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Asservissent présente Eloge de la pose. Aujourd'hui, je suis avec Jean, heureux propriétaire d'une Peugeot et heureux. Il peut l'être. Jean fêtent leur anniversaire. Cinq ans sur la route, sans accroc. Heureux, car ils ont encore de belles années devant eux. Parce qu'en passant, faire une pause chez Peugeot Service avant de partir, Jean a profité d'une révision à 99 euros pour les véhicules de plus de quatre ans et d'un an d'assistance offert. Si ça, c'est pas un beau cadeau d'anniversaire, prenez rendez vous.

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Je préfère d'inconditionnels ligne. La fréquence jusqu'à sandalettes, une étonnante histoire. Aujourd'hui, l'histoire d'un gardien de la paix qui est le grade le plus bas de la police nationale, qui résout une affaire criminelle sur laquelle, pendant quatre ans, tous les officiers se sont cassé les dents. Cette histoire, c'est la vôtre. Philippe Savelli Bonjour, bonjour. Vous l'avez raconté dans un livre publié aux éditions Mahia, Mon combat pour la vérité. C'est une affaire qui remonte aux années 80, alors je suppose que vous avez attendu la retraite pour la raconter tranquillement.

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C'est ça, c'est ça? Tout à fait. La retraite en 2009.

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L'histoire d'un violeur en série qui sévit pendant quatre ans dans le quartier de la Villeneuve, à Grenoble, en toute impunité. Jusqu'à ce que le patron vous nomme envers et contre tous dans cette enquête que vous allez résoudre. Alors, évidemment, c'est toujours le cas. Je vous rassure, sur toutes les histoires personnelles que je raconte ici, je n'ai pas eu d'autre choix que de vous croire entièrement. J'ai donc respecté votre récit presque à la lettre, même si chacun va pouvoir sans s'en rendre compte dans un instant.

[00:01:37]

Cette histoire est véritablement incroyable. La voici. Je l'ai écrite avec Christophe du Mazères laréalisation et de Céline Brave. Christophe Hondelatte. Tiens, je vous pose le dossier sur la table. C'est une affaire de violeur en série. A ce stade, elle n'est pas résolue. On est en 1987. Depuis 4 ans, depuis janvier 83, 20 gamines âgés de 8 à 15 ans ont été violées les unes après les autres dans la même cité, à la Villeneuve, au sud de Grenoble.

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Elles ont toutes décrit le même homme, le même mode opératoire, Abran, avec des lunettes noires qui se baladent avec un colis sous le bras pour faire croire qu'il est livreur. Vingt fois, il les a coincés dans la cage d'escalier. On aurait dû l'arrêter. Enfin, un type, toujours le même, qui sévit au même endroit, qui s'en prend au même genre de fillettes à la même heure. Comment se fait il qu'il est dans la nature, bordel?

[00:02:45]

Où ça a merdé? Qui a merdé?

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En tout cas, ça a merdé et au bout de quatre ans et demi, le patron de la police de Grenoble, le commissaire Nadjari, convoque tous les limiers qui travaillent sur le dossier et notamment les inspecteurs de la brigade des mœurs. Ce sont eux qui ont l'enquête, mais il fait aussi venir un intrus, un gardien de la paix, un simple gardien de la paix, Philippe Savelli. Qu'est ce qui fait la suite là? Messieurs, j'ai demandé à l'agent de police judiciaire adjoint Philippe Savini de se joindre à nous dans ce dossier.

[00:03:24]

Je l'ai affecté au poste de police de la Villeneuve. Ce sera sa mission unique et dans cette enquête, il fera fonction d'inspecteur de police entendu. Et je demande évidemment à la brigade des mœurs de collaborer avec lui.

[00:03:36]

OK. La tronche des officiers présents, Savelli à la tête d'une enquête criminelle, mais enfin, Savelli Pinot, simple flic, c'est un policier en tenue, c'est un gardien de la paix. C'est le grade le plus bas de la police. Un type qui fait des patrouilles, quoi. Qui arrête des petits voleurs? Savelli? Oui, mais le patron a repéré qu'il avait du flair. Il a débrouillaient deux, trois petites affaires récemment. C'est un bon salaire.

[00:04:17]

Cela dit, en lui confiant cette enquête qui ne lui fait pas un cadeau, un jour, Philippe passe dans le couloir et il surprend une conversation entre un inspecteur. Ce n'est pas ce petit merdeux qui va nous apprendre à faire notre boulot, non mais. Il a déjà compris que les autres, les officiers, les inspecteurs sont tellement jaloux qu'il ne peut pas compter sur eux. Sur ce coup là, il sera seul et pourvu qu'ils ne lui compliquent pas la tâche.

[00:04:54]

Ce qui motive Philippe Savelli dans cette enquête? Les victimes, les 20 gamines. Ce qu'elles ont vécu, ça nous bouleverse en vérité. Et d'ailleurs, il va en avoir une la dernière. Une fillette de 12 ans qui a été violée dans la cage d'escalier de son immeuble, au niveau du onzième étage. Elle a tellement saigné au niveau du sexe que du sang a coulé sur le sol et qu'il a marché dedans. On a donc l'empreinte du violeur dans le sang de la gamine.

[00:05:31]

Et donc, Philippe va la voir chez elle et c'est assez touchant parce qu il appréhende un peu. Il a peur de craquer, il a peur de pas savoir lui parler, de ne pas poser les bonnes questions. Il débute, mais assez vite. Une sorte de confiance s'installe entre elle et lui. Raconte moi comment ça s'est passé, comment tu l'as rencontré, ce monsieur? Il est monté avec moi dans l'ascenseur. Il m'a dit qu'il devait livrer un colis, qu'il avait un carton marron sous le bras.

[00:06:00]

Il m'a demandé de lui montrer le 12e étage, là où habite la dame. Pour le colis. Mais ce n'était pas au deuxième, c'était onzième. Alors on est redescendu dans l'escalier. Puis, il a sorti un couteau crochu comme une serpette et il m'a dit Je suis poursuivi par la police. Il m'a demandé de me mettre toute nue, puis de baisser son pantalon. Il m'a mis un tricot autour des yeux. Il m'a fait asseoir sur lui.

[00:06:29]

C'était quelque chose de très dur. Du sang a coulé entre. Philippe Savelli a lu le dossier d'enquête et il a un plan tout simple. C'est à se demander comment personne n'a eu l'idée jusqu'ici.

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Le violeur frappe toujours dans le même quartier, à peu près à la même heure, et il se présente toujours comme un livreur de colis. Toutes les victimes disent qu'il avait un carton ficelé sous le bras. Son idée, la voilà toute simple s'installer sur le toit d'une tour et avec des jumelles, attendent qu'un type avec un colis se présente à l'horizon.

[00:07:35]

La planque commence. Seuls les autres lui ont dit. Non, mais tu te crois où tu crois? On n'a pas les moyens de mettre en place une telle surveillance. Faut arrêter le délire. Tant pis, il y va tout seul. Tous les jours, il va s'installer sur le toit d'un immeuble, seul, avec une arme de service, une radio et ses jumelles personnelles. Et ça dure, tenez vous bien cinq mois. Et pendant ce temps, d'autres viols sont commis.

[00:08:03]

Le patron, lui, met la pression. Et puis, un jour, à 14h30, il voit dans ses jumelles un type avec un petit carton sous le bras. Il tente d'appeler ses collègues à la rescousse des centrales.

[00:08:16]

Vous savez, les centrales à vous, il n'y a pas d'équipe disponible. Entre temps, le type en bas a disparu. Normalement, Philippe n'a pas le droit d'y aller seul. Tant pis, il y va. Il descend de son toit. Il arrive en bas de l'immeuble, mais trop tard. Il ne le retrouve pas. Premier loupé. C'est rageant quand même. Après cinq mois passés sur le toit. Un passe le 22 octobre. Philippe est en patrouille dans le quartier avec un collègue, un inspecteur principal et un stagiaire.

[00:08:57]

Ils vont dans le coin de la statue à deux têtes, un dédale d'allées, de passages d'entrée, d'immeuble. Et là, Philippe voit un type surgir de nulle part, qui porte un petit carton, qui a des lunettes noires et qui semble porter une perruque. Le portrait dessiné par toutes les victimes. Il se précipite vers son collègue. Il n'a pas ouvert la bouche que l'autre lui dit, goguenard. Je parie que tu as vu le violeur.

[00:09:29]

Il se fiche de savoir et cette fraction de seconde de déstabilisation suffit au suspect pour disparaître dans les dédales. Deuxième loupé. Cela dit, maintenant, il a vu sa tête, cet imprimé là dans sa caboche et en attendant de le recroiser, il fait coller des affiches un peu partout avec le signalement du violeur, genre Wanted.

[00:10:02]

Et en attendant, fini les plancke sur les toits. Maintenant, Philippe est capable de le reconnaître. Alors il se trouve que le poste de police municipale offre une assez jolie vue sur l'endroit où il l'a croisé l'autre jour.

[00:10:15]

La statue à deux têtes. Cette fois, ils seront en binôme. Le 27 octobre, à 13 heures, Philippe prend son tour de garde avec Martine, une inspectrice qui ne le portent pas vraiment dans son cœur. A 14h45, Philippe voit un homme en sweat gris avec des cheveux courts, grisonnants, sans lunettes de soleil, assis sur la butte, juste en face. Le type paraît plus vieux que celui qu'il a vu l'autre jour, mais il porte un petit carton.

[00:10:43]

Alors, il va prévenir sa collègue puisqu'il faut être deux minimum pour intervenir. C'est la règle. Et là, vous savez ce qu'elle lui dit.

[00:10:51]

Je vais pas avec toi. Enfin, tu vois des violeurs partout. Le type est là, à moins de 200 mètres. Elle le voit, il le voit tous. Abella, justement, on le voit plutôt. Tant pis pour le règlement. Philippe fonce tout seul. Il grimpe la colline. Il tombe nez à nez avec le type nez à nez. Que faire? Il crie Police, bougez plus, il le ceinture. Et là, leurs regards se croisent.

[00:11:17]

Et merde! Le type a les yeux bleus. Or, toutes les fillettes ont décrit des yeux marron. Evidemment, le gars s'engouffrent dans la brèche. Vous m'avez fait mal. Enfin, j'entends ma femme et mes deux enfants vous m'agresser. Ça ne va pas. Imaginez ce qui se passe à ce moment là dans la tête de Philippe depuis des mois, tous ses supérieurs, sauf le grand patron, se moquent de lui. Tu vois des violeurs partout.

[00:11:42]

Si c'est pas lui, ça va ruiner son enquête. Il est peut être en train de commettre une bavure. Alors, ils relâchent l'étreinte et le gars reprend de l'assurance Obbadi, dont je vais porter plainte pour agression.

[00:11:57]

Philippe se dit Je me suis trompé. Et là, d'un coup, le type se met à courir. Nom de Dieu. C'est bien lui. Alors il se met à courir derrière lui. Il court, il court. Mais dans l'herbe du parc, il glisse. Et puis, à un moment, ses jumelles se prennent dans une branche et manquent de l'étrangler. Et il le voit prendre l'avance. Alors il tire en l'air. Il espérait que ça allait l'arrêter.

[00:12:22]

Tu parles! Ça lui donne des ailes. Et là, il voit un vététiste police. Donnez moi votre vélo. Il rattrape son retard.

[00:12:30]

Le type se retrouve coincé contre un mur. Et là, il sort sa serpette de jardinier. L'arme qu'on décrit toutes les victimes. Philippe brandit son arme. On ne bouge plus. Il s'approche pour lui passer les menottes et l'autre se met sur le côté et se remet à courir. Et le gars disparaît dans le dédale des immeubles. Philippe le cherche comme un chien de chasse. Une vieille dame lui dit Je l'ai vu, il a couru vers le Belge.

[00:12:56]

Là bas, qu'arrivait il est monté dedans. C'est fini. Il l'a encore loupé et il est bien dans la merde parce qu'il a tiré quatre balles en plein jour, en plein centre ville. Il va falloir qu'il s'explique. C'est un cauchemar.

[00:13:16]

Heureusement, le patron le soutient toujours. Je vous couvre, mais ne me décevez pas parce que si vous n'y arrivais pas, je ne pourrai plus rien pour vous.

[00:13:34]

Alors, il enchaîne. Et pourtant, il est épuisé physiquement et moralement. Mais il a plus que jamais le visage du violeur gravé dans sa tête. Alors, il plonge dans le fichier Canonge, le fichier de tous les délinquants du coin, et il fait défiler les photos parues. Il ne le trouve pas. Tant pis, il continue.

[00:13:55]

Il va voir les commerçants de Villeneuve, le Boucher, le boulanger, le crémier, les bistrotier, les jardiniers et en début d'après midi, deux policiers municipaux viennent le voir. On a quelque chose pour toi, criméen, ça, cantonnier de la commune. Il a vu un joggeur dans le parc qui correspond au signalement de ton gars. Et d'ailleurs, il l'aurait déjà vu, ce gars là, dans un gymnase. Philippe va tout de suite voir le cantonnier.

[00:14:23]

On dit que vous avez vu un type qui correspond au signalement. Ah ouais, ouais, ce gars là, vous voyez, je crois bien qu'il va à la salle de gym Colbert au centre ville, le croiser là bas il y a deux ans, la trentaine, les tempes grisonnantes, les yeux bleu clair.

[00:14:42]

La salle de gym Colbert Philippe s'y pointe dès le lendemain matin et par chance, le gérant est un homme organisé. Il a une fiche pour chacun de ses clients avec une photo. Philippe fait défiler une par une. Albert Arnaud Bitkom comme Bernard Berthier. Et puis soudain, un flash. Son regard se bloque sur une photo. C'est lui, c'est lui. Daniel Bony, jeune, 29 ans, mécanicien résidant à Échirolles. C'est lui. Il habite à deux pas de Villeneuve.

[00:15:14]

Il le tient.

[00:15:21]

Il fonce l'annoncer aux patrons. Et là, c'est la douche froide. Bravo Savelli, vous avez fait un excellent travail, mais maintenant vous devez laisser faire. La brigade des mœurs, vous leur remettez votre fiche.

[00:15:33]

OK. Frustration, énorme frustration. L'enquête est reprise par ceux qui, depuis le début, sabotent son enquête, par ceux qui se moquent de lui et les gars de la brigade des mœurs, décide de montrer la photo aux victimes. Et ça, Philippe, ça lui plaît. Pas du tout. Une photo noir et blanc des gamines qui ont, pour certaines, été agressées il y a cinq ans. Elles ne le reconnaîtront pas. Il le dit à ses collègues.

[00:16:03]

Leur réponse cinglante. Tu fais chier, putain, reste à ta place, on sait ce qu'on fait, qu'on tentera de faire, ce qu'on te dit, et il convoque toutes les victimes lundi 14 heures, à l'hôtel de police. Vous devinez la suite? Le lundi en fin de journée, l'inspecteur de la Brigade Emergents vient voir Philippe. Ca, tu peux la garder, ta photo la mettra dans ta collection. Aucune fille n'a reconnu tenga. Aucune.

[00:16:31]

Philippe est anéanti parce qu'il est sûr que c'est lui. Il en est certain et là, un de ses collègues, un îlotiers en tenue comme lui, vient le voir. Écoute Philippe! Moi comme toi, je suis convaincu que c'est lui le mec qui va continuer. Alors oui, tu seras coupable de n'avoir rien tenté. Va l'interpellé, tu risque quoi? Allez, tiens, je vais avec toi. Et ils vont sur son lieu de travail, dans le garage où ils travaillent et le type leur dit.

[00:17:10]

C'est pourquoi. Quel aplomb suffit les conneries! Vous êtes en état d'arrestation?

[00:17:22]

Ils le menottent et maintenant, il faut attendre qu'on veuille bien lui envoyer une voiture de police, direction le quatrième étage du commissariat.

[00:17:31]

Le patron, qui est corse comme lui, est triomphant. Bien, vous voyez, c'est un Corse qui a résolu cette affaire. Je l'avais parié. L'interrogatoire commence, mené par le patron. Qu'est ce que vous faisiez dans le parc Badigeonne jeunes et pourquoi vous vous êtes enfui? J'étais allé voir ma maîtresse. J'ai eu peur que ma femme prenne. Vous pouvez nous donner son nom. Pas non, je ne veux pas qu'elle ait des ennuis. Les heures passent et toujours rien de probant, même si le gars se perd de plus en plus dans ces contradictions et là dans son coin.

[00:18:08]

Savelli se rappelle que l'une des victimes a décrit une longue cicatrice à l'intérieur de la jambe droite. Il glisse l'info au patron, qui s'en empare immédiatement. Monis Jamais baissé votre pantalon? Il s'exécute. Il a une longue balafre sur la jambe droite. Il y a plus de doute là. Autant vous dire que dans le bureau, les inspecteurs sont dans leurs petits souliers.

[00:18:37]

Dans la foulée, Philippe et un officier des meurtres vont perquisitionner chez lui à Échirolles. Avec lui, il tombe sur sa fille dix ans, son petit frère, 8 ans et sa mère qui éclate en sanglots. Vous devez faire une erreur, mais dis moi Daniel, tu fais quoi? Mais rien istro pas. Je te promets, je n'ai rien fait. Rien fait dans son placard à chaussures, Philippe met la main sur des baskets. Il reconnaît immédiatement la semelle qui colle parfaitement avec l'empreinte de Pas dans le sang.

[00:19:14]

Et puis, dans la chambre des enfants, il trouve une perruque brune. Il est cuit. De retour au commissariat. Bon, IGEN continue de nier en bloc et on organise un tapis SAJE. Toutes les petites victimes sont convoquées, placées derrière un miroir sans tain et on leur présente bon IGEN au milieu de flics qui lui ressemblent toutes. Elles disent. Celui là, c'est lui. Elle l'identifient toutes sans aucune hésitation et donc dans la foulée. Bonne hygiène à vous!

[00:20:00]

Trois ans plus tard, en octobre 1990, Daniel Bony Hygiène comparaît devant la cour d'assises de l'Isère, à Grenoble. Dans la salle, il y a sept de ses victimes. Les autres n'ont pas eu le courage de l'affronter. Les experts psychiatres le décrivent comme immature, mais pleinement conscient de la gravité de ses actes. Et ils sont deux à dire que s'il sort de prison, il recommencera.

[00:20:32]

Et donc, Danielle Boni, jeune, est lourdement condamné à 18 ans de réclusion criminelle. Mais l'histoire ne s'arrête pas là parce qu'à la faveur de remises de peine, il sort en 2001. Et il récidive. Trois ans plus tard, il viole de jeunes garçons, puis une jeune fille. Il est de nouveau arrêté et condamné fin 2008 à vingt ans de réclusion criminelle. Quant à Philippe Savelli, il va terminer sa carrière comme simple gardien de la paix à l'unité de vol à la tire.

[00:21:09]

Le patron lui avait promis une promotion, mais pour avoir eu raison contre sa hiérarchie. Son dossier est resté marqué d'une croix rouge. Il écrit Le Joker a réussi son enquête. Là où tous les autres avaient échoué. Mais c'est un joker. C'est une carte que l'on retourne et que l'on n'oublie.

[00:21:34]

Je suis donc avec Philippe Savelli, auteur de ce livre publié aux éditions Mahia Mon combat pour la vérité, alors est ce que vous le savez si bonne hygiène et toujours en prison vous garde? Il veut le garder à l'œil. Il est toujours en prison parce que là, il est conditionné. Oui, il a été condamné à 20 ans en 2008. En 2018, à mi peine, il est conditionné au minimum. Et s'il sort, vous serez tenu au courant.

[00:22:00]

Je pense pas. Non? Non, probablement pas.

[00:22:02]

D'ailleurs, ça, c'est un truc. On le dit jamais. Mais les policiers qui font les enquêtes ont rarement des nouvelles, des dégâts qu'ils ont fait condamner. Pratiquement jamais, pratiquement jamais. Alors je vais vous dire les choses comme je le sens et de toute façon, des tas de gens ont dû vous dire ça. On a du mal à la croire. Votre histoire, parce qu'elle est tellement énorme.

[00:22:20]

Elle est si énorme, cette histoire que j'ai eu du mal. J'ai mis énormément de mal à l'écrire. J'ai même mis des années à l'écrire. Et puis arrive à la retraite. Je me suis dit c'est pas possible, c'est pas possible que cette histoire reste dans les oubliettes. Je me suis dit cette histoire, il faut la révéler pour diverses raisons, mais il ne fallait pas qu'elle reste dans les oubliettes.

[00:22:40]

C'est au fond si on veut élargir au maximum le spectre. C'est l'histoire de la police qui résiste à la police. C'est la guerre des polices. Mais dans le même commissariats, à quoi c'est exactement ça? C'est la guerre des polices, avec avec une grosse partie et une toute petite partie, comme l'explique dans mon livre, c'est un peu David Golias. Alors, je voudrais bien qu'on revienne au début, au moment où le patron, le commissaire Nadjari, se tourne vers vous dans cette enquête.

[00:23:09]

Est ce que le fait qu'il vous fasse confiance tient au fait que vous soyez corse tous les deux? Et seulement ça?

[00:23:14]

Non, absolument pas. Je ne pense pas, raconte un peu. Oui, je pense que ça compte un peu parce qu'il s'en est. Il l'a proclamé, il l'a proclamé à plusieurs reprises, mais je pense qu'il m'a fait venir, surtout parce que j'avais élucidé une affaire, une importante affaire de stups, alors que je portais la tenue. Et donc, de là, il a fait appel à moi en me détachant la sûreté urbaine en tant que civil faisant fonction d'inspecteur.

[00:23:39]

Mais est ce qu'il joue un peu avec vous sur ce coup là? Parce que pour vous récompenser de l'affaire que vous venez de résoudre, il y a mille autres moyens et notamment pour vous faire gagner un grade et vous orienter lentement, année après année, vers la police judiciaire. C'est parfaitement faisable? Tout à fait, mais ça, je m'en rends compte bien. À la fin de cette affaire, je me rends compte. En fait, il a joué avec moi, mais il n'est pas le seul à avoir joué plus.

[00:24:01]

J'ai fait l'objet d'un pari, comme je l'explique dans mon livre. À la fin, il me présente une enveloppe avec un billet de Pascal aux anciens francs en anciens francs. Pascal C.

[00:24:11]

S'emballe 50, 50, 50 balles et vendredi en un an. Mais vous inquiétez pas, monsieur Savelli, c'est uniquement l'objet d'un pari. J'avais fait le pari avec tous les collègues de la Sûreté, de la brigade des mœurs, de la brigade des mineurs que vous réussirez à interpeller cet individu. Au fond, il vous met dans les pattes de la brigade des mœurs pour les faire suer. Quoi?

[00:24:32]

Peut être pour les faire avancer un peu plus vite, pour les faire travailler un peu plus. Toujours est il que moi, je suis sur cette affaire et que je m'y mets sérieusement.

[00:24:42]

Il vous prévient que ça va être dur avec les autres ou où il oublie de vous le dire? Absolument pas. Absolument pas. Ça, on n'en parle absolument pas au départ. Je me souviens de cette première réunion, ce premier briefing qu'en fait, dans un bureau au quatrième étage, où il y a tous les hauts gradés des mœurs, les gradés des démineurs, les gradés de la fameuse àl'époque brigade criminelle.

[00:25:04]

Faut dire d'ailleurs au passage, j'en profite pour dire que tous ces gens là ont changé de nom, c'est à dire quand des inspecteurs ont dit lieutenant et capitaine, ont dit les brigade des mœurs. Ça s'appelle maintenant la brigade des familles. Donc, tout ça a changé de nom. Il y a un côté vintage dans cette histoire qui est ce qui est assez marrant, reprenant à cette réunion.

[00:25:20]

Dans cette réunion, tout le monde aimait son avis. Tout le monde dit un peu comment il voit les choses. Et ça se termine que le commissaire principal se tourne vers moi. Et il me dit Vous en pensez quoi de cette affaire? J'ai étudié évidemment le dossier et le dossier quand même. Oui, tout à fait. Oui, car il m'a amené sur cette affaire. J'avais, j'avais accès au dossier et donc j'ai étudié tout le dossier. Toutes les auditions des gamines qui avaient été violées précédemment et donc j'ai donné mon avis et qui me semblait une évidence.

[00:25:52]

Ça me semblait tellement évident que je n'osais même pas donner cet avis en disant écoutez franchement ce gars, on connait le mode opératoire commander le modus operandi. Il serait simple de mettre une avant de se planquer sous les toits et surveiller le parc avec une paire de jumelles.

[00:26:11]

Mais quand, quand? Quand les collègues des meurtres vous disent enfin Philippe, on n'a pas les moyens de planquer pendant des mois et des mois au sommet d'une tour. Ils n'ont pas totalement tort. C'est à dire que ça suppose un investissement personnel qui n'est pas forcément à la portée d'un service. Peut être que c'est à la portée d'un homme, en vérité, mais dans le service, c'est beaucoup plus compliqué. Alors, je ne suis pas d'accord. Je ne suis pas d'accord.

[00:26:33]

Cette proposition, je joue et il y a un seul collègue qui me répond et qui c'était un responsable de la brigade des mœurs. Ce qui me lire, on est pas en Amérique, on n'a pas les moyens de travailler comme ça. Si vous n'avez pas les moyens, je suis capable de le faire et vous êtes à plein temps là dessus. Non, non, je ne suis pas l'intendant. Non, pas que ça. Non, je suis affecté dans un bureau de police.

[00:26:57]

Mon travail est de faire des dossiers deux ministère public, de recevoir des gens sur des plaintes, de prendre des plaintes et j'ai d'autres dossiers à faire. Mais le commissaire principal me demande principalement de bosser sur cette affaire, alors que quand on dit que vous y passer 5 ans, c'est quand même pas de 8h du matin à 20 heures le soir. De toute façon, il n'opère qu'en fin d'après midi. C'est ça, cet homme là, c'est ça.

[00:27:20]

Dans le milieu d'après midi, en fin d'après midi, je je calcule et je fais mes recherches dans les horaires que je connais, dans les horaires où il a déjà violé pendant cinq mois.

[00:27:31]

Vous montez vraiment sur ce toit tous les après midi, vous coucher, vous mettez vous vous équiper de vos jumelles et vous regarder à tous les jours, pas tous les jours. Il y a un côté aléatoire? Tout à fait. Et qu'est ce qu'on dit dans votre bureau de vous voir partir comme ça? Vous cailler sans doute en hiver.

[00:27:50]

Mais moi, quand, quand je fais ça, j'en discute une fois avec un inspecteur qui me dit de toute façon, on l'aura pas comme tu fais parce que moi, je leur fais le reproche quand même à tous ces inspecteurs. Excusez moi l'expression, mais de ne pas rester leur cul assis sur une chaise dans leur bureau. C'est pas comme ça qu'ils vont réussir à interpeller l'auteur des viols, mais d'être sur le terrain. Et moi, on me fait le reproche d'être trop souvent sur le terrain.

[00:28:13]

Alors voilà, j'ai choisi d'être toujours sur le terrain et effectivement, ça n'a pas été facile.

[00:28:18]

Il y a un moment qui est très touchant dans cette histoire. C'est le récit que vous faites de cette rencontre avec cette petite fille. Ça n'est quand même pas la première fois que vous entrez dans un moment d'une intensité humaine lourde. Vous avez travaillé à Police Secours, notamment précédemment. Chaque policier est même en tenue et confronté à des situations paroxystiques de détresse considérable. Mais il y a une appréhension à interroger cette petite fille. L'appréhension, c'est que cette petite fille à l'époque.

[00:28:54]

Elle a l'âge de ma fille. Non seulement elle a l'âge de ma fille, mais c'est une petite brune avec des yeux marron comme ma fille. Et quand je vois cette fille en face de moi, j'ai l'impression de voir ma fille. Vous faites un transfert? Tout à fait. Et alors, vous vous posé la question de comment je vais lui parler? Vous avez une fille du même âge? Vous savez parler aux filles de 12 ans.

[00:29:14]

Donc, si vous voulez, je lui pose des questions, mais c'est vraiment des questions. Je la laisse plutôt parler toute seule parce que vous n'avez pas été formé à ça. Aujourd'hui, il y a des formations pour interroger des mineurs violés. Ce sont tous les policiers ne font pas ça. Certains policiers ou gendarmes sont affectés spécifiquement à ce type d'interrogatoire. Mais vous, vous y allez avec ce que vous savez quoi?

[00:29:36]

J'y vais avec des sentiments, des intuitions qui font que jamais. C'est vrai que c'est très difficile de parler à une petite fille de cet âge là qui a subi cette agression.

[00:29:48]

Mais en fait, ça se passe bien. Ça se passe bien parce que je me rends compte que j'arrive à la mettre en confiance et je me rends compte que cette petite fille. Elle parle, elle parle et elle parle. Et quelque part, je sent. Je sent qu'elle est libérée quand ça la libère, quand elle parle tout au long de votre enquête.

[00:30:07]

Vos collègues vous disent Tu vois des violeurs partout et sans doute n'ont ils pas complètement tort. D'ailleurs, vous le reconnaissez à un moment dans le bouquin, vous dites c'est pas faux, ça devient obsessionnel.

[00:30:18]

Au bout d'un moment, ça devient obsessionnel. Mais c'est forcé parce que quand on a des éléments sur cette affaire, on a cette fameuse empreinte. Donc, il faut travailler en AXA au départ. Cette empreinte de basket est prise sur une tache de sang de la victime. Un jour, vous vous marchez et il y a un type qui marche avec des baskets devant vous. Il a marché dans l'eau, ce qui fait que ce n'est pas ça imprime sur le sol et vous dit que c'est lui.

[00:30:41]

Parce que vous connaissez l'empreinte de basket par cœur. Alors non, je ne dis pas c'est lui, mais il se peut que ce soit lui que effectivement, c'est l'empreinte. Et quand on interpelle cet individu et qu'on prend sa paire de baskets, il s'agit bien de la même empreinte et de la même marque avaient été identifiées à l'époque comme étant une paire de chaussures vendues dans une grande surface.

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Mais est ce que ça rov pas un peu fou, au fond, de travailler seul sur une telle enquête pendant des mois? Bien sûr, ça rend fou parce que quand j'ai fait cette première interpellation, j'ai dérangé ces messieurs qui restent dans leur bureau.

[00:31:17]

Je les ai dérangé, je les ai obligés à travailler, à faire une mise en garde à vue, à faire des auditions. Et ça, ça ne l'aura pas plus. Et comme ça ne leur a pas plu, forcément, le premier gage interpellé est d'ailleurs le seul. Je voyais des violeurs partout. C'est ce qui a été dit, mais c'est totalement faux et on voit que ça gangrène votre cerveau.

[00:31:38]

Parce que au moment où vous allez l'interpeller, ça va se terminer comme ça. Mais la troisième fois, vous le coincer. Et puis, vous voyez ses yeux. Ses yeux sont bleus. Toutes les gamines ont dit que les yeux étaient marron. Et là, vous avez le doute. Vous vous dites, mais ils ont peut être raison. Je deviens peut être complètement taré.

[00:31:54]

Exact, c'est exact. Non seulement je me mettre une pression telle que je commence à avoir des doutes, mais en plus, ces pov gamines qui sont agressés physiquement et qui voient un gars qui a une postiche avec des lunettes de soleil, imaginez vous. Elles ne peuvent pas dire très clairement que le gars des yeux bleus ou des yeux marron, l'histoire des yeux marron et les lunettes de soleil ont sélène lunettes de soleil. En fait, je me trouve avec un gars avec des yeux bleus et là et là, avec la que des officiers de police judiciaire.

[00:32:26]

Là, j'ai le doute et je le relâche.

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Alors, vous êtes à la retraite maintenant, est ce que vous estimez que vous n'avez pas eu la carrière? Que sans doute vous rêviez d'avoir de vrais. Il y a de la frustration, tout à fait, ça tient à quoi ça tient au fait que j'étais un gardien de la paix, un gardien de la paix qui a fait un travail qu'il n'aurait pas dû faire, d'après certains, qui a mis en évidence les carences de tout un service. Imaginez d'officiers de police judiciaire à l'époque, comme vous le dites inspecteur, inspecteur principal, inspecteur divisionnaire.

[00:33:05]

Maintenant, on appelle des lieutenants, des capitaines et des commandants. Imaginez ce gardien de la paix qui se trouve face à une telle administration. Un tel monstre, on va dire eh ben, qu'est ce qu'on fait en mai? Le gardien de la paix dans un placard et on l'oublie. Mais ça a duré 30 ans, ça a duré dans le placard. Ça a duré tout le reste. Non. Si vous voulez, quand je dis qu'on m'a mis dans un placard, c'est que j'étais à la Sûreté urbaine que je travaillais.

[00:33:31]

Je faisais fonction d'inspecteur, je faisais un travail de police judiciaire. Un travail d'enquête et on m'a remis dans la sécurité générale. Police, secours, dans les bagnoles qui patrouille. Voilà tout à fait. Est ce qu'une histoire pareille pourrait avoir lieu? Aujourd'hui. Je pense pas. Pourquoi? Ma fin de carrière, j'ai rencontré des jeunes officiers qui sortaient des écoles très compétents. Je n'ai pas vu la même mentalité.

[00:34:04]

J'ai l'impression que les générations ont changé, les générations ont évolué et il y a une certaine évolution, je dirais du côté des officiers de police judiciaire, mais les inspecteurs de l'époque et les lieutenants ou les capitaines d'aujourd'hui.

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Certains viennent du grade de gardien de la paix. Ça arrive encore aujourd'hui qu'on arrive à progresser dans la carrière jusqu'à devenir lieutenant. En ayant commencé gardien de la paix? Tout à fait.

[00:34:31]

C'est peut être ceux là qui sont le plus jaloux de ceux qui sont en bas et qui montrent leurs preuves, leurs qualités dans le travail. Vrai? Ouais, ouais, c'est cela. Peut être qu'ils sont le plus jaloux. Parce que, justement, ils ont été gardiens de la paix. Ils ont passé des concours. Ça les a obligés à se déplacer, à changer de vie à partir ailleurs.

[00:34:51]

Parce que c'est ça aussi. L'idée que vous n'avez pas progressé, c'est que vous êtes resté à Grenoble. Je ne voulais pas quitter Grenoble. Je voulais rester sur Grenoble. Je ne voulais pas. Je suis quelqu'un de Grenoble et je ne voulais pas quitter Grenoble. Et c'est aussi une affaire privée. Il y a tout un intérêt familial.

[00:35:06]

C'était passionnant, en tout cas, de vous rencontrer, d'entendre votre histoire tant d'années après. Personne ne va se lever aujourd'hui pour dire, mais j'étais inspecteur à la brigade des mœurs à Grenoble en 1988. Peut être. Et peut être que quelqu'un va venir nous dire mattendais Savelli. Oh là là, vous le connaissez pas vraiment, etc. On verra bien, on verra. L'histoire est posée là. Merci infiniment. Je rappelle le titre de votre livre, Philippe Savelli, édité aux éditions Mahia.

[00:35:30]

Tout ça avec Internet, ça n'a aucune importance. On trouve tout sur Internet. Aujourd'hui, mon combat pour la vérité.

[00:35:38]

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