rappel sur 40 mètres à peu près. Là, il plante un nouveau point d'ancrage. Pendant ce temps, Jean-Christophe le rejoint. Il récupère la corde et ainsi de suite. Avec le vent qui continue de souffler, la neige qui tombe dru et le froid qui paralyse les doigts. Et à un moment, Jean-Christophe fait une bêtise.

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Il est fatigué, il n'a peut être pas l'esprit très clair pour renforcer un de ses points d'ancrage. Il sacrifie l'un de ses deux piolets. Grosse erreur. Il ne lui reste donc qu'un seul piolet dans ce genre de descente. C'est une très mauvaise idée. Et quand il arrive à la hauteur de Pierre, il décide une fois de plus de doubler un point d'ancrage. Il met deux pitons. Pierre N'empèche récupère d'hopitaux. J'ai un bon point d'ancrage. Il faut économiser du matériel.

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On en aura besoin. Pierre s'installe sur la corde. Puis il sent que l'un de ses deux piolets le gêne entre les jambes. Alors, il le décroche et il le donne à Jean Christophe. Tiens, tu me le rendra tout à l'heure. Jean-Christophe est au dessus de Pierre. Il a le dos collé à la paroi et il le voit qui s'élance en rappel. Confiant, il entend comme le bruit d'un fouet qui claque dans l'air. C'est la corde, le point d'ancrage, celui qu'il n'a pas voulu doubler.

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Le point d'ancrage a lâché. Je vois Pierre partir de la tête tournée vers le ciel, les bras impuissants, le dos lesté par son gros sac. Il est emmitouflé dans sa capuche et pourtant ses yeux sont là, qui me transperce de lumière, qui s'éternise dans le vide. Deux interrogations habité par l'effroi. Pierre disparaît. Son corps se dérobe. Sa silhouette est inspirée par le néant. Mais ses yeux sont toujours là, qui m'interrogent. Pierre Bégin vient de mourir sans un cri.

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Et Jean-Christophe Lafaille se retrouve seul, à sept mille cent mètres d'altitude, sur la face sud de l'Annapurna. Au début, il faut croire que Pierre n'est pas mort. Pierre Bordeyne Bordel, où es tu? Qu'est ce que tu fous? Claire. C'est absolument va maintenant. Lui qui n'a jamais peur. Il a le vertige, le vertige, le choc d'avoir vu son ami tomber dans le vide, le manque d'oxygène, le vent qui souffle comme une turbine, le ciel tellement noir qu'on dirait qu'il fait nuit.

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Jean Christopher tétanisées. Et puis, petit à petit, l'instinct de survie reprend le dessus. Dans son livre, il écrit Je chasse de mon imagination tout ce qui n'est pas immédiat. Calculer mes chances d'arriver en bas ne sert à rien. Et donc, il va tenter de rejoindre le dernier bivouac qui se trouve à 200 mètres en dessous. Mais il y a un gros hic, un truc qu'il n'avait pas réalisé tout de suite. Putain Blossac! Pierre Pierre portait sur lui le sac et dans ce sac qui avait presque tout le matériel, les cordes, les pitons.

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Il ne lui reste que deux piolets, dont le piolet que lui a donné Pierre juste avant de mourir. Sans ce deuxième piolet, il était cuit avec. Il a une chance, une chance de rejoindre ce putain de bivouac sur lequel ils ont laissé un tout petit stock de matériel. Alors, il se met en marche. Il plante son premier piolet dans la paroi, puis le second un peu plus bas. Et il descend comme ça. Mètre par mètre.

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Suspendue dans le vide, menacée à chaque seconde par les coulées de neige, cisaillé par le vent et par un froid glacial. Et au bout de plusieurs heures, il atteint enfin le bivouac à 6900 mètres. Et l'ingrate la neige et la glace. Et il retrouve le tout petit stock de Matthäus, qu'il avait laissé 20 mètres de corde, quelques piton des neiges et un peu de nourriture. Il était épuisé, alors il monte sa tente et il s'écroule de fatigue.

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Et il reste là une journée entière, dans un état de demi sommeil, constamment réveillé par un cauchemar. Pierre Pierre qui tombe dans le vide.

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Et puis, le lendemain matin, il sort de sa torpeur pour atteindre le bivouac suivant, il y a 500 mètres à faire sur une pente un peu moins raide, mais du coup entièrement gelée et couverte de neige. Il écrit. C'est comme descendre sur une vitre recouverte par des tonnes de coton qui peuvent se décrocher d'un moment à l'autre, en contrebas, à plus de deux mille mètres. Il aperçoit des tentes des alpinistes slovènes qui tentent aussi l'Annapurna, mais par une autre voie.

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Est ce qu'ils l'ont vu? Parce qu'il s'inquiète. Il n'en a aucutgne idée. Il plante un premier pieu dans la neige. Il passe, saccordent dans l'anneau et il attaque la descente 10 mètres et plus encore 10 mètres et puis encore 10 mètres. Et à chaque fois, bien sûr, il abandonne le matériel. Et à mi pente, il n'a plus aucun pieu pour accrocher sa corne. Et là, là, c'est la débrouille. Il fouille dans son sac à dos et il se met à découper les arceaux de sa tente pour en faire des pieux.

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Et il repart. Un coup de piolet, un coup de crampons. Il est environ 13, 14 heures. C'est le début de l'après midi. Le soleil commence à taper et des bouts de roche qui ne tenait que par la glace se mettent à tomber. Il est maintenant à quelques dizaines de mètres du bivouac. Et juste en dessous, il y a une Goulette, un petit couloir pour monter. Il avait accroché une corde fixe, la seule corde fixe qu'il a utilisé.

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Elle est là, il faut qu'il l'atteignent. Il faut absolument qu'il l'atteignent. Alors, il prend le piolet de pierre. Et tant pis. Tant pis, il reviendra le chercher plus tard. Il le plante, il s'accroche et il dégringole jusqu'à la corde fixe Saillé. Il teste la corde, elle tient. Alors il s'élance en rappel et tout d'un coup, il entend un énorme bruit. Dessus de lui, plus tard, c'est un éboulement, un torrent de pierres qui est en train de lui tomber dessus.

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Et soudain, une grosse pierre et le trou noir. Il tombe dans les pommes et quand il ouvre les yeux, il est suspendu au dessus du vide. Il a chuté de combien 150 mètres et surtout, il a un mal de chien au bras droit. Une douleur terrible. Une pierre lui a fracassé le bras. Il a dépassé le bivouac de quelques mètres. Il parvient à se hisser sur la plate forme avec sa main gauche. Il ouvre son sac.

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Il en sort avec les dents, la toile de tente. Il s'enroule de temps et il s'effondre dans un état proche du coma.

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Et quand il se réveille, il est transi de froid et de douleur et il se dit quelles sont mes chances de redescendre avec un seul bras et si peu de matériel. À un moment, il voit des Slovènes au loin en dessous, se rapprocher du pied de la face. Est ce qu'ils sont en train de venir le chercher? Non, non. Ils font demi tour. Ils ne l'ont pas vu. Alors oui, oui, à ce moment là, ils pensent à rejoindre Pierre deux fois.

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Deux fois, il balance ses jambes au dessus du vide pour voir. Il n'a qu'à se laisser glisser et c'est réglé. Le goût de l'abandon. Et il passe toute une journée comme ça, en pleine déprime. Et puis le lendemain. Le lendemain, il retrouve un peu de force. Il va se battre, il va se battre jusqu'au bout, même si ses chances sont proches de zéro. Il lui reste 1000 mètres à franchir jusqu'au glacier, 1000 mètres qu'il détaille du regard.

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Mètre par mètre. Là, je vais mettre ma main. Là, je vais mettre mon pied droit. Là, je vais mettre mon pied gauche. Il lui reste un peu de corde, quatre pitons, trois broches, trois mousquetons et un piolet. Le piolet de pierre. Quand il faudra faire un nœud, il le fera avec ses dents et en pleine nuit, à la lueur de sa lampe frontale avec son bras droit qui lui fait mal, a hurlé.

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Il s'élance. Trois fois, trois fois, il s'agrippe au dessus du vide avec son bras gauche et trois fois qu'il remonte. Il est paralysé par la peur et le vertige. La troisième fois est la bonne. Il enfonce son piton avec son bras gauche. Il fait coulisser la corde avec les dents. Il progresse d'un mètre ou deux et il recommence. Un autre piton, un autre nœud avec les dents. Et petit à petit, le bivouac s'éloigne lentement et régulièrement.

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Son bras cassé vient heurter la paroi, elyes le mur de douleur. Et comme si cela ne suffisait pas, à un moment, il est en train de faire un nœud avec la bouche. Il se casse une tant.

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Mais plus il descend, plus le terrain devient favorable. Il retrouve en apparence le Matthäus abandonné pendant la montée ici un bout de corde, là un ancrage. Et à huit heures du matin, il atteint enfin le haut du glacier. Il est sauvé. Il est sauvé. Il n'avait aucune chance de s'en sortir. Il est sauvé et assez vite arrivent les alpinistes slovènes avec un médecin qui lui fait une injection de morphine pour ne pas qu'il souffre. Et ensuite, on le descend au camp de base.

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Voilà moins d'une semaine plus tard, Jean-Christophe Lafaille est rapatrié en France dans un état physique et moral que vous imaginez. Il culpabilise et pendant des mois, il abandonne l'alpinisme. Il ne veut plus en entendre parler. L'idée de grimper à nouveau le terrifie.

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Mais il reviendra parce que la montagne, c'est sa passion, c'est toute sa vie. Un an jour pour jour après la mort de Pierre Bégin, Jean-Christophe Lafaille réussit son premier 8.000 mètres dans l'Himalaya et dix ans plus tard, il triomphe de l'Annapurna. Et en 2006, il s'attaque à son 12e sommet de 8000 mètres. C'est aussi son dernier. Jean-Christophe disparaît dans l'ascension du Makalu. Voilà pour ce récit tiré du livre de Jean-Christophe Lafaille, publié à son retour en France.

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Prisonnier de l'Annapurna et pour le débriefe, Je suis Charlie Buffet, qui est un journal spécialiste de l'alpinisme. Vous avez publié un très beau livre aux éditions Guérin qui s'appelle l'Annapurna. Une histoire humaine dans laquelle cette histoire est racontée. Vous racontez vous aussi. Le retour de Jean-Christophe Lafaille en France a été extrêmement difficile, comme on peut l'imaginer après ce qu'on vient d'entendre.

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C'est vous, vous avez parlé de culpabilité. C'est un truc qui est très classique quand on survit et qu'on est le seul à survivre. Quand, comme ça a été le cas ici, c'est le combat du survivant. C'est le complexe des survivants. Est ce que les psychologues appellent le complexe du survivant? On sait, on s'en veut, d'être celui qui a survécu. Et chez Jean-Christophe Lafaille, ça a pris la forme de cauchemars et d'une véritable douleur à vivre inévitable, qui est pratiquement inévitable dans toutes ces histoires semblables dont on fait un petit peu notre ordinaire.

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Chez Guérin, on fait notre ordinaire.

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Une maison d'édition spécialisée dans l'alpinisme racontait souvent des histoires qui finissent mal, qui finissent mal ou à moitié mal, mais qui ont cette intensité et l'apprêt.

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Un moment passionnant parce que j'imagine, quand on cherche à tout revisiter minute par minute. Est ce que j'aurais dû faire ça? Est ce qu'ils auraient dû faire ça? Est ce qu'on n'aurait pas dû faire demi tour? Est ce qu'on n'aurait pas dû s'arrêter là? Attendre, rentrer, etc.

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Quoi alors? Il ne cherche pas et il ne peut pas s'empêcher de le faire. C'est qu'il est hanté par ce qui lui est arrivé et donc fait des cauchemars. Il y pense malgré lui. Il ne peut pas s'empêcher d'y penser. Et pour moi, il y a deux mystères dans cette incroyable histoire. C'est d'une part, comment est ce qu'il a pu survivre parce que physiquement, il avait une chance sur un million de s'en sortir sans être capable de redescendre dans cette paroi très raide, avec embrassant, avec, même même avec ses deux piolet.

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Au début, c'est vertical, c'est de la glace, c'est du CD. Techniquement extrêmement difficile dans l'état de choc dans lequel il était. Qu'il ait réussi à se remettre en route, à descendre sans chuter, il fallait une maîtrise extraordinaire pour y arriver. Ensuite, il se casse le bras. Il arrive à prendre sur lui et à redescendre. Il arrive vraiment à la limite extrême de l'épuisement et de la survie. Ça, c'est le premier mystère. Comment est ce qu'il a trouvé cette ressource pour s'en sortir?

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La jeunesse, peut être. Il a 28 ans. Ça ne suffit pas.

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Il faut, il faut. C'est un c'est un as du solo Lafaille. Il a fait ce qui, à l'époque, était le solo le plus solo pour grimper sans corde sur des parois verticales verticales de rochers. Il a fait ce qui se faisait de plus dur à l'époque. C'est plus le privilège du serpent, c'est à dire expliquez moi, c'est à dire que à l'époque, c'était quasiment le sommet de la difficulté en escalade et il arrive à faire ça seul, s'accorde à dire que c'est une gestuelle extraordinairement incroyablement précise, délicate et qui ne supporte pas la moindre erreur.

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Et il réussit à faire ça encore des soldats.

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C'est le premier mystère, le deuxième et le deuxième mystère. C'est pourquoi est ce qu'il y retourne?

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Oui, mais ça vous surprend? Evidemment que quand on comprend dans quel état il est revenu de cette expédition, comment est ce que ça peut lui passer par la tête et non seulement au moment du retour? Mais pendant des mois et des mois, c'est 7. Drame, ce drame qui le hante, qui les empêche de dormir. Qu'il déprime vraiment. Il est profondément déprimé après cette histoire. Alors, quel mystère fait que il finit par avoir envie d'y retourner?

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C'est étonnant parce que moi, je comptais un peu sur vous pour m'expliquer le mystère.

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Mais si vous vous même, c'est une interrogation, disons que si j'avais une réponse toute faite à ce mystère là, je serais pas en train d'éditer des livres et à m'intéresser à ces histoires depuis des années.

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Alors, toujours toujours à ce moment du retour, c'est ce point auquel nous étions arrivés. Lui, il est tombé en pleine dépression. En vérité, il y a aussi la rumeur, c'est à dire que le petit monde de l'alpinisme bruisse de rumeurs. Il était jeune. L'autre était plus expérimenté. C'est le plus expérimenté des deux qui est parti. Et que dit la rumeur?

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Alors? Moi, je me méfie toujours du mot rumeur. C'est la rumeur. C'est ce qu'on en reçoit, en fait. Et dans le cas de Jean-Christophe Lafaille, ce qu'il appelle rumeur, effectivement, dans son livre, c'est ce qu'il perçoit de ce qui est dit et ce qu'il perçoit. Ce qui est dit, c'est en fait. Culpabilités, c'est une façon de donner plus ou moins d'importance à des choses qui ont été dites pensées, dites à moitié, pensées à moitié.

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Et c'est quoi cette chose là? C'est que lui, il est le plus jeune et il est parti avec quelqu'un d'expérimenter. Et finalement, c'est pas lui qui aurait dû revenir.

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Et ça, si la logique avait été respectée là, c'est qu'il doit y rester le plus expérimenté qui s'en sort. Ça, c'est bon. On peut pas faire de façon plus évidente l'expression de sa culpabilité. Je suis passu, celui qui aurait dû revenir.

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Et la rumeur, c'est aussi que Pierre Bégin était un email à iste très expérimenté. Et quand on dit ma liste, alors c'est pas forcément très évident pour tout le monde de comprendre ce qu'il y a derrière ce mot. C'est la transposition à un massif où les montagnes sont plus hautes, l'Himalaya d'une pratique qui s'appelle l'alpinisme chez nous.

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Mais c'est aussi des montagnes où, généralement, la difficulté est moindre que ce qui se fait dans les Alpes. C'est là qu'on est bon. Plus généralement, on va sur des sommets moins techniques, des voies moins techniques. Mais en revanche, il y a un ennemi invisible, c'est la météo, non? Avant la météo, avant la météo, ça s'appelle l'hypoxie. Quand on monte à l'hypoxie, le manque d'oxygène et quand on monte à 1000 mètres, l'ennemi numéro 1, c'est pas le mauvais temps.

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Ce n'est pas la difficulté technique, c'est l'hypoxie. Voilà donc l'expérience d'un Himalaya. La capacité à affronter l'hypoxie et donc à comprendre ce qui se passe dans son corps quand on est dans cet état incroyable de déficit d'oxygène.

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Un mot, donc, sur cette absence incroyable de préparation. Ce sont deux hommes qui n'ont pas vraiment le même profil. Vous êtes d'accord avec moi, ce ne sont pas le même genre. Vous vous êtes un alpiniste des Alpes, vous aussi, comme Jean-Christophe Lafaille au départ.

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Mais vous attend sur l'absence de préparation. C'est à dire? Ils n'ont jamais grimpé ensemble. Alors on se dit que pour faire un duo comme ça, il faut s'habituer à compter l'un sur l'autre et vérifier que l'autre est capable d'assurer sa propre sécurité. A aucun moment, ils ne vont tous les deux quelque part dans les Alpes. Sur un truc vertical, essayez de faire quelque chose ensemble. Évidemment, pour le néophyte, ça surprend.

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Ils sont tellement expérimentés, chacun dans leur domaine, que finalement, il n'y a pas qu'ils peuvent s'en passer. Et Christophe Pierre Bégin, qui a fait avec Christophe Profit l'année précédente le K2. Il avait été grimpé une fois ensemble. C'est encore une fois dans le massif du Mont-Blanc et ça ne l'aura pas empêché de faire une magnifique ascension qui s'est bien terminée. Ils sont venus. On a affaire à des gens qui ont une telle expérience.

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Ils se règlent au quart de tour, mais en même temps, ce que j'entends là danser, c'est aussi que dans l'aventure, il y a l'aventure. C'est à dire que ce n'est pas le lancement d'une fusée, ce n'est pas. Ce n'est pas une affaire de technologie. Il reste une part d'aléa. Il cherche à aller le chercher. Si, si, c'était évident et tout cuit, il irait pas.

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Est ce que la faille était prêt pour l'Himalaya?

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Personne ne peut savoir s'il est prêt pour l'Himalaya. Là, il pouvait pas être mieux préparé en ayant la carrière alpine qu'il avait faite jusque là. C'est beaucoup de solos, beaucoup de ascensions très techniques, très engagée, comme on dit, c'est à dire des ascensions où il y a une part de risques et de d'alésage, justement, et qui est déjà très importante. Et donc, il était aussi bien préparé qu'il le pouvait. Et ensuite, il y a toujours une première fois et les premières fois dans l'Himalaya, il y a beaucoup de cas où elles sont victorieuses.

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Rude, rude, rude. Mercenaire. A été un des très, très grands Himalaya, sa première expédition, et il est revenu seul. Son frère est mort et il a continué alors le choix de la voie directe.

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Là, c'est le désavantage du temps qui passe puisque au fond, dans les années 50, Herzog et Lachenal, ça ne s'est jamais fait. Ils sont les premiers. Peu importe la voie qu'ils prennent, ils sont les premiers. Et puis, quand on arrive en 1992, il est passé pendant 40 ans, tout un tas de personnes. Et donc, qu'est ce qu'on cherche pas à faire ce que les autres n'ont jamais fait et donc la voie directe.

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L'alpinisme, c'est une activité créative. Il y a des gens qui disent que c'est un sport. Moi, je n'y crois pas, c'est certain. C'est une activité artistique. C'est une activité qui consiste à tracer des voies sur des montagnes dans par l'imagination et ensuite aller y laisser sa marque en gravissant jusqu'au sommet, si possible. Et si il n'y avait pas cette inventivité, cette créativité, l'alpinisme n'existerait pas. Ça a toujours été ça, l'alpinisme. Donc, une fois que les sommets sont gravi, on cherche un autre jeu.

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Et une fois que toutes les voies de tous les sommets ont été gravi, on cherche une autre façon de descendre et on réinvente sans arrêt. Donc, à l'Annapurna, on voit à chaque époque des alpinistes essayer de trouver ce qui n'a jamais été fait et de faire ce qui est de réaliser eux mêmes ce que leurs prédécesseurs n'ont pas réussi à faire.

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Ils partent sans radio. On se dit ce qu'ils étaient à 25 grammes ou 30 grammes. Qu'est ce que ça aurait changé? Parce que je ne me rends pas compte. On a une radio dans les Alpes, on appelle au secours. Le peloton de gendarmerie de haute montagne vient avec un hélicoptère vous chercher dans l'Annapurna. On appelle au secours. Il y a quelqu'un qui vient. Il n'y a pas de secours possible dans ces voies là, au dessus d'une altitude qui est un petit peu variable.

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Cinq mille, cinq, six mille, cinq, l'hélico peuvent parfois monter si les conditions sont optimales. Se poser quasiment pas. C'est tellement aléatoire qu'on ne peut pas. On sait qu'on ne peut pas compter sur des secours quand on part. Il y a plusieurs cas de figure que je raconte dans mon livre, notamment celui de Stéphane Benoît et Yannick Graziani, qui ont fini par réaliser cette voie.

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Plus de vingt deux Français ont fini de Catalogne le temps que je me souvienne de deux histoires. Mais les deux Français réussissent le pari que n'ont pas réussi à former, eux, un téléphone satellite qui leur a été utile.

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Donc, pas une radio, mais un téléphone satellite qui est aujourd'hui pratiquement tous les alpinistes qui vont en Himalaya ont tous un téléphone satellite et il se trouve qu'ils ont réussi à descendre un très, très limite. L'un d'eux était à la limite de l'épuisement et grâce au téléphone satellite, ils ont pu appeler l'hélico qui est venu les Troyer à 5 000 5, je crois. Mais une fois qu'il est arrivé au pied de la paroi dans la paroi, c'est clair qu'il y avait rien à faire et qu'à l'époque, en tout cas, en 92, il aurait pu appeler tout ce qu'il voulait.

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Jean-Christophe aurait pu appeler les Slovènes au pied de la voie. Peut être qu'ils serait un peu monté un tout petit peu à ça en compte, mais ils ne seraient pas venus le chercher. Il n'aurait pas possible. On ne va pas risquer sa propre peau pour sauver une peau.

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Alors, oui ou non?

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Bien sûr, il n'y aurait pas de PGHM. Il n'aurait pas de secours en montagne s'il n'y avait pas des gens prêts à risquer leur vie pour sauver des vies dans l'Himalaya.

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Il y a des expéditions parce que ce sont des expéditions coûteuses programmées. Est ce que Animalistes est capable d'abandonner son expédition pour aller sauver un bonhomme?

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Ça s'est produit pas plus tard que cet hiver. Nanga Parbat. Tout. Il y a deux grimpeurs polonais qui sont venus au secours d'une Française, Elisabeth Volle, qui était en perdition sur cette montagne, qui ont abandonné leur ascension, mais qui avaient cette Hazard extraordinaire qui était déjà acclimatés. Parce qu'en fait, pour pouvoir aller au secours de quelqu'un en Himalaya, il faut être acclimatée, sinon on ne peut pas monter. Donc là, il se trouve que, par hasard extraordinaire, ils ont pu se porter au secours de cette jeune femme.

[00:35:56]

C'est rarissime. La plupart du temps, on ne peut rien. Les gens qui vont en Himalaya en style alpin, comme le faisaient Lafaille et Bégin, comme l'ont fait Graziani et Benoît, comme le font les alpinistes de très haut niveau, les alpinistes de pointe, ce style alpin, cette approche très légère où on s'engage de façon sans corde fixe, sans tentes, sans oxygène, on sait qu'on ne peut compter que sur soi même.

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Charlie Buffet, la redescente. Il y a ce moment où la faille dit. Calculer ses chances de survie ne sert à rien parce qu'en vérité, elles sont proches de zéro.

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Je pense qu'il a traversé tout un long moment où il ne voyait pas d'avenir, où il est resté complètement transi, paralysé, incapable de bouger.

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Et à partir du moment où il a fait le premier geste. Il avait un avenir, mais qui était vraiment très, très étroit, tout petit.

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C'est quelqu'un qui avait une puissance mentale particulière.

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Les gens qu'il connaissait à cette époque ont découvert à ce moment là cette force de volonté extraordinaire. On ne peut pas savoir avant de traverser ces épreuves là. Personne ne peut savoir si oui, comment il réagira dans ces circonstances.

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Faire une journée de dépression sur une paroi roulée dans sa toile de tente alors qu'on n'a pas pu monter sa tente qui fait moins 20 la nuit, qu'on était épuisé et qu'on n'a plus rien à bouffer. Pas de Matthäus pour descendre, qu'on voit des types à 2000 mètres en dessous et qu'on ne peut même pas leur faire signe pour qu'ils viennent porter secours. C'est une expérience humaine unique.

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Oui, mais on n'observe que dans ces cas là. Il n'y a qu'une chose qui s'appelle l'instant l'instinct de survie et qui est d'une puissance extraordinaire celle qui est capable de tirer des individus, de lui tirer des ressources totalement insoupçonnées. Moi, il y a quelque chose qui me. Un mystère qui me m'étonne encore plus, c'est qu'il y soit retourné et que pour lui, cette histoire avec l'Annapurna s'achève finalement dix ans plus tard, quand il gravit le sommet de l'Annapurna avec un autre compagnon et qu'il arrive à trouver ce qui, pour lui, est la seule fin possible de cette histoire.

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Le corps de Pierre Bégin n'a jamais retrouvé. On l'a jamais retrouvé. Il y a une plaque à son nom au camp de base. Il est probablement dans une crevasse du glacier en train de descendre le glacier des Corps.

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De temps en temps tue, comme il le fait dans les Alpes des glaciers.

[00:38:34]

Alors sait que la langue glaciaire, la langue terminale, est un endroit peu fréquenté.

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Donc, pas de chance qu'on le retrouve un jour. On ne le cherche pas dans ce cas là, c'est à dire que l'on considère qu'on ne va pas investir du temps et des moyens pour retrouver un corps.

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Ce serait vraiment chercher une aiguille dans une botte de foin.

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Vous me disiez il y a encore sur l'Annapurna aujourd'hui, des traces de leur passage à tous les deux.

[00:39:01]

Alors pour moi, c'est une très, très belle fin à cette histoire. C'est un peu celle que je lui ai trouvé dans mon livre. Je raconte. J'ai pris soin de raconter par le menu une ascension extraordinaire qui a été faite par deux Français, Stéphane Benoît et Yannick Graziani, qui ont fini cette voie. Cette voie bégin la faille dans des conditions.

[00:39:23]

Enseignons qu'elle a désormais dans le monde de l'alpinisme.

[00:39:27]

C'est le nom qui s'est établi. Voilà, on ne sait jamais très bien pourquoi, mais c'est l'ISU caressés.

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Finalement, il y a des Australiens qui disent Je vais faire le voyage. Le monde entier dit il n'y a pas grand monde qui dit je vais la faire, ce qu'ils disent comme ça. Voilà donc Graziani et Benoît ont réussi à aller au bout de cette voie de façon très élégante, avec ce même style alpin, c'est à dire un duo avec une petite tente pour la nuit, une corde juste qu'il faut pour aller et revenir. Sauf que allez y revenir sur une telle paroi avec l'hypoxie, avec la difficulté de l'altitude.

[00:40:06]

C'est quelque chose de très, très engagé, comme on dit, et ils s'en sont tirés de justesse. J'ai tenu à raconter cette histoire de façon très détaillée parce que pour moi, était c'était une très belle fin. Et le plus extraordinaire dans cette fin, c'est que Yannick m'a raconté que pendant qu'il grimpait à un moment donné, il a vu un truc et il s'est dit Tiens, ça, l'APSA a pas vraiment imprimé. On est atteint, un peu bizarre quand on grimpe à cette altitude.

[00:40:36]

Et puis, longtemps après, il y a pensé. Mais ce que j'ai vu, c'est un frêne. Le frêne, c'est l'ancrage qu'avait laissé Bégin et la feuille. Mais c'est ça que j'ai vu. Et il s'est souvenu qu'à ce moment là, son compagnon Stéphane Benoit avait pris une photo. Il a été regardé la photo, il a zoom sur la photo et effectivement, sur la photo, on voit le frêne, un frêne, de laisser. Pierre Bégin et Jean-Christophe Lafaille au début de leur descente.

[00:41:01]

Forcément, au début, regardez la photo. Dans votre livre et la photo et dans le livre avec le zoom, on le voit très, très bien.

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Je me disais après, après avoir écrit cette histoire, que les alpinistes, finalement, sont des héros peu célébrés dans notre pays parce qu'on célèbre évidemment les footballeurs beaucoup. On célèbre pas mal les marins, les alpinistes assez peu.

[00:41:24]

Oui, c'est troublant. Moi, je ne sais pas ce que c'est qu'un héros. Il y a des tas de mots qu'on accole à l'alpinisme. On dit vaincront, dit conquête. On dit on dit que c'est un sport. On dit le vertige. On ramène souvent à des mots qu'on connaît et qui sont souvent du vocabulaire guerrier des gens qui ont réalisé des exploits.

[00:41:42]

Ce qu'a fait Jean-Christophe Lafaille, c'est un exploit sur le plan humain.

[00:41:45]

C'est évidemment un exploit de survie. C'est extraordinaire. C'est unique.

[00:41:51]

Mais il n'a pas de statut quelque part à la gloire de Jean-Christophe Lafaille. Il mériterait. Oui, mais qu'est ce que c'est que les statues, les? Qu'est ce que c'est que les héros qu'on glorifie? Ça, c'est un autre mystère, n'appartient pas au monde de l'alpinisme.

[00:42:07]

Mais mon ami Herzog, c'est à dire que, par exemple, vous et moi, on est en gros de la même génération. On a grandi dans le mythe de Maurice Herzog, oui, et Maurice Herzog.

[00:42:17]

Il a installé très durablement une histoire de l'alpinisme qui est une histoire guerrière, de conquête, de victoires. Et c'est pas ça les sort que les alpinistes. Et c'est ça qu'on a du mal à faire passer. Quand on adore ça, c'est que c'est une histoire de passion et de bonheur. Quand on va en montagne, ce n'est pas pour se faire mal, c'est pas pour souffrir, c'est pas sûr pour survivre, c'est pour le bonheur d'être là haut.

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