Transcribe your podcast
[00:00:06]

9 heures 9 heures 30. Franck Ferrand raconte sur Radio Classique. Si vous allez un jour à Washington et si vous visitez la Smithsonian Institution, ne manquez pas, au sein du Musée d'histoire naturelle, une salle plongée entièrement dans la pénombre, salle où s'expose un diamant bleu de 45 carats et demi. Il attire en moyenne. Dites vous cela? Quelque 10 millions de visiteurs annuels, c'est à dire à peu près autant que la Joconde au musée du Louvre. Les années où l'on peut visiter le musée du Louvre, ce diamant a connu de multiples péripéties.

[00:00:51]

Son premier propriétaire connu aura été Louis 14. Il a été fait partie des bijoux de la couronne de France, des joyaux de la Couronne et l'inventaire de 1783 mentionne, je cite, un très grand diamant brillant bleu ayant beaucoup de deux sous forme en cœur d'eau vive et nette. Désigné par l'inventaire de ses 191 pesant 67 carats 8ème, lequel a été retaillé depuis, est estimé à un million de livres. Sauf que le diamant en question va faire partie de tous les joyaux volés au moment du pillage du garde meuble lors des journées de septembre le vol des joyaux de la Couronne.

[00:01:30]

Il ne réapparaît à Londres qu'en 1812 sur les documents d'un bijoutier qui évoque l'existence de ce diamant de quarante cinq carats. Un petit peu plus petit qu'au moment de son vol, vingt ans plus tôt, le diamant bleu est acquis par le banquier londonien Henry Philip Aups en 1830. C'est ce qui va lui donner son nom de Hope Diamond. Ce qui peut s'entendre en anglais, comme le diamant de l'espoir. Il va rester dans la famille jusqu'en 1902, avant d'être vendu à un courtier américain, un collectionneur turc, un joaillier français qui finit par le céder à Pierre Cartier.

[00:02:06]

Et c'est la Maison Cartier qui va le vendre au mari d'une jeune héritière, Évelyne Watchman Kleline. En 1949, Le Diamant est acheté par un bijoutier new yorkais qui va en faire don, donc quelques années plus tard, à l'État américain. C'est comme cela que vous pouvez le voir à la Smithsonian de Washington.

[00:02:24]

Vous avez bien compris qu'après le vol subi durant la révolution, le diamant a fondu comme neige au soleil.

[00:02:29]

D'ailleurs, il a fini par devenir presque noir. Son éclat s'est beaucoup terni. Il a perdu l'espèce de couleur bleu roi unique qui le rendait si célèbre. Et d'ailleurs, le musée de Washington utilise maintenant une espèce de lumière bleutée qui est derrière le bijou en dessous pour lui rendre un peu de son éclat.

[00:02:49]

Ce bijou, il a beaucoup, beaucoup passionné les spécialistes ou les géologues du monde entier.

[00:02:56]

Pendant treize ans, des chercheurs français et américains ont travaillé pour fabriquer une réplique qui a été présentée en septembre dernier dans le cadre d'une exposition qui s'appelait Pierres précieuses. Vous savez, au Muséum d'histoire naturelle et la réplique qui, elle est belle, couleur bleu roi, était d'une telle précision que les diamantaires se sont déclarés incapables de faire la différence avec un vrai diamant. Vous imaginez? Cette réplique se rapproche en fait de ce que devait être le diamant d'origine lorsqu'il avait été présenté à Louis, 14 ans 168, par un marchand sorti tout droit d'un roman d'aventures.

[00:03:34]

Un homme dont on dit qu'il aurait parcouru 240 000 km à travers le monde pendant toute son existence. C'est un record absolu pour le 17e siècle. Vous imaginez un homme qui avait rapporté ce diamant bleu des Indes, joyau et exceptionnel pour l'époque? L'homme en question s'appelait Jean-Baptiste Tavernier. Il était né soixante trois ans plus tôt à Paris. Jean-Baptiste Tavernier en 705. Son père était un marchand de cartes géographiques protestants qui avait quitté Anvers pour échapper aux persécutions et qui s'était réfugié dans la France un peu plus tolérante d'Enrique 4.

[00:04:12]

Très tôt, le petit Jean-Baptiste s'est passionné pour les voyages. Cela vous étonnera pas. Son père était cartographe. A 16 ans, on est en pleine guerre de Trente Ans. A l'époque, l'Europe est ravagée. Ils n'en voyagent pas moins jusqu'en Angleterre. Il passe aux Provinces-Unies, repasse ensuite par l'Allemagne. Il va passer comme ça quatre ans et demi au service du vice roi de Hongrie. Une année ensuite au service de Charles 1er de Mons, de Mantoue et a 25 ans.

[00:04:40]

On peut dire de Tavernier qu'il a déjà traversé une grande partie de l'Europe. Il connaît aussi maintenant l'Italie, la Suisse, l'Allemagne. Je vous l'ai dit, la Pologne, la Hongrie, l'Angleterre, les Provinces-Unies. Il parle plusieurs langues, mais il veut aller plus loin et en 730, il décide de partir à la découverte de l'Orient. Là, c'est une autre histoire. Bien sûr, on est dans cette première moitié du 17ème siècle où l'Orient est une région encore assez peu explorée par les Français.

[00:05:09]

Ce sont surtout les aventuriers, les grands voyageurs, quelques commerçants qui connaissent l'Orient. Tavernier va donc faire partie de ces rares personnes. Au delà de Constantinople, il est à Constantinople dès le début de 731. Il va y rester près d'un an. Istanbul Constantinople, c'est le grand carrefour des routes maritimes et terrestres, bien sûr, de l'époque et de tous les de tous les temps. En février 732, Tavernier se joint à une caravane qui s'en va, qui va quitter Constantinople.

[00:05:41]

Il atteint une vingtaine de jours après la ville de Toquade, qui est un centre important de commerce et d'artisanat. Laissons lui la parole. C'est Tavernier lui même qui écrit. Toca est un des grands passages de l'Orient et il y arrive incessamment des caravanes de Perse, de Bagdad, de Constantinople, de Smyrne et d'autres lieux. C'est d'ordinaire à cet endroit que ces caravanes se séparent quand elles viennent de Perse. Celles qui vont à Constantinople prennent à main droite au couchant d'hiver et celles qui vont à Smyrne tirent vers la gauche au couchant d'été.

[00:06:14]

Le jeune explorateur va poursuivre ensuite, lui, vers la Perse en direction d'Erzurum, et il passera ensuite à Erevan, où il fait la connaissance du gouverneur dans la région. Là bas, on parle d'un canes et avec sa canne, il va boire beaucoup de vin, nous raconte t il. Et enfin, il arrive. On est là à la fin du printemps de 732. Il arrive à Ispahan et je passe encore la parole à Tavernier.

[00:06:42]

Chaque famille à Ispahan a sa maison en particulier et presque chaque maison, son jardin que de cette manière, il y a beaucoup de vide de quelque côté qu'on y arrive. On découvre d'abord les tours des mosquées et puis les arbres qui environnent les maisons, de sorte que, de loin, Ispahan ressemble plus à une forêt qu'à une ville comme la plaine fertile. Elle est fort habitée, mais on n'y voit point de grand village. Ce ne sont que de petits hameaux de trois ou quatre maisons tout au plus.

[00:07:11]

Tavernier, pour autant, ne va pas nous décrire en Ispahan, une cité idyllique qu'il souligne dans ses récits, que les rues sont très étroites qu'elles sont et sales, avec une odeur terrible provoquée notamment par les carcasses d'animaux qui jonchent le sol et qui pourrissent ainsi le palais du roi. La grande place de la ville ne le séduisent pas vraiment. Il ne dit presque rien des jardins qui, pourtant, ont fait la grande renommée de la cité perse, les jardins d'Ispahan, après trois mois passés là.

[00:07:42]

Tavernier va quand même décidé de rentrer.

[00:07:45]

Il va rentrer par Bagdad, Bagdad, où il doit d'ailleurs faire face à une tempête de Simounet, vent chaud du désert. Et puis, il passera par Alep, un des centres caravaniers majeurs de l'Orient. Et puis de cette Syrie, de cette Alep. Tavernier va finir par rentrer, mais va rentrer par voie de mer. Il gagne la France. Il est en 733 à Paris et ça fait donc deux ans qu'il était parti. Deux ans de voyage au cours desquels il a tissé tout un réseau de relations commerciales.

[00:08:16]

Des relations qu'il ne cessera d'entretenir et d'élargir par la suite.

[00:09:19]

L'ensemble L'axone Tous Austria, sous la direction de Tomasz Vimaire, interpréter cette symphonie Turkania de Ioane Yosef Fux. Franck Ferrand sur Radio Classique. Tavernier va rester un petit peu à Paris, il a travailler quelques années au sein de la maison du duc d'Orléans. À l'époque, c'est Gaston d'Orléans dont je vous parle. Puis, en 738, l'année de la naissance de Louis 14, il va entamer un nouveau voyage pour aller découvrir l'Inde, les Indes, comme on aurait dit à l'époque.

[00:09:52]

Et puis suivront un troisième voyage de 143 à 49, au cours duquel il se rendra à Java et reviendra par le Cap. Vous imaginez? Évidemment, quand on dit ça en trois mots, ça paraît tout simple. Mais à l'époque, c'est complètement dément. Et il effectuera encore deux autres voyages où il part en 751 et rentre en 55. Et puis un autre de 16, 157 à 62. Stéphane Irascibles Munira Simões nous dit le goût du commerce, mais aussi celui de l'aventure, lui fait choisir presque chaque fois un nouveau chemin.

[00:10:27]

Ainsi, rien que pour le Moyen-Orient, il sillonne le désert de Syrie, descend le tigre en radeau, traverse les montagnes kurdes par deux itinéraires très malaisé même de nos jours, et longe le grand désert iranien. Au cours de ces excursions, et malgré toutes les difficultés qu'il a pu rencontrer, notamment avec la Compagnie néerlandaise des Indes orientales qui va lui faire des misères pendant tous ses voyages. Tavernier va se tailler la grande réputation d'un négociant de bijoux hors pair.

[00:10:59]

Il est dans l'intimité des plus grands potentats indiens qui apprécient cet homme toujours affable, très robuste, capable de se montrer aussi coléreux parfois que extrêmement charmant.

[00:11:12]

En tout cas, un homme très tenace en affaires. A près de 60 ans maintenant, Tavernier est revenu en France de ses nombreux voyages, va se marier.

[00:11:21]

Pour autant, il ne mène pas une vie rangée et il décide bientôt de repartir, encore une fois pour les Indes.

[00:11:31]

C'est en 16 164 que Tavernier entreprend ce sixième voyage. Il va être reçu parce que maintenant, il a ses entrées partout où vous l'imaginez bien. Il va être reçu à Delhi par le Grand Moghol, ce très puissant souverain qui règne sur un vaste empire.

[00:11:49]

Je vous en parlait l'autre jour à propos de notre histoire des Indes et le Grand Moghol va le recevoir au sein d'un salon absolument richissime dont les trônes somptueux, tous plus précieux les uns que les autres, sont constellé de milliers de diamants, de rubis et d'émeraude. Citons encore Tavernier. Il n'était guère que dix heures du matin lorsque du discours de la beauté des femmes, on passa à un entretien plus sérieux qui fut de l'état présent de notre Europe. Le roi me fit sur ce sujet plusieurs questions de suite et la première fut de la France et de sa grandeur.

[00:12:25]

Me disant que tout ce qui venait de plus parfait et de plus excellent du côté de l'Occident sortait de la France. J'ai toujours plaisir à entendre un rare privilège qu'on va accorder à Tavernier puisque le gardien des joyaux du Grand Moghol va lui présenter les plus belles pièces d'une collection qui, sans doute à l'époque, est la plus riche du monde, notamment un joyau gros comme un neuf 286 carats. Vous imaginez ça?

[00:12:54]

Tavernier écrit Le grand Diamant est une rose ronde fort haute. D'un côté, à l'arête Damba, il y a un petit écran et une petite glace dans l'eau en hébel. Il pèse 319, ratissaient et demi qui font deux cent quatre vingts de nos carats.

[00:13:13]

Je suis complètement ébloui. Alors, il va profiter de ce voyage pour explorer également toute la vallée de Gol Conde. Et plus tard, il écrira Je fus le premier de l'Europe qui a ouvert le chemin, offrant jusqu'à ces mines qui sont les seuls lieux de la terre où on trouve du diamant.

[00:13:30]

C'était vrai à cette époque, en tout cas, bien sûr. Il va emporter avec lui toute une impressionnante cargaison d'une valeur de plus de quatre cents mille livres. C'est énorme. Il a de l'horlogerie, des vases de cristal, toutes sortes de pierres précieuses, de bijoux, de perles. Et puis. Et puis le fameux diamant bleu qui, selon la légende, ornait le front d'une grande statue en or du dieu Vishnou.

[00:13:53]

Il a été dérobé. Ce diamant dans un temple indien par un voleur qui, diton, aurait été, au moment même de sa sortie du temple, frappé par la foudre.

[00:14:04]

Et depuis ce jour, le diamant bleu est réputé porter malheur à tous ceux qui l'approchent de trop près. Voilà une autre Turcaret, il y a deux Ioane Yosef Fux, mais cette fois, une partie à trois, c'était l'ensemble Les passions de l'âme que dirigeait Meurette Lutti.

[00:15:08]

Franck Ferrand sur Radio Classique. Monsieur Tavernier est de retour de son sixième voyage et il va être reçu à la cour au château de Saint-Germain par Louis 14, auquel il présente plus de mille pierres précieuses, notamment le fameux diamant bleu. Bien sûr, le monarque achète 47 de ces pierres pour une somme colossale, l'équivalent de 800 kilos d'or pur, afin d'enrichir l'impressionnante collection d'œuvres d'art et de pierres et de pièces rares que possédait déjà la couronne de France. Louis 14 expose d'abord le diamant bleu au sein de son cabinet de curiosités à Saint-Germain, puis il va le faire retailler par le joaillier de la cour, Jean Pistant, qui mettra deux ans à dessiner, puis deux autres encore à extraire une pierre de 69 carats 72 facettes.

[00:15:58]

Il est devenu régulier, ce diamant qui, au départ, était bien sûr très irrégulier, et Louis 14 le portera en cravate lors des Fêtes et des réceptions à Versailles. Le diamant en question va faire partie des insignes de la Toison d'or. Il fera partie de la célèbre parure de couleur que porteront tous les rois jusqu'à la Révolution dans les très grandes occasions. En échange de ces somptueux présents, Louis 14, anobli Tavernier, ce dernier acquiert la baronnie d'Aubonne, en Suisse romande, près de Genève, avec le château qui va avec, bien entendu, et à l'emplacement du donjon d'origine.

[00:16:34]

Tavernier va faire construire une tour blanche de type oriental, surmontée d'un toit en bulbe, qui rappelle évidemment un minaret qui lui rappelle ses grands voyages. Il va faire aménager une salle de musique, etc. Il est devenu très riche. Tavernier, ça ne vous étonnera pas. À la fin des années 770, nous précise Christophe Dards, qui a préparé cette émission, Tavernier publie les comptes rendus de ses voyages.

[00:17:00]

Ces trois volumes de plus de 600 pages chacun sont une véritable mine pour tous ceux qui, évidemment, vont essayer de s'inscrire dans ses pensées, dans ses pas, toutes sortes d'informations sur les monnaies, les taux de change, les mesures commerciales et douanières, etc. Un guide de commerce et de négoce. Qu'a fait Tavernier qui, pour autant lui même d'abord, donne pas les affaires. D'ailleurs, en 784, à l'invitation du grand électeur Frédéric-Guillaume, il se rend à Berlin pour monter une compagnie des Indes prussiennes, donc, et va en prendre la direction.

[00:17:35]

L'affaire est conclue et Tavernier va rentrer à Paris pour financer ce projet. Sauf qu'à Paris l'attend une mauvaise nouvelle. En effet, en 785, on a révoqué l'édit de Nantes. N'est ce pas? Les protestants sont pourchassés. Tavernier est protestant. Il va devoir quitter la France, se réfugier en Suisse, non sans avoir perdu une grande partie de sa fortune à presque 84 ans. Notre infatigable aventurier entame un nouveau voyage pour les uns, il va passer cette fois par la Russie.

[00:18:06]

Traverser une partie de l'Asie centrale, bien sûr, mais c'est, si j'ose dire, le voyage de trop puisqu'après avoir été à Copenhague, à Stockholm, Jean-Baptiste Tavernier finira par mourir à Moscou en juillet 789. Il sera d'ailleurs inhumé dans le cimetière protestant de Moscou. Par son parcours, par ses voyages et ses récits qui comportent une part de légende sans doute, Tavernier a inspiré de nombreux auteurs, et notamment Montesquieu pour ses Lettres persanes, tandis que plus tard, Voltaire Diderot critiqueront les voyages de Tavernier.

[00:18:39]

Voltaire écrira de ses textes qu'il n'apprend guère qu'à connaître les grandes routes et les diamants.

[00:18:44]

Inutile de préciser que le vol du diamant bleu toute la légende qui l'entoure contribueront ensuite à rendre Tavernier plus célèbre, plus mystérieux, plus attrayant. Il est le découvreur, celui qui avait rapporté en Occident ce diamant, l'un des portraits qui résume peut être le mieux la vie de notre personnage, personnage tellement atypique du 17ème siècle. Ce portrait nous a été laissé en vert par un de ses contemporains et c'est Boileau.

[00:19:10]

Bien sûr, je cite Boileau. De Paris à Delhi, du couchant à l'aurore, ce fameux voyageur courra plus d'une fois de l'Inde et de l'Inde, et de l'Inde et de l'IDA. Il fréquenta les rois sur les bords du Gange. On le révérend encore en tout lieu. Sa vertu fut son plus sûr appui. Et bien quant au climat de retour aujourd'hui en foule à nos yeux, il présente les plus rares trésors que le soleil enfante. Il n'a rien rapporté de Sirard que lui.

[00:19:52]

Je n'ai rien de Sirard à vous présenter, moi, que Christian Morin, Christian, tant ce que va dire Voltaire. Je pensais, en vous écoutant que vous avez bien fait un jour de passer la bague au doigt à l'histoire. Vous voyez vous, n'est ce pas? Mais c'est joliment dit. Chaque matin, vous apportez quelques perles, comme dirait Méphistophélès. Oui, Méphisto de Gono. Que la bague au doigt, que la bague au doigt. Merci beaucoup pour cette belle histoire.

[00:20:18]

Encore ce matin et à demain, bien sûr. Passer une.