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9 heures 9 heures 30. Franck Ferrand raconte le général de Gaulle. Depuis, il. Le général de Gaulle, le général de Gaulle s'est, c'est vite dit, c'est plutôt la général de Gaulle dont nous allons parler aujourd'hui puisque je vais vous raconter le parcours d'Yvonne de Gaulle pendant la guerre.

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Tout cela commence dans un petit village breton qui est sur la baie de Morlaix, un village avec ses bateaux de pêche. Son château s'appelle le château du Taureau et ses longues plages de sable. On est sur cette côte bretonne avec les îlots, les rochers. Je ne vous fait pas de tableau. On est à Carantec le 15 juin 1940. C'est le milieu de l'après midi et voilà un bruit de moteur qui retentit dans une impasse tranquille, à quelques encablures du bord de mer.

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La voiture va finir par s'immobiliser devant la grille d'une maison et en descend un homme dont je n'ai même pas besoin de vous décrire la silhouette. Vous avez compris de qui je parle, évidemment. Charles de Gaulle, qui vient d'être nommé. Là, il y a peu de temps sous secrétaire d'État à la Défense nationale et à la guerre, sous secrétaire d'État. Vous voyez que c'est quand même pas. Il est entré par la toute petite porte dans le gouvernement.

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Le tout jeune et récent général de Gaulle est sur la route de Brest, d'où il a bien l'intention de s'embarquer pour Londres.

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Il a en effet une mission de la part du gouvernement. Il fait un arrêt pour rendre visite à sa femme Yvonne et à leurs trois enfants. Ils se sont réfugiés dans ce village breton de Gaulle pour fuir l'avancée fulgurante des troupes allemandes.

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Bien entendu, comme tant et tant et tant d'autres familles de France, bien sûr, le fils aîné Philippe se souviendra dans ses mémoires de cette visite si particulière de son père.

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Je cède la parole bien volontiers à l'amiral de Gaulle. Il reste moins d'une demi heure. Il nous incite à ne pas rester en Bretagne, futur champ de bataille probable, mais à chercher une région plus au sud.

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De Gaulle va tourner les talons. Il va remonter en voiture.

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Et Yvonne, elle, avec ses enfants. Mais elle est là et elle reste abasourdie. Est ce qu'un jour, elle reverra son Charles?

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La voilà livrée à elle même avec ses enfants à protéger. Parmi eux, il y a la petite dernière, Anne, une enfant de 12 ans qui est atteinte de trisomie.

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Yvonne repense sans doute aux mots de Charles. Il faut s'en aller d'ici.

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Il faut fuir. Mais pour aller où? Avec très peu de moyens.

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Avec cette petite âme qui est si fragile que tout impressionne. Yvonne, sans doute bouleversée, n'a plus une minute à perdre parce que bientôt, les Allemands seront là, dans sa bâtisse bretonne, face à son destin. Là, maintenant toute seule, elle va devoir prendre une décision cruciale. Peut être la décision la plus importante de sa vie.

[00:02:58]

Franck Ferrand raconte le général de Gaulle.

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Pour Yvonne de Gaulle, la petite cité de bord de mer de Carantec n'est qu'un point de chute qui a été choisi tout à fait au hasard, comme sur le chemin d'un exil qui avait commencé quelques semaines plus tôt. Il faut que je vous dise ça.

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Dès l'automne 39, aux prémices de la guerre, Yvonne s'est réfugiée dans un premier temps dans la maison familiale de Colombey les Deux Églises.

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Cette maison que les de Gaulle ont rebaptisée La Boisserie solide demeure. On est en Haute-Marne. On a tous des images, bien sûr, de La Boisserie. Il faut aller visiter cet endroit absolument extraordinaire et dont je vous reparlerai après demain. Yvonne et Charles ont acheté cette maison dans les années 30, sans doute afin de préserver leur vie de famille et après la déclaration de guerre de la France. Eh bien, Yvonne a passé là quelques mois avec la gouvernante avec Anne.

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Les aînés étudient en région parisienne à l'époque. Quant à Charles, évidemment, il est mobilisé. Il est sur le terrain. Yvonne a sans doute la nostalgie de ces temps où sa tribu plier bagage à la hâte pour suivre les différentes affectations de Charles. Mais c'est fini, ça.

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On allait à Paris, on allait à Trèves, on allait à Bayreuth, on allait à Metz. Je vous ai raconté tout ça hier.

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Derrière les murs épais de la Boisserie, dans la quiétude du parc verdoyant de Colombey, la jeune femme.

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Parce qu'à l'époque, c'est encore une femme, en tout cas assez jeune et anxieuse.

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Elle attend avec fébrilité les lettres de Charles et après quelque temps, elle se montre elle même dans ses propres lettres.

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Un peu plus inquiétante, lui d'ailleurs, lui lui écrit.

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Il lui écrit Assure toi très discrètement d'un moyen de transport éventuel. Ça veut dire qu'il va falloir s'en aller, c'est certain. La rapidité de l'invasion allemande ne laisse aucun choix à Yvonne. Et à contrecœur. La voilà qui va devoir quitter son domaine. On est là à la mi mai 40, juste au lendemain de la grande offensive.

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Bien sûr, elle va se débrouiller pour atteindre le Loiret. Elle est toujours avec Anne et avec la gouvernante. Et puis, elle va s'installer chez sa sœur Suzanne, à Paris. Philippe et Elizabeth, les aînés, tentent, comme des milliers de civils, la peur au ventre de fuir la région parisienne avec des gares complètement saturées, noires de monde, des routes encombrées. C'est l'exode. Charles, à ce moment là, va être nommé sous secrétaire d'État.

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Il trouve un chauffeur pour conduire ses enfants dans le Loiret. Mais là encore, ce n'est pas la peine d'essayer de s'interdisait. Les Allemands progressent et progressent à une vitesse folle. Cette fois, c'est Yvonne qui va prendre les choses en main et entraîner sur les routes de l'exode.

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Cette fois, ses trois enfants, jusque donc à Carantec, à côté de Morlaix. Elle va venir à Carantec parce que c'est là que se sont réfugiés un certain nombre de proches. La Bretagne est menacée par la fulgurante percée allemande et il va falloir de nouveau prendre une décision. Et cette fois, c'est une décision assez inattendue que va prendre Yvonne de Gaulle puisqu'elle prend la décision de s'exiler et non pas dans le Sud. Comme son mari le lui a suggéré lorsqu'il est passé la voir juste avant de partir pour Brest.

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Non, non, elle va décider de son propre chef de partir pour l'Angleterre au moins dans un premier temps, se dit elle.

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Après tout, c'est un pays qu'elle connaît.

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Parce que ce qu'il faut vous dire, c'est qu'au moment de la Première Guerre mondiale, sa famille, je ne vous ai pas encore parlé de la famille Vendroux, de la famille d'Yvonne de Gaulle, mais d'une famille de la bourgeoisie aisée qui l'avait envoyé passer la Première Guerre mondiale à l'abri dans une pension anglaise.

[00:06:25]

Et Yvonne, qui est calaisienne, qui est très liée à la culture britannique, est habituée à la langue et aux coutumes de l'Angleterre et à la gastronomie, si je puis dire, à la langue des Anglais, à la langue de Shakespeare.

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Il semble qu'elle ait pris cette décision toute seule, sans savoir à l'époque où se trouvait son mari Charles. Ça, c'est intéressant. Elle ne part pas pour l'Angleterre pour aller rejoindre Charles de Gaulle. Elle parle pour l'Angleterre parce que c'est l'endroit où elle était allée se réfugier pendant la Première Guerre mondiale. C'est ça, la vérité. On ne peut pas savoir ce qui est en train de se tramait. Bien entendu, Philippe, qui a 18 ans déjà à l'époque, se souviendra l'amiral de Gaulle.

[00:07:00]

Nous laissons tout derrière nous. Nous n'en portons que les vêtements que nous portons et un sac contenant quelques papiers, quelques bijoux transmis de génération en génération et des médicaments de secours pour ma sœur infirme. Et voilà que, bien courageusement, la petite famille s'embarque. Une grande biographe d'Yvonne, Geneviève Mmol, racontera.

[00:07:21]

Le bateau est un vieux navire marchand poussif. Il y a peu de place. On installe la famille dans une seule cabine alors que le bateau chemine lentement. Yvonne demande à ses enfants de prier avant de s'endormir, qu'une torpille ou qu'une mine ne les envoie par le fond.

[00:07:37]

Elle ne sait pas encore que le navire, qui a quitté le quai avant l'heure et sur lequel il aurait embarqué s'il était arrivé à temps, vient justement de couler.

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Languedociennes numéro 3 d'Erik Satie, orchestré par Francis Poulenc, On aura beaucoup entendu de Francis Poulenc pendant cette semaine spéciale De Gaulle, interprétée par l'Orchestre national de France sous la direction de Charles Dutoit.

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Franck Ferrand raconte le général de Gaulle depuis une traversée longue vers l'Angleterre, traversée périlleuse.

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Pour Yvonne de Gaulle et ses enfants, Philippe, plus tard, évoquera la dignité de sa mère pendant ce voyage infernal.

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Ils sont serrés à 5 sur des petites banquettes. Il arrive finalement en Cornouaille.

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Le jeune Philippe, qui a 18 ans, s'empresse d'acheter un journal et c'est ainsi qu'il apprend l'incroyable nouvelle.

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Mais pour la famille, c'est totalement impensable. C'est totalement inimaginable.

[00:10:46]

Voilà que Charles, voilà que son père Louis Philippe, voilà que son époux Yvonne vient de lancer à la radio de Londres un appel qu'on appellera plus tard l'appel du 18 juin.

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Le clan de Gaulle va parvenir à se faire connaître des autorités et dès le lendemain, la famille, enfin, va pouvoir fouler les trottoirs londoniens dans une chambre d'hôtel. Charles accourt pour saluer les siens.

[00:11:10]

Alors, je dis à. Faut pas imaginer non plus les grandes retrouvailles. En donnant tout ça avec sobriété, bien sûr, mais beaucoup de gaieté et un immense soulagement. La famille va s'installer à l'hôtel dans un contexte très tendu. En France, de Gaulle va très vite être condamné à mort par contumace.

[00:11:25]

Et la tâche qui l'attend, il l'a si bien décrite, cette tâche dans les fameux Mémoires de guerre.

[00:11:30]

Cette tâche est immense. Il est en train tout simplement d'essayer de sauver tout seul l'honneur de la France et il va créer les Forces françaises libres et au cœur de cette bataille historique.

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Et bien Yvonne, qui est arrivée là un petit peu par hasard, il faut bien le dire, va devenir son plus sur repère. C'est magnifique, cette histoire. C'est une histoire qu'on aurait dû raconter depuis, d'une certaine façon, depuis plus longtemps, je trouve. Elle va tenter Yvonne de Gaulle de refonder le foyer dans une maison du Kent, au Sud-Est de Londres. Une vie presque familiale qui reprend seulement bientôt la guerre vient mettre un terme à ce nouvel équilibre.

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Et c'est encore l'amiral de Gaulle que je cite à 500 mètres au bout de notre rue, une bombe soufflera une maison. Quand des explosions font trembler la notre, nous nous refusions à l'endroit le plus protégé sous l'escalier, faute de disposer d'une cave ou d'un abri plus adéquat.

[00:12:26]

La situation, à ce moment là, va devenir assez insoutenable. Anne vit très mal l'agitation qui l'entoure. La pauvre enfance est vrombissement d'avions. Ces choc des bombardements, c'est absolument terrible pour elle.

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Alors que Charles de Gaulle est en déplacement en Afrique, évidemment.

[00:12:43]

Vous savez, son premier grand voyage là bas peut être l'occasion de reparler de ça.

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Yvonne va prendre le destin de la famille en main.

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Cette fois, elle s'enfuit à plus de 250 kilomètres de Londres. Elle s'installe dans le Schwob Chayer. Elle va emménager en pleine campagne.

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J'allais dire en pleine cambrousse, dans une maison tout à fait sommaire, avec bien sûr Elizabeth, avec Anne qui est là. Et puis avec toujours la gouvernante qui a suivi depuis La Boisserie. Philippe, quant à lui, s'est engagé bien sûr dans les Forces navales françaises libres. Et Yvonne va devoir faire vraiment face à une adversité terrible.

[00:13:20]

On vit avec les moyens du bord.

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Frédéric Nau Dufour, écrit elle, mène une vie de recluse à la dure. l'Angleterre souffre de pénuries, notamment en matière de vêtements aussi. Yvonne se met elle à la machine à coudre pour confectionner ses habits et ceux de ses enfants afin de subvenir aux besoins alimentaires. Elle installe un poulailler dans le jardin. Pour le reste, elle se débrouille avec les commerçants locaux. Grâce à sa bonne maîtrise de la langue anglaise, elle profite de ce que les Britanniques dédaignent les abats, le foie, etc.

[00:13:50]

Pour nourrir ses enfants.

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Oui, ce que ne veulent pas les enfants sont bien contents de le trouver, évidemment.

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Et pendant cette période, elle est très seule. Évidemment tourmenté par le sort de ses proches, de son fils, bien sûr, qui s'est engagé, de ses frères à elle et de son mari. Ai je besoin de vous le dire?

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Il est possible qu'à ce moment là, bien ne l'ai jamais reconnu, elle a traversé une période de dépression. Mais alors que la situation tend à s'apaiser à Londres, elle décide de se rapprocher de son mari. Elle va s'installer dans une maison plus confortable à Berck.

[00:14:20]

Winstead, on est là, au nord ouest de Londres, et c'est dans cette nouvelle demeure qu'elle va devoir se plier à un exercice auquel elle n'avait pas pensé du tout. C'est que son mari est devenu entre temps presque l'équivalent d'un chef d'Etat. En tout cas, un homme d'Etat, c'est incontestable. Et voilà que Churchill, qui entend asseoir l'image du chef de la France libre, demande à de Gaulle de se prêter à ce qu'on appellerait aujourd'hui un reportage people.

[00:14:47]

Alors, ça y est.

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De Gaulle n'est pas très content. Il dit Churchill veut me lancer comme une savonnette, mais en l'occurrence, Churchill a très bien compris qu'il faut rendre populaire ce général qui, pour l'instant, manque beaucoup de popularité et de notoriété. Vous imaginez cette pauvre Yvonne de Gaulle qui est aux antipodes de tout ça dans une époque qui ne l'est pas moins?

[00:15:06]

Je cite Robert Schneider dans son ouvrage. Aux Premières dames, ils finiront par accepter à condition que leurs enfants n'apparaissent pas dans le reportage.

[00:15:15]

Yvonne refuse les services d'un coiffeur, d'une maquilleuse et d'un couturier qui pourtant lui avait été proposé par les services du premier ministre.

[00:15:22]

On la voit visiblement mal à l'aise, faisant la vaisselle, le ménage, la cuisine, jouant du piano, écoutant son mari lui lire un livre, allumant sa cigarette ou posant à la fenêtre à une distance respectable de Charles, le regard dans le vague.

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Le général gardera un souvenir détestable de cette séance de poses qu'il n'a pas pu refuser, assure t il.

[00:15:44]

Reportage qui met en scène Yvonne avec sa robe à pois qui nous est très précieux à nous. Finalement, ça nous montre un peu certaines choses quand même. Elle a les cheveux noués en chignon sur la nuque. Ça aussi peut être une marque de son nouveau statut. Si vous voulez, elle est l'épouse du chef de la France libre, un homme dont le rôle est en train de prendre une ampleur importante. Et 43. L'évolution de la guerre va pousser Charles de Gaulle.

[00:16:07]

Eh oui, 43.

[00:16:08]

Évidemment, on va changer de lieu.

[00:16:11]

C'est le gouvernement d'Alger, après le débarquement anglo américain de novembre 42. Bien sûr. Et il va falloir qu'il vote. De Gaulle se mette au diapason. En 1944, juin 44, le général devient chef du gouvernement provisoire de la République française.

[00:16:28]

Avant cela, Yvonne l'avait rejoint, toujours accompagné d'Anne. Et c'est dans une villa d'Alger, une ville animée, mais en proie à toutes sortes de difficultés. Vous l'imaginez bien.

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C'est là qu'elle a attendu la fin de la guerre.

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Dans Paris-Match, en 1959, Georges Rayet raconter une anecdote qui datait justement de cette époque.

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Je citerai chaque fois qu'elle passait la grille de la villa. Les deux spahis, en burnous et sabre au clair, qui montaient la garde, se réunissaient au garde à vous. Cette cérémonie, qui se reproduisait plusieurs fois par jour, les exaspérait au point qu'elle finit par son ouvrir au général.

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Je vous en prie, Charles a ordonné qu'on cesse de rendre les honneurs!

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Lui dit elle. Mais ma chère amie, c'est impossible, répliqua le général de Gaulle.

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Cependant, le lendemain, la garde, feignant une distraction, demeura au repos. Quand passa la Générale, c'est un nouveau rôle pour elle.

[00:17:21]

C'est un rôle qu'elle n'aime pas du tout, mais qu'elle n'a pourtant pas fini de jouer.

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Les pizzicati de cette simple symphonie de Benjamin Britten, l'English Chamber Orchestra, sous la direction du maître lui même, Benjamin Britten.

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Franck Ferrand raconte le général de Gaulle. Depuis, elle va bien finir par s'achever cette guerre et vous vous dites ça y est.

[00:19:32]

Yvonne et Charles vont se retrouver, vont rentrer en France. Éthérées? Non, ils ne rentrent pas ensemble en France. Le 26 août 44, on a vu ces images des milliers de fois. Charles de Gaulle descend les Champs-Elysées et acclamé par une foule en liesse.

[00:19:46]

Mais le retour de son épouse se fait beaucoup plus discrètement. Seulement, à la fin du mois de septembre, elle va s'installer dans une résidence à Neuilly. Charles, à ce moment là, est devenu le chef de la France et Yvonne doit essayer de jouer le rôle de première dame.

[00:20:03]

Ça lui plaît? Pas du tout. Il faut forcer sa nature. Mais que voulez vous? Il va falloir, par exemple, qu'elle s'offre de nouveaux vêtements. C'est Robert Schneider qui nous dit qu'elle parvient à faire ses courses encore.

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Personne ne connaissait alors le visage de la femme du plus illustre français. Elle peut encore aller dans les magasins sans trop être dérangé.

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Mais évidemment, dans l'intimité, elle peste Yvonne de Gaulle. Je cite Frédéric Dufour.

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Elle adopte une position très ferme sur la condamnation des personnes de son sexe au moment de la libération à son mari, qui souhaite alléger les condamnations réservées aux femmes. Elle s'oppose avec véhémence. Elles ont une conscience comme les hommes, dit elle. Elles sont donc tout aussi responsables de leurs actes. Cette revendication d'une égalité de traitement des hommes et des femmes dans la punition découle pour elle de leur égalité tout court.

[00:20:52]

Bon, admettons.

[00:20:54]

À l'hiver 46, de Gaulle, vous le savez, est en grand désaccord avec toute la classe politique qui est en train de se réinstaller tranquillement à Paris. Bien sûr, et ça va être ce moment incroyable. Janvier 46 ou un dimanche matin, il convoque l'ensemble du gouvernement pour annoncer brutalement, sans même les faire asseoir, sa démission.

[00:21:12]

Et ça, cette décision de janvier 46. Pour Yvonne de Gaulle, c'est un soulagement extraordinaire. C'est la promesse du retour à une vie plus paisible. D'autant plus qu'elle a eu entre temps la possibilité de retrouver tous ses proches éparpillés à tous ceux qu'elle a pu retrouver éparpillés pendant la guerre, période qui reste éprouvante pour le couple.

[00:21:32]

C'est Georges Rivière qui raconte cette anecdote survenue un soir, alors que des journalistes sont en train de guetter les de Gaulle sous la neige devant leur résidence. Soudain, une fenêtre s'éclairant au premier étage et une silhouette féminine apparut un instant entre les doubles rideaux. La générale? Nous sommes fichus, dire les journalistes. Les reporters savaient que la générale, qui a horreur de la publicité, ne les aime pas. Un quart d'heure plus tard, alors que la neige se remettait à tomber, un domestique sortait de la maison, portant un énorme Brau fumant et un panier de tasses.

[00:22:03]

C'était la générale qui offrait du thé à ses ennemis. Numéro un les journalistes.

[00:22:09]

Oui, elle avait bon coeur, quand même. La traversée du désert va pouvoir commencer. Le couple se replie.

[00:22:15]

Vous le savez, à Colombey, le général de Gaulle viendra régulièrement à Paris.

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La générale, elle, reste le plus possible dans sa maison de Colombey les Deux Églises. Elle va se livrer à toutes sortes d'œuvres, dont bien sûr, une fondation, la Fondation de Gaulle, en soutien aux jeunes femmes handicapées. Mais à ce moment là et bientôt en tout cas, c'est un drame drame terrible qui va bouleverser toute la famille.

[00:22:39]

Franck Ferrand raconte le général de Gaulle depuis. Oui, en 1948, Anne la petite Anne, si handicapée, va mourir d'une infection pulmonaire et c'est une douleur immense, cet enfant qu'il chérissait deux. Cet enfant avait, comme le note beaucoup de biographes, soudés. Le couple Charles Yvonne. Il les avait d'une certaine manière fait grandir en humanité. Elle avait été leur premier grand combat et Yvonne, qui avait consacré tant d'énergie à sa fille, va s'investir corps et âme maintenant dans la fondation qui prend le nom d'Anne de Gaulle.

[00:23:17]

Ce sera désormais le sens et le but de sa vie. Disons le et pendant longtemps, elle va s'y consacrer toujours, même une décennie plus tard, au cœur du printemps très agité de 1958. Lorsqu'on va rappeler le général de Gaulle au pouvoir, Yvonne de Gaulle est vraiment très en colère.

[00:23:35]

Non, cette fois, c'est la fois de trop.

[00:23:37]

Mais que voulez vous, bien malgré elle, elle va devoir aller s'installer à l'Elysée. Et en plus, les Français l'ont surnommé tante Yvonne. Ce qui lui plaît? Pas du tout. Bien entendu.

[00:23:46]

Et de nouveau, elle va devoir prendre la place du repère du soutien indéfectible. Ce que le général avait joliment résumé dans une lettre écrite en Algérie en 1943 et que cite justement Frédéric Dufour. Une lettre si précieuse qu'il l'avait soigneusement rangés avec le manuscrit de L'appel du 18 juin. Vous imaginez? Je cite cette lettre magnifique du général de Gaulle, tous les deux bien appuyés sur l'autre, physiquement et moralement. Nous irons très loin sur la mer et dans la vie, pour le meilleur et pour le pire.

[00:24:23]

Jamais pour le pire, toujours pour le meilleur. Voici notre Christian Morin national. Bonjour question.

[00:24:29]

Bonjour Franck, bonjour Lil Lil Wayne.