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9 heures 9 heures 30. Franck Ferrand raconte sur Radio. Un nouveau numéro d'historiens est dans les kiosques.

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Si vous êtes abonné, il va venir tout seul dans votre boîte aux lettres et dans ce numéro dédié à la légende millénaire du roi Arthurs, votre serviteur s'est fendu de quelques pages à propos d'un évènement dont on va ces jours ci célébrer le 180 ème anniversaire le retour des cendres de l'empereur, c'est à dire des restes de Napoléon. 1ER Retour aux Invalides le 15 décembre 1840, donc à l'apogée du règne de Louis-Philippe, ce qu'on appelle la monarchie de Juillet. Certains d'entre vous, et notamment ceux qui ont assisté à mon spectacle L'histoire, connaissent les interrogations que j'ai pu formuler à propos des tripatouillages auxquels les Anglais se sont probablement livrés sur la dépouille de Napoléon à Sainte-Hélène.

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Entre l'inhumation de 1821, on va d'ailleurs célébrer le bicentenaire de la mort de l'empereur l'année prochaine.

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Et puis l'exhumation de 1840, ce n'est pas mon sujet aujourd'hui.

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Je voudrais simplement en reprenant mon longue article d'historien. Je voudrais revenir sur cette cérémonie de 1840, cérémonie immortalisée par Victor Hugo dans son poème Retour de l'empereur.

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C'est un des grands passages de la légende des siècles. En vous voyant passer au chef du Grand Empire, le peuple et les soldats tomberont à genoux. Mais vous ne pourrez pas vous pencher pour leur dire Je suis content de vous. Et un peu plus loin dans cette litanie fleuve à propos du 15 décembre 1840, de ce jour du retour de l'empereur. Ciel glacé, soleil pur eau brille dans l'histoire du funèbre triomphe impérial aux flambeaux que le peuple a jamais de garde en sa mémoire.

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Jour. Beau comme la gloire. Froid comme le tombeau.

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Franck Ferrand, c'est un raté christique. Alors, il faut peut être que je commence par vous rappeler un peu moins en quelques mots, les circonstances de la disparition de Napoléon, dix neuf ans plus tôt. Je vous rappelle que l'empereur avait été vaincu à Waterloo après être revenu. C'est ce qu'on appelle les Cent-Jours. Son retour de l'île d'Elbe au printemps 1815, le 18 juin. Il est donc vaincu à Waterloo. Il rentre à Paris. Il va abdiquer pour la seconde fois.

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Et alors qu'un gouvernement provisoire s'est installé dans la capitale, il va gagner les côtes de l'Atlantique. Il arrive à Rochefort sur Mer.

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De là, j'ai eu l'occasion de vous raconter son petit séjour à l'île d'Aix et il va se rendre à la nation britannique en espérant pouvoir compter sur la clémence des Anglais. C'était peut être. C'était peut être un peu optimiste. Les Anglais, vous le savez, vont le déporter dans cette île extrêmement lointaine, au bout du monde, là bas, dans l'Atlantique Sud, où il va passer cinq ans et demi d'une espèce de lente extinction avec sa petite cour dans le cottage de Longwood, où il finit donc par rendre l'âme.

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Le 5 mai 1821, Talleyrand, à ce propos, avait dit Ce n'est pas un évènement, c'est seulement une nouvelle. C'était peut être un peu vite dit. Parce que en vérité, dès l'annonce de ce décès et dans toutes les années qui vont suivre, on peut dire de la légende impériale qu'elle va prendre son essor, qu'elle va aller gagner de plus en plus de Français, probablement même une majorité de la population. Des Français qui, certes, s'étaient lassés de la saga napoléonienne, mais qui, avec le recul, finissent par trouver tout cela très beau.

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Ils ont une espèce de nostalgie. On peut dire qu'en 1840, la nostalgie de l'Empire est grande et le nouveau régime, celui de Louis-Philippe, qui succède donc à la restauration des Bourbons. Le régime de Louis-Philippe, qui, dix ans plus tôt, est sorti de la révolution de juillet, a compris l'intérêt qu'il y avait pour lui à s'approprier un peu de cette gloire impériale, tout en se conciliant, disons le. Les bonapartistes qui, à l'époque, sont encore omniprésents dans les campagnes.

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Aussi le roi des Français va t il réclamer officiellement les restes impériaux à la jeune reine Victoria.

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Il faut dire qu'il avait été mis au courant. Louis-Philippe sont son ambassadeur sur place, qui n'était autre que François Guizot, historien bien connu. Louis-Philippe savait que les Anglais étaient prêts à restituer les restes de l'empereur à la famille impériale. Pourquoi pas les restituer dès lors à la France elle même, qui pourrait les accueillir dignement? C'est Adolphe Thiers, à l'époque président du conseil, qui va faire tout le nécessaire. Et c'est Charles de Rémusat, ministre de l'Intérieur, qui en fera l'annonce aux Chambres le 12 mai.

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La frégate, elle, s'appelle la belle poule.

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On aurait pu trouver un autre nom. On aurait presque pu la rebaptiser pour l'occasion.

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Mais il se trouve que c'est la belle poule qui va appareiller de Toulon le 7 juillet 1840. A son bord ont pris place pas mal de fidèles de l'empereur. Tous les compagnons de l'exil. Enfin, pas tous, mais presque. Il y a là le grand maréchal Bertrand, qui est devenu un petit peu chancelant. Il faut bien le dire, il commande l'École polytechnique. À cette époque là, il y a le baron Gourgaud, qui n'a rien perdu de sa vitalité et de son caractère irascible.

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Il est désormais l'aide de camp du roi Louis-Philippe. Que tout ce monde là s'est réconcilié avec le nouveau régime, c'est le moins qu'on puisse dire. Le premier valet marchand est maintenant lieutenant dans la garde nationale et il fera bien sûr partie du voyage. L'enthousiaste baron de l'ASCAD, qui est le fils? Emmanuel, le fils du rédacteur du Mémorial, qui a été nommé conseiller d'État par Louis-Philippe, lui aussi du voyage. Bref, tous ces gens là, bien sûr, vont faire le voyage jusqu'à Sainte-Hélène.

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Il faut quand même préciser que la plupart n'ont pas jugé bon de donner suite à la souscription qui avait été ouverte en faveur du retour des cendres de l'empereur en terre française. Il faut quand même le préciser. Le seul très important qui manque à l'appel, c'est le général de Montholon. Bien sûr, lui se trouve à l'époque réfugié à Londres pour dettes. Il est très occupé à fomenter avec le neveu de l'empereur Louis-Napoléon, celui qui, plus tard, va lui même devenir empereur, a fomenté le putsch de Boulogne sur Mer.

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Donc, on part sur la belle poule sous les ordres du prince de Joinville, avec l'amiral de Rohan-Chabot.

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Train paisible. On fait de jolies escales, on fait beaucoup de fêtes à bord. Il faut dire que l'équipage est très jeune. Bien entendu, on prend tellement son temps que la frégate n'atteint Jamestown qu'après le reste. Le reste, c'est un brick, un brick rapide, un vaisseau rapide qui a été dépêché par le gouvernement français pour aller parler au prince de Joinville avant qu'il ne rencontre les autorités britanniques sur place. Le navire en question est parti de Cherbourg trois semaines après.

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Après la belle poule, il est arrivé avant à Jamestown. La mission française va rester sur place du 8 au 18 octobre 1840, dans un contexte. Et c'est sans doute ce que le capitaine de Lereste avait pour mission de dire au prince de Joinville dans un contexte un peu dégradé, puisque les relations franco anglaise se ressemblent beaucoup à l'époque de la question égyptienne. Et oui, on est. On est en 1840. Il n'empêche.

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On est maintenant à pied d'œuvre. Les Français vont pouvoir descendre de leur vaisseau et aller exhumer le grand empereur. Extrait du Requiem de Mozart, interprété lors des cérémonies du Retour des cendres en 1840, l'Orchestre philharmonique de Berlin et le Zing Faireun de Vienne étaient sous la direction de Herbert Frank Cariane.

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Franck Ferrand sur Radio Classique. Au Val du Géranium, là où on avait enterré, où on avait enterré Napoléon en 1821, on l'exhumation va avoir lieu un peu en catimini. Il faut bien le dire, deux nuits sous la pluie. On est dans la nuit du 14 au 15 octobre 1840. Mauvaises conditions, donc.

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Il faut vous dire que ces mauvaises conditions et les circonstances un peu particulière de cette exhumation qui a lieu deux nuits sans que les témoins puissent approcher de la bière. Tout ça a justifié que certains se posent des questions. C'est ce que je vous disais au tout début de cette émission. Voici ce que, de manière beaucoup plus officielle, nous raconte l'un. Indépassables, Octave Aubry.

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Joinville, qui dirigea l'expédition à Joinville, nous dit il, était demeuré sur son navire froissé que le travail de l'exhumation, selon l'ordre de Londres, n'eût pas été confié à ses matelots. Deux tentes avaient été dressées, la première pour servir de chapelle, la seconde pour abriter les assistants et la troupe. Une vague clarté de lune.

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Par moments, blanchissait le brouillard des soldats du 91ème d'infanterie britannique en habit rouge et élevait des falots et des torches pour éclairer leurs camarades qui faisaient tomber trois côtés de la grille, immobiles, transis dans leurs manteaux. Les Français s'étaient massés en un petit groupe obscur, nous dit il. Il était 4 heures du matin. Les pics retentir sont pleins. On arrivait au lit de ciment. Là, il va falloir trois heures pour extraire tout ce ciment.

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On dressa une chèvre au dessus de la tombe, nous dit Octave Aubry, tandis que les membres de la mission et les officiers anglais allaient sous la tente endosser leur uniforme. Une double aide soldats fut disposée sur les pentes du Vallon pour éclairer les curieux. Le cercueil d'acajou apparut isolé dans sa niche. Il semblait humide, mais il n'avait pas autrement souffert.

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D'ailleurs, on dit que là, on a pu. On l'a ouvert. Il y avait plusieurs cercueils l'un dans l'autre. Vous savez. Mais le dernier était resté en suffisamment bon état que l'on a pu en tourner les vices. Nous, on restait de la dernière enveloppe, raconte Octave Aubry. Le plombier qu'il avait sous des 20 ans plus tôt la fendit aux ciseaux. L'attente était devenue presque insupportable. Et là, l'apparition, si je puis dire une mousse doite, s'était attaché au cadavre qu'on croyait voir à travers une vapeur prodigieusement intacte.

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Napoléon semblait dormir. Les Français avaient craint de ne plus trouver qu'un squelette ou des restes informes. l'Empereur revenait à la lumière du monde, comme s'il avait été mis la veille au tombeau. Et pour cause, diraient certains. Tous emplissaient leurs yeux de cette résurrection Emanuelle de l'Asca, Arthurs, Bertrand, Philippe de Les Serviteurs n'avaient pu retenir leurs larmes. Gourgaud sanglotait, Bertrand chanceler de fatigue et d'émotion. Quand le cercueil français a été refermé, le capitaine Alexander ont remis la clé au commissaire du roi.

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Il fallu quarante trois hommes pour porter sous la pluie implacable cette masse écrasante jusqu'au corbillard où elle fut revêtue du magnifique poil à porter de France. Velours violet semé d'abeilles d'or et bordé d'hermine. Les coins brodés den couronnés le Hain de Napoléon, bien entendu, furent tenus par Bertrand et Gourgaud. Las cases et marchants. Les quatre grands compagnons, si l'on excepte Montholon, sont bien là pour porter, pour porter les coins brodés de ce magnifique poêle funèbre. Je reprends la description que nous donne Aubry par le chemin détrempé où les chevaux glissaient.

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Le cortège remonta jusqu'à la Loire, la route dAlarme Hill, d'où il gagna Jamestown entre deux files de soldats et de miliciens, suivis par une grande partie de la population. Il était cinq heures et demie quand la longue procession arriva au débarcadère. Le prince de Joinville, entouré de son état major, l'y attendait. Il prit, l'aperçoivent des mains de l'abbé Coquereau et le premier jeta l'eau bénite. Les vaisseaux français qui étaient peints en noir issers leur pavillon.

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Ils se pavoisé. À six heures du soir tombant, les marins français, sous le commandement de Joinville, plongent leurs rames. Napoléon quitte Sainte-Hélène au moment même où, vingt cinq ans plus tôt, il était arrivé dans l'île à bord du Nimda du Nord d'un Verlinde.

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L'apothéose de cette grande symphonie funèbre et triomphale composée par Hector Berlioz à la demande justement du ministre de l'Intérieur Charles de Rémusat, en 1840. Non pas pour le retour des cendres, là, mais pour le dixième anniversaire de la révolution de 1830. Est ce assez grandiose? Petit clin d'œil. La version que vous venez d'entendre est celle de l'Orchestre symphonique de Londres, sous la baguette de Sir Colin Davy.

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Franck Ferrand sur Radio Classique. Et ce 15 décembre 1840, il neige à Paris. Neige même beaucoup, les flocons sont sont importants. Tout Paris est recouvert de neige. La famille royale pleine de componction, accueille donc aux Invalides, dans un décor de toiles peintes et de carton pâte. L'impressionnant char funèbre, immense char funèbre pour vous dire que toute la nuit précédente, le corps de l'empereur a été veillé par de vieilles moustaches d'Espagne, de Russie, de la campagne de France.

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Larmes aux bras, stoïques, gelés, nous dit Aubry, avait honoré le grand homme en silence. Le char, immense, a été tiré par seize chevaux. Capart a sonné dehors.

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Tout ça croule sous les allégories, les drapeaux de gloire. Partout, des abeilles et des Hain couronnées.

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Bien entendu, le cercueil avait fait un long voyage et il était remonté à travers tout l'Atlantique pour revenir jusqu'à Cherbourg.

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Et là, on l'avait transbordés sur deux navires fluviaux. D'abord la Normandie, puis la Daurade, pour aller jusqu'au Havre et remonter toute la Seine en m'ajuster. Il faut dire que ça devait être très impressionnant.

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Tout le long de la Seine, les garnisons stationnées alentour étaient venus rendre les honneurs à la dépouille de Napoléon et les populations aussi étaient là, abonnés bas, pour saluer en silence les cendres de l'empereur qui glissait vers la capitale. Le 14 décembre, on était arrivé à Courbevoie et là, les Parisiens étaient venus en accueille. Les deux rives s'étaient couvertes de gens qui étaient très émus et qui, malgré le froid, avaient tenu à être là. Et le vieux Soult?

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Le major général de Waterloo, le maréchal Soult, qui était devenu président du conseil, était venu se prosterner devant la bière où gisait l'homme qui avait qui avait fait sa fortune et que néanmoins, et pour complaire au roi Louis 18, il avait fait partie de tous ceux qui s'étaient ralliés au nouveau régime.

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Il avait traité d'aventurier. Il neige, donc, il neige encore. Le canon se met à tonner et bien entendu, les cloches sonnent à tout volée et le char funèbre s'avance d'abord sous l'Arc de triomphe, arc de triomphe flambant neuf pour l'occasion.

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Et puis, il va descendre ce char funèbre tous les Champs Elysées tourner à droite en direction des Invalides, sur l'autre rive de la Seine, et au passage du cortège. La foule applaudit, crie, chante. Et puis, à chaque fois, elle voit les vétérans de la Grande Armée qui sont là, qui suivent le char bien d'un seul coup. C'est le silence qui se fait dans cette neige, car toujours, il neige. Et quand le cortège entre dans la cour des Invalides, les invités du roi, qui sont là sur des estrades à ciel ouvert, se lèvent d'un seul mouvement.

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C'est assez extraordinaire. C'est le prince de Joinville qui présente la dépouille impériale à son père et Louis-Philippe va le remercier et se tournant vers Soult, qui représente qui a avec lui l'épée d'Austerlitz. Il fait signe d'approcher au général Bertrand. Au général Bertrand, lui dit il, c'est l'ancien grand maréchal du Palais. Je vous charge de placer l'épée de l'empereur sur son cercueil. Et là, Bertrand décline. Pour quelles raisons? On a beaucoup parlé de ce geste.

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Toujours est il que ces Gourgaud qui va finalement s'en charger. Et puis, grande messe, célébration. Et on va laisser le cercueil exposé ainsi trois semaines dans l'église pour recueillir l'hommage des Parisiens. Et le 6 février 1841, on le fera porter dans une chapelle, la chapelle Saint-Jérôme où, pendant deux décennies, il va falloir attendre l'inauguration du Grand tombeau, conçu par l'architecte Visconti sous l'incomparable dôme des Invalides, sous la Coupole.

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En tout cas, ce tombeau sera inauguré en 1861. Autant dire que Napoléon repose au coeur de Paris, selon ses propres volontés. Au milieu de ce peuple français qu'il avait tant aimé, Franck Ferrand, c'est un raté christique.

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J'aimerais conclure cette évocation par un point de vue plein de recul et, à mon avis, de sagesse. Point de vue signé d'un historien que j'ai toujours plaisir à citer puisqu'il s'agit de Philippe Erlanger. On suit toujours à propos de Napoléon, Frédéric Masson ou le cher Jean Tulard. Bien entendu, voici ce que Erlanger, qui préférait les rois à l'empereur, disons le, a dit à propos de l'homme dont les cendres, en décembre 40, avaient donc été inhumés aux Invalides.

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La marche de l'histoire est comparable à celle d'un homme qui gravir la rampe en spirale de quelques tours babyloniennes, dit il. Plus il s'élève, plus est vaste le paysage offert à ses regards, à chaque pas en avant, son angle de vue s'amplifie, diffèrent, mais demeure incomplet. Il n'y a pas de progrès absolu en histoire. Il y a seulement des progrès partiels dont l'importance peut toutefois être suffisante pour entraîner des révisions considérables dans certains jugements. Aujourd'hui, l'homme de la tour distingue dans l'aventure de Bonaparte.

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Rien que le nom, tout est dit, beaucoup de choses. Né en 1840 et d'abord les limites d'un génie qui exalte à l'humanité, éblouies de se découvrir de telles possibilités. Napoléon fut sans doute l'homme le plus intelligent du monde, mais en vérité, tout ce qui allait devenir essentiel d'un avenir immédiat lui échappe complètement. Il dédaignant le bateau à vapeur grâce auquel il aurait peut être mis l'Angleterre à genoux. Il ignorera le machinisme naissant s'il songea un moment à tirer parti de la Louisiane.

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Il sacrifia bien vite cette colonie et ses ressources illimitées pour rompre la paix d'Amiens et entreprendre d'un cœur allègre une course à l'abîme. Deux de ses erreurs n'ont pas fini de produire leurs conséquences. L'une contribua puissamment à la chute vertigineuse de la natalité en un pays que sa population aurait dû maintenir au premier rang des puissances. L'autre amena l'Allemagne, pardon, amena en Allemagne un vide à la faveur duquel la Prusse acquit les moyens de briser la suprématie militaire de la France.

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Et c'est vrai que le Code civil, en supprimant le droit d'aînesse définitivement, a beaucoup fait pour limiter la natalité française, aussi bien dans la paysannerie que dans la bourgeoisie. C'est peut être une des causes de l'affaiblissement de la France pendant tout le cours du 19ème et jusqu'au début du 20ème siècle. Et puis, bien sûr, c'est vrai que les grands bouleversements apportés par Napoléon à l'organisation allemande ont permis l'émergence de cette puissance prussienne devenue empire allemand. Et la suite?

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Évidemment, on la connaît. Et voilà ce que nous dit en conclusion Philippe Erlanger. J'aime le pouvoir en artiste, disait l'homme des pyramides et de la campagne de France. Et selon Bainville, son aventure fut parfaitement vaine, sauf pour l'art. Mais cette oeuvre d'art a sa noblesse puisqu'elle exalte les instincts héroïques des générations appelées à la contempler. Le passage de l'aigle suscita le romantisme politique, inspira aux jeunes gens l'horreur de l'étroitesse, de la médiocrité et un certain mépris de ce bonheur que Bonaparte ne concevait pas.

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C'est aussi cela qu'exprime la cérémonie des Invalides.

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Nous retrouvons notre Christian Morin, nation jadis impériale. Bonjour Christian. Impériale, alors j'ai mon général Bertrand qui est en régie. Bertrand Dorrit mais en vous écoutant, c'est très intéressant parce que vous faisiez allusion au fait que Napoléon avait refusé un peu la guerre mécanique avec les bateaux à vapeur contre les Anglais? Oui, notamment. Oui, bien sûr, c'est vrai. Si on fait le lien avec un certain général, de Gaulle, lui prenait justement avec les chars la guerre mécanique.

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Oui, peut être entamer une procédure toute autre. Et puisque vous parliez des Invalides, eh bien, on va en profiter. Je pense que vous serez d'accord. Je suis à fond pour rappeler que cet après midi, on va rendre hommage à un grand résistant, celui qui fut le secrétaire de Jean Moulin, c'est à dire Daniel Cordier, Daniel Cordier, que j'ai eu l'honneur d'interviewer plusieurs fois, qui était un monsieur absolument délicieux, en plus d'être le grand résistant que l'on sait tout à fait charmant.