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Vivons heureux.

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Avant la fin du monde, un podcast de Delphine s'altère chaque mois des pistes et des idées pour surnager dans la catastrophe écologique, la crise économique, la crise climatique, la crise sociale et tout ce qui remet en cause nos modèles de société.

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Point de départ la vie de tous les jours et les paroles savantes, des histoires individuelles, des expériences collectives pour nous aider à imaginer des solutions.

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Episode 3 Comment dresser son smartphone? Bonjour Monsieur, on me téléphone parce que je ne suis jamais arrivé à configurer mon téléphone pour recevoir, mais maintenant je n'arrive plus à recevoir mes mails sur mon téléphone.

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Alors ça a commencé un peu à merdoie si je puis me permettre à partir de cette migration.

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Je me souviens très bien du jour où mon vieux Nokia 33 10 a rendu l'âme, il y a presque 10 ans maintenant. D'accord, je suis rentré dans une boutique de téléphonie mobile et j'ai acheté mon tout premier smartphone.

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Ce que j'essaie de faire maintenant, évidemment.

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Sur le coup, je n'étais pas plus surexcité que ça. L'écran tactile, l'accès à Internet, même l'appareil photo intégré, je trouvais ça gadget.

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Bon, alors là, j'arrive pas à le faire, ce petit machin noir, tout fin, tout lisse. Je ne m'en suis pas méfié au début.

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Aujourd'hui, il a pris une place délirante dans ma vie et je ne sais pas quoi en penser à sa charge, mais lentement.

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Est ce que c'est un truc génial qui me relie au monde entier? Ou une vraie saloperie? Un deuxième cerveau, mais qui me rend pas plus intelligente?

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Ben non, ben je suis désolé sur 40 pour cent de plus à 18h. Un remède ou un poison?

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Souvent, je me demande si ce n'était pas mieux avant, quand ça n'existait pas.

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Ce qui ne m'empêche pas de continuels consulter 80 fois par jour. Je crois que c'est ça qui me gène le plus avec mon smartphone.

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Cette impression de bien contrôler les choses, comme dans une relation amour haine série. Parce qu'au fond de moi, je sais très bien que je ne pourrais plus m'en passer.

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Alors, dans cet épisode, je voudrais essayer au moins de le regarder en face.

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Ce petit objet que j'ai toujours là, à portée de main pour me raconter d'histoire, me demandais ce qui se cache vraiment derrière son écran, ce que ça fait à la planète, à nos vies, à nos cerveaux, à nos enfants amis et surtout, si c'est possible de vivre avec.

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Sans renoncer complètement à sa liberté, à son esprit critique, à son intégrité morale.

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Bref, de reprendre le contrôle. Vivons heureux. Avant la fin du monde, un podcast de Delphine Celtel réalisé par Arnaud Forests et produit par Arte Radio.

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Le problème, c'est qu'on a l'impression que c'est petit, que ça ne pollue pas. Il n'y a pas beaucoup de matériaux dedans. Il n'y a quasiment rien d'autre de fabriqué par les êtres humains qui soient aussi toxiques, intenses en matières premières que nos smartphones. En fait, on ne se rend pas compte, mais dans un smartphone d'aujourd'hui, on a un super calculateur de la NASA d'il y a 20 ans. Donc, c'est vraiment une source d'impact colossale.

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Alors pour commencer, éco anxiétés oblige, je suis allé voir tout un tas de spécialistes de ce qu'on appelle l'impact environnemental du numérique, comme Frédéric Bordage que l'on vient d'entendre. Il m'a expliqué ce dont je me doutais déjà un peu, mais je m'arranger pour pas trop y penser que l'objet smartphone, ce rectangle noir de haute technologie, inoffensif en apparence, là, au fond de ma poche, est bien faite. C'est une vraie bombe écologique.

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Concrètement, quand je regarde votre smartphone, ce que je vois, c'est la quantité de matières premières nécessaires pour fabriquer ce petit objet de 150 grammes. C'est à peu près 500 à 1000 fois son poids en matières premières. On a cette notion de cadeau écologique, donc la quantité de matières premières nécessaires pour le fabriquer, qui nous donne une idée de son intensité. Est ce qu'il va contribuer à épuiser les ressources naturelles non renouvelables minerais, etc. Finalement, proportionnellement plus ou moins qu'une voiture est bien, beaucoup plus qu'une voiture, beaucoup plus qu'un réfrigérateur, bien plus que 90 des objets manufacturés que j'ai chez moi.

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Ce qui explique cela, c'est le fait que ça soit très miniaturisé pour produire un microprocesseur extrêmement petit comme celui qu'on va avoir dans un smartphone pour produire l'écran qui a une très haute définition des tout petits transistors au sein du microprocesseur. Donc vraiment, de miniaturiser l'ensemble des composants. On a besoin de beaucoup d'énergie et des processus industriels particulièrement coûteux qui vont consommer beaucoup d'énergie, mais aussi beaucoup de matériaux. Ce n'est pas très sexy, a expliqué dans un podcast.

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Mais donc, un des gros problème, c'est que pour fabriquer ces bijoux high tech, en plus du pétrole pour les parties en plastique, il faut beaucoup, beaucoup de métaux, de minerais et d'éléments chimiques différents. Plus d'une quarantaine, en fait, d'après Philippe Bhiri. Il est ingénieur spécialiste de l'épuisement des ressources minérales.

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On va trouver des choses un peu classiques, comme le cuivre, qui va servir à travailler dans les contacteurs, dans les câbles, dans les interrupteurs. Mais on va trouver aussi des métaux précieux, comme l'argent qui sert beaucoup dans l'électronique, comme l'or qu'on trouve dans les microprocesseurs, les métaux comme le lithium ou le cobalt dans les batteries. Et puis ensuite, vous avez trouvé plein de poudre de perlimpinpin. Un peu bizarre, alors? Terbium, l'yttrium, le gadolinium qui vont servir à faire des couleurs dans les écrans LCD.

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Du néodyme qui sert dans les micros, dans les haut parleurs. Vous avez trouvé du platine dans les disques durs? Vous allez trouver de l'indium qui est utilisé pour avoir un écran tactile? L'oxyde d'indium étain, c'est un peu près le seul composants chimiques qu'on a trouvé, qui soit à la fois transparent et conducteur et qui permet de détecter qu'on appuie avec le doigt. Voilà à peu près le genre de choses qu'on trouve dans nos smartphones.

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Ils ont des jolis noms poétiques. Tous ces composants que m'a énuméré Philippe B. Oui, mais ils ont surtout un défaut, c'est qu'on les trouve pas juste. On en ramassant des petits morceaux par terre. Dans la liste des ingrédients de nos smartphones, il y a les fameux métaux rares ou terres rares.

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Moi, je pensais que ça voulait dire qu'il y en avait très peu sur la planète. Mais Frédéric Bordage m'a expliqué que c'est pas tout à fait ça que ça veut dire.

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Les terres rares sont des minerais qui sont extrêmement abondants et qui sont très bien répartis partout sur terre. Par contre, ils sont en très faible densité et donc il faut extraire de très grandes quantités de terre. Donc, il faut brasser bien plus de tonnes ou de mètres cubes de terre pour pouvoir en extraire de petites quantités de ces minerais. Et c'est ce qui fait le fait que ça coûte cher en main d'œuvre et qu'il y a beaucoup d'impacts environnementaux associés à l'extraction de ces fameux rares qui sont des minerais comme les autres, en fait.

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Impact environnemental, c'est clair, c'est la formule consacrée, mais c'est un peu abstrait, presqu'un euphémisme au fond. Alors j'ai appelé Françoise Berthou à son enregistrement, une ingénieure en recherche informatique et elle m'en a remis une couche.

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On entend tous parler de problématiques de mines, notamment en Amérique du Sud, mais aussi en Afrique, parce que ça commence à poser des problèmes pour les populations locales. Ça détruit plus de paysages. D'ailleurs, au passage, du coup, ça détruit de la biodiversité. Il y a des tas de manifestations de populations locales. On a même vu ça en Guyane française pour l'or, qui ne veulent pas de mines parce qu'elles savent que derrière, il va y avoir des problèmes d'eau, parce que ces mines utilisent de l'eau dont les gens ont besoin pour arroser leur jardin.

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Et puis, il va y avoir des problèmes de pollution de.

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C'est pour cette raison que les pays développés qui exploitaient des gisements de terres rares ont décidé d'exporter finalement de déléguer cette production à la Chine, qui en a fait une véritable arme économique et qui livrent une guerre économique au reste du monde depuis quinze ou vingt ans. Parce que c'était plus facile d'aller exporter nos impacts environnementaux et les aspects sociaux dans un pays comme la Chine plutôt que de les conserver chez nous. Donc, en fait, on a littéralement arrêté de produire des terres rares dans les pays développés parce que ça avait trop d'impact sur l'environnement.

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On a préféré l'exporter ailleurs en Chine. Donc, normalement, maintenant, grâce à Françoise Berthou et Frédéric Bordage, quand je caresse ma petite merveille d'écran tactile en étant d'oxyde d'indium, je suis plus censé voir seulement ça.

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Attention, ça, ça.

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Enfin! Non, c'est aussi ça qu'il faudrait que j'arrive à visualiser les 40.000 enfants esclaves en République démocratique du Congo qui travaillent dans les mines de coltan. Les paysages défoncés, les nappes phréatiques à sec. Et on n'a même pas parlé des datacenters qui stockent nos données et marchent souvent au charbon. C'est moche ce qui se cache derrière mon téléphone. Mais ce qui est encore plus moche quelque part, c'est la manière dont j'arrive à l'oublier, à regarder ailleurs. Brusvily Parce que c'est trop moche, justement, justement.

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Et que mon cerveau résiste. Je me retrouve face à un constat implacable mon smartphone est une saloperie d'appareil du diable qui fait du mal aux gens et à la planète pour être cohérente.

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Il faudrait que j'arrête tout de suite. Mais ça, c'est pas possible, c'est trop compliqué d'y renoncer. Et moi, je suis plutôt quelqu'un de faible. On a toute la vie.

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Donc, l'autre solution, c'est de me raconter des histoires pour diminuer le malaise en fabriquant mes propres petites fake news dans ma tête, par exemple, en me disant c'est pas grave si ça pollue tant que ça, les smartphones recyclés.

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D'abord, pour pouvoir les recycler, il faudrait les collecter. Or, on est très, très loin de collecter même 50 des smartphones qui sont qui existent sur Terre. Je crois que les chiffres d'aujourd'hui, c'est entre 15 et 20 pourcent. Tous les autres, ils se retrouvent dans des tiroirs. C'est encore le moins pire, mais surtout dans des lieux inadaptés, dans la nature, dans des décharges sauvages, etc.

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Ça, c'est le premier problème. A la rigueur, on pourrait faire des progrès sur la collecte, mais il y en a encore un autre, plus compliqué.

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Dans une mine, par exemple de cuivre, on trouve pas seulement du cuivre. Souvent, il y a d'autres métaux qui sont associés au maximum cinq ou six métaux associés qu'on va pouvoir récupérer. Mais dans un smartphone, il y en a 50 des métaux. Donc, en fait, vous vous retrouvez si vous déchiqueteuse, si vous faites bouillir le truc pour que ça fasse une espèce de pâte de métaux. Vous vous retrouvez avec une pâte. C'est une image, bien sûr, mais vous vous retrouvez avec une pâte où il y a 50 métaux qui sont tous mélangés et donc là énergétiquement pour aller récupérer chacun des 50 métaux.

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En fait, c'est d'abord technologiquement, c'est très compliqué. Et puis, sur le plan énergétique, c'est extrêmement lourd aussi. En fait, la difficulté qu'on a avec les smartphones, c'est qu'ils sont d'ailleurs l'ensemble des objets électroniques qui ne sont pas conçus pour être recyclés. En tenant compte de cette problématique là, on pourrait se dire on va faire des progrès, ça va s'améliorer. Sauf que quand on regarde les 20 dernières années, ça, c'est quand même pas tant.

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Mais ça s'est amélioré. Mais il reste encore une grande marge de progrès. Et puis, il faut quand même souligner là, c'est qu'on est quand même dans une urgence climatique. On est dans une urgence environnementale. Aujourd'hui, on peut toujours faire des plans sur la comète à se dire qu'on va faire des progrès, mais ça ne suffit plus. Il y a trop d'urgences. Donc aujourd'hui, la mesure la plus efficace qu'on puisse faire par rapport à ça, c'est juste d'arrêter de consommer autant de smartphones.

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Je dis pas de supprimer de la Terre les smartphones. Je ne dis pas ça, mais arrêtez de les consommer à ce rythme. Ce mois ci, un euro pour manger? En fait, on focalise actuellement l'attention des consommateurs, des citoyens, des citoyennes sur les usages, alors que deux tiers à trois quarts des impacts environnementaux du numérique sont directement liés à la fabrication des terminaux utilisateurs. C'est clairement la fabrication de nos smartphones qui pose problème. Et si l'on veut agir de façon efficace au quotidien en tant que citoyennes et citoyens, c'est très simple.

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Il faut juste allonger la durée de vie de notre smartphone plutôt que de céder au bout de 18 mois à Paris, 24 mois en France.

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Céder aux sirènes marketing et remplacer un smartphone qui fonctionne encore bien.

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Il faut simplement ne rien faire pour le regarder au fond de sa poche le plus longtemps possible, jusqu'à temps qu'il rende vraiment la. C'est finalement très simple.

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Dans ma famille, on est protestant des deux côtés depuis, à mon avis, au moins 28 générations. Donc garder son téléphone portable le plus longtemps possible. C'est une solution qui m'arrange plutôt, qui flatte une forme de radinerie héréditaire. Mais ce n'est pas si simple, en fait, de les maintenir en vie, ces engins, en tout cas moins d'extase. D-Track? Un peu. Je me sens comme une poule devant un couteau.

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Le coté high tech.

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Il est paradoxal puisque d'un côté, quand on utilise ces termes, on a l'impression de machines extrêmement perfectionnées.

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Mais derrière, il y a une fragilité qui est liée au degré de complexité de tous ces objets dans une sorte de boîte noire.

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Un peu le smartphone. C'est un peu l'analogie avec cette espèce de monolithe noir. Dans le film 2001, l'Odyssée de l'espace est à la fois des singes et les humains tourne autour en se demandant Qu'est ce que c'est que ce truc et comment ça fonctionne?

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Nicolas Nova a passé trois ans à enquêter sur les usagers de smartphones.

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En fait. C'est dans le répertoire à observer comment les gens vivent avec le numéro en France, en Suisse, aux Etats-Unis.

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Je sais qu'au Japon, il y a une partie de mes contacts qui a disparu, mais ils sont encore en mémoire, c'est à dire?

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Ce qui se dégage de son enquête, sans trop de surprise, c'est que la majorité des consommateurs de la planète sont comme moi avec son numéro d'appel, car ils ne savent pas comment l'ouvrir, cette boîte noire. Ils n'osent pas inscrire dans mon répertoire et donc il ne faut pas s'étonner qu'ils se fassent tranquillement pigeonner.

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C'est précisément ce que les fabricants, les opérateurs ne veulent pas, c'est qu'on aille farfouiller dans les appareils, qu'on apprenne à les réparer, à se débrouiller tout seul, qu'on change leur manière de fonctionner.

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La majorité des smartphones sont effectivement pas faits pour être ouverts, réparés, transformés, alors ils le sont dans la pratique avec Apple ou d'autres fabricants à leur suite, ont utilisé des villes avec cinq clubs. On dit Pinta, l'Eubée qui faisait qu'il y avait, au moment où c'est sorti, pas de tournevis en magasin pour les ouvrir. Évidemment, quelque temps après, il y a toujours des gens de manière non autorisée qui ont développé ces tournevis. Donc, il y a une espèce de course aux armements où il s'est aussi ressenti comme si, comme si on était contre nous en tant que utilisateurs.

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En général, à ce stade de la réflexion, je passe par une phase bonne résolution écoresponsable. Et oui, j'avoue, j'ai caressé le projet flamboyant de créer un Rippert café associatif mensuel, mais ça a même pas duré deux minutes parce que Nicolas Nova m'a expliqué que ça existe. Pas vraiment. En fait, ce genre d'initiative pour les smartphones. Ou plutôt, quand ça existe, personne n'y va. C'est pas comme un vélo ou un grille pain. Un smartphone, si tu veux reprendre la main sur l'appareil, il faut former à la micro soudure de composants électroniques ou apprendre le chinois pour commander sur le Net des pièces détachées qui sont toutes fabriquées à Shenzhen ou carrément coder.

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Comment hacker? Tu peux le faire, mais c'est un travail à mi temps. Ce qui est plus surprenant dans ce que me dit Nicolas Nova, c'est qu'à mon petit niveau descente chez le gars du café Internet au coin de la rue, c'est déjà pas si mal. Toutes ces petites boutiques, qui ne sont pas forcément affiliées aux industriels, ont une maîtrise de la réparation.

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Certains essayent de démonter et de comprendre comment ça fonctionne, de comparer les pièces détachées de tels modèles par rapport à telle autre, d'accéder à des ressources en ligne sur le sujet. Il y a des rapports plus ou moins clandestins qui circulent. Il y a les groupes WhatsApp dans lequel ces réparateurs échangent sur ces questions.

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Quand vous avez les magasins, oui. Et vous avez le tournevis pour ouvrir.

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Ces lieux sont les nouveaux cordonniers, les nouveaux rémouleur fureteurs, un de nos objets à venir vous dessouder séparés.

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D'accord, OK, pourquoi pas?

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Admettons que cette petite boutique en bas de chez moi soit comme une petite poche de résistance à l'obsolescence programmée et à la dérive consumériste que nous impose les fabricants.

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Mais le monsieur là, il vient m'encourager à télécharger la dernière mise à jour proposée par mon téléphone pour que je puisse télécharger la toute nouvelle version de mon application Vélib ou Petit Bambou, alors que, justement, c'est ça qui rend si fragile téléphone. Ce rythme effréné des innovations permanentes qui servent en plus à pas grand chose. Juste à pouvoir mettre des étoiles dans les yeux d'une nouvelle émojis. C'est ça qui nous oblige à tout le temps changer de modèle. Bonjour, je suis ravi de vous accueillir et de vous présenter le programme de méditation.

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Bonjour, prenons la route en passant par Rue de Danzig, Paris vous propose des sans abri qui veulent aller voir les bordeaux. Ce trajet est plus court de 6 minutes que le trajet Boulevard. Le fabricant invite toute la société, fonctionne avec le Ritmo qui devient compatible avec les smartphones. Mais quand on n'a pas ça, il faut se décaler de l'ensemble de la société. On ne peut pas juste se décaler de l'objet.

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Il faut se décaler de l'ensemble de la société, vivre. Autrement dit, pas vivre complètement à la marge, mais un petit peu. Et du coup, ça demande vraiment un effort et c'est vrai que si on s'y mettait tous ensemble, on pourrait dire eh ben voilà, on va demander à Apple de nous faire un téléphone avec moins de fonctionnalités pour aller vers les justes besoins. Par exemple, franchement, mesurer mes pulsations cardiaques toute la journée ou savoir combien je cours, je m'en fiche.

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Moi, je le sais dans mon corps, si je suis en forme ou non, je n'ai pas besoin d'un appareil pour me dire. Il y a des gens qui en ont besoin parce qu'il y a des gens qui sont vraiment des vrais problèmes, même si la plupart des personnes qui utilisent ces fonctionnalités n'ont pas besoin de ça. Cet entretien avec Françoise Bertouille, je l'ai fait en plein confinement, à distance par Skype. Elle était chez elle, près de Grenoble.

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Sur l'écran, je voyais le ciel et la campagne à travers la fenêtre.

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Derrière elle. Le ralentissement général, Les petits oiseaux, qui chantait sans aucun bruit autour, est ce que c'est ça qui nous a fait croire ce jour là? Toutes les deux. Un monde où on serait enfin capable de se poser cinq minutes ensemble pour se mettre d'accord sur le juste besoin numérique. Et puis, à peine un mois plus tard, à la radio, je suis tombé sur ça.

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On en entend parler depuis des années. Le fera bientôt partie de notre quotidien. La 5G, une 4G puissance 10 qui permettra de regarder des vidéos à très haut débit, de télécharger des films en quelques minutes. Bref, ne pas y aller.

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Ce serait le retour à la lampe à huile et au modèle Hamiche, selon Emmanuel Macron. Et là, j'ai compris que je me réveillais un peu tard quand on était déjà tous montés dans le TGV comme des zombies, sans que personne ne nous ait demandé si on avait vraiment envie d'embarquer à bord du train fou qui nous emmène à toute vitesse au pays des frigos. Qui parle? Ce qu'il faut comprendre avec la 5G, c'est que ça ne remplace pas la 3G et la 4G par de la 5G.

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On ajoute un réseau 5G à un réseau 3G et 4G existant qui va continuer à tourner et dont les antennes, c'est principalement ça puisqu'il faut émettre des ondes autour de l'antenne. Donc c'est ça qui est énergivore. Les premières estimations qui sortent des pays qui ont commencé à déployer, comme la Corée ou la Chine, montrent qu'on pourrait multiplier par trois ou quatre la consommation du réseau de téléphonie mobile. Et pour quel bénéfice en face? Pour la capacité à récupérer son film en deux secondes pour peut être un jour, avoir des voitures autonomes.

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Parce que c'est ça qui consomme beaucoup de données. Et puis, pour faire la smart city où on va tout savoir. La montre connectée qui prend notre température et la pulsation, ça va être le réfrigérateur qui fait ses courses tout seul. Voilà donc ce qu'on appelle l'Internet des objets. Je ne suis pas sûr qu'aujourd'hui, le consommateur citoyen forcément envie que sa priorité soit le réfrigérateur qui fait ses courses tout seul. C'est Ewart sont riches en protéines. Je me suis permis d'en commander deux.

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J'espère que vous aimerez vivant, erraient avant la fin du monde Surui. Au rythme actuel, au coût actuel, avec les technologies actuelles, on est face à un mur. Le numérique est une ressource critique non renouvelable qui sera épuisée dans trente ans. Et donc, il faut trouver des alternatives au tout numérique. Le sujet, c'est que le tout numérique est un luxe qu'on ne peut plus se permettre en tant que société. Le numérique devrait être un outil au service de la résilience de l'humanité.

[00:23:25]

Aujourd'hui, c'est un outil qui précipite notre effondrement. Littéralement. Pourquoi? Parce que pour une dernière nuit d'ivresse numérique, on épuise à très grande vitesse cette ressource.

[00:23:39]

Voilà, c'est comme ça grâce à Philippe Bioy et à Frédéric Bordage, que j'ai entamé une nouvelle phase dans ma vie, après l'aveuglement volontaire, la lucidité anxiogène. Maintenant, dès que je dégaine mon téléphone pour n'importe quoi, écouter un clip de France Gall en streaming dans le métro, regardez le temps qu'il va faire aujourd'hui. Chez mes parents, j'ai des visions de Sodome et Gomorrhe. Mais bizarrement, cette prise de conscience ne débouche pas sur grand chose d'autre.

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Je laisse tomber, je te dis Chloé, excellente séant. Je te jure. Et aussi Margot aussi. Depuis qu'elle a 7 ans. Moment jugé trop tôt?

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Oui, mais tout le monde, mais autour de toi, tu verras bien que personne ne l'appelle et surtout que moi, après, je suis toute seule et. Bah écoute! Il faut maintenant citer toute seule, toute seule. Lorsque tu auras mon téléphone, tu fous que les autres le font. On a envie de le faire. Moi, j'ai envie de façon, si j'en ai pas. Ce sera juste. Je tirais seul, fait ce que tout le monde donnera.

[00:24:59]

Et aussi, tu dis c'est pas avant 15 ans, 15 ans, mais si tu veux Marrow. Ludivine, elle, s'occupe bien de ses enfants. Et pourtant, ces enfants ont leur iPod depuis sept ans. Flipper Monfreid, ça fait flipper que j'ai cauchois comme tout le monde. Un but commun?

[00:25:21]

Je flippe un peu en permanence tous azimuts pour la planète en péril, pour ma fille de 10 ans et demi qui va se faire cyber, harceler sur Snapchat ou lobotomisés Partick Talk, mais j'en reste à ce stade qui est assez confortable au fond, plus confortable en tout cas, que d'avoir à poser un acte radical.

[00:25:40]

J'ai lu le truc. Combien tu regardes toi par jour?

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Je gagne sur tous les tableaux, à peu près comme ce que je suis en train de faire là avec vous.

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Ben Makhoul, grand public le 29, comme il a vous aussi qui l'utilisait. Maintenant, je vous montre que je ne cautionne pas ce monde absurde et hyperconnecté.

[00:25:59]

Et après, je retourne crawlé sur mon iPhone par rapport à la semaine dernière sur les années 30, alors j'ai 32%.

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Heureusement, il y a des gens comme Ann-Sophie, Jack qui ont d'autres stratégies. Un jour, j'avais rendez vous chez mon kiné. J'y allais toutes les semaines, mes rendez vous étaient réguliers. Elle a écrit un livre qui s'appelle Déclic avec un startupers repenti, Maxime Guedj, et en prenant mon téléphone quelques heures avant mon rendez vous.

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Je vois que mon téléphone est un iPhone, me dit il faut partir à telle heure pour arriver à l'heure à votre rendez vous rue Groison à Tours, alors que je n'avais strictement rien spécifié. Je ne savais absolument rien rentrée dans mon agenda. Et là, j'avoue que ça m'a fait flipper. J'ai eu peur. Je me suis dit je lui avais rien demandé, en fait. Donc, c'était lâche, quoi? Et à partir de ce moment là, j'ai réalisé qu'en effet, dès que j'ai voyagé dans ma ville, que je connais par cœur, automatiquement, je mettais le GPS pour avoir le chemin le plus court alors que ma ville, je la connais.

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J'ai compris que je finissais par perdre mon rapport à la géographie, à la cartographie.

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À ma place dans l'espace, c'est à dire que je confié à cette petite machine le soin de me dire où j'allais. Alors que je pouvais très bien le faire toute seule, même dans des lieux que je ne connais pas. Après tout, il suffit de regarder à l'avance et à partir de là, j'ai trouvé que ce que je me faisais déposséder de quelque chose me faisait déposséder de l'espace. En fait. Là, il y a eu un point de bascule, ça m'a fait revisiter toute la façon dont j'ai utilisé cet outil.

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A partir de là, j'ai acheté un Michelin pour pouvoir voyager à l'arrière de ma voiture. C'est un vieux truc, ça. Y'a pas les bonnes, les bonnes routes. En tout cas, il n'y a pas les nouvelles. Mais au moins, je me dis que quand je vais me déplacer partout en France, je vais tâcher de me repérer dans l'espace. Comme vous le savez très bien le faire avant. Et voilà comment on peut aussi dire à l'objet qui a tendance à être très intrusif.

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Ben non, on reste à ta place faite grâce à ta place d'outils. Tu es là pour m'aider, mais tu n'es pas là pour me dire quoi faire. Il n'y a pas si longtemps encore, je me serais moquer gentiment de sa carte Michelin en papier, mais maintenant, je me demande pourquoi il n'y a pas un peu plus d'Anne-Sophie Jacques sur la planète, pourquoi on continue à faire ce que l'on fait quand on sait ce que l'on sait. Ça me rappelle ce qu'a expliqué le neuroscientifique Sébastien Beauclerc il y a quelques mois, dans le premier épisode du podcast.

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Pour lui, si on fonce comme ça dans le mur en toute connaissance de cause, ce n'est pas vraiment de notre faute. Ça vient de notre cerveau, en fait. Notre cerveau vit. Il vient de dépoque, très, très reculé et c'est un organe qui est très puissant, mais qui s'est construit au fil de millions d'années d'évolution.

[00:29:12]

Et donc, il a des motivations très profondes qui lui sont dictées par des structures cérébrales qui sont situées vraiment au coeur du cerveau, et notamment par une zone clé qui s'appelle le striatum, et ce striatum nous incite à rechercher certains comportements sans même qu'on s'en rende compte en nous récompensons avec du plaisir quand on le fait et le plaisir qu'il nous donne avec cette fameuse molécule qui s'appelle la dopamine.

[00:29:40]

Pendant toutes ces époques paléolithique, chez nos ancêtres préhistoriques, on a survécu en en réalisant ces comportements qui étaient gage de survie et qui, à chaque fois, nous donnaient de la dopamine pour nous récompenser, pour nous inciter à continuer. Parmi ces grands comportements, il y avait notamment la recherche d'informations absolument cruciales pour un d'hominidés dans la savane pour survivre. Par exemple, est essentiel de repérer les signes de passage d'un animal, une trace de pas dans la boue séchée, une empreinte et de savoir extraire l'information.

[00:30:12]

L'interprétez savoir si c'est un prédateur ou une proie parce que c'est la vie ou la mort.

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Notre cerveau s'est développé pour être extrêmement sensible à l'information. Ce centre cérébral qui vient du fond des âges et qui a été habitué à nous donner de la dopamine chaque fois qu'on trouvait de l'information, se retrouve d'un seul coup parachuté dans un monde qui est saturé d'informations. Il est absolument incapable de résister parce que lui a été programmé pour prendre toute information qui se présente sans limite fixée a priori. Le résultat est catastrophique, le résultat, c'est exactement comme pour l'alimentation.

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C'est le même principe on a besoin inassouvi au départ et qui rencontre une société de pléthores. Ça donne l'obésité et pour l'information, ça donne l'info obésité. A cela s'ajoute le fait que ce système de dopamine dans notre striatum, il a tendance à se lasser.

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C'est à dire que si on lui donne constamment la même quantité de stimulations, en l'occurrence la même quantité d'informations, finalement, au bout d'un moment, ça l'ennuie un peu. Et le seul moyen de relancer la production de dopamine, c'est d'augmenter les doses. Donc, on ne peut pas se détacher finalement du support d'information si on quitte ces notifications, si on quitte son réseau social à ce moment là, il est vide et donc c'est vraiment une forme d'addiction qui fait que finalement, on consomme de l'information comme de la matière première.

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Mais inutile. Ça tourne en boucle parce qu'en fait l'offre d'information et dépasse les capacités d'un cerveau humain aujourd'hui.

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Là, je suis pas tout à fait d'accord que c'est inutile ou que ça tourne en boucle. Tout ce temps passé à s'informer sur nos téléphones, ce n'est pas exactement du temps perdu. Ce serait trop facile de verser comme ça dans la techno phobie primaire, par exemple, le livre de Sébastien Belair, Le bug humain, précisément. Et je suis tombé dessus en donnant un soir sur mon smartphone.

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Mais bon, pour toutes les fois où, effectivement, je reste scotché en position junky sur mon écran tactile, je suis contente d'avoir un diagnostic à poser. Homo erectus téléguidé par ses neurones. Donc, je me demande Ann-Sophie GIAC, pourquoi elle? Elle arrive à résister? Elle a pas le cerveau cablée pareil que moi.

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Pire, c'est à dire que depuis le mois d'août, je ne lis plus une seule actualité.

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C'est à dire que non seulement sur mon téléphone, je n'ai plus accès à l'application du monde. Je lisais tous les jours, mais je n'y vais plus du tout. C'est derche au courant de rien. Je viens vous voir ici à Paris. Je ne sais pas du tout en Elco vide. Je ne sais pas du tout. Je veux pas que je m'en fous. Au contraire, je suis quelqu'un de très intéressé et très investi dans la politique. Mais je fais la démarche depuis deux mois et demi.

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J'ai l'impression d'être au cercle des Alcooliques anonymes, mais j'ai fait la démarche de ne plus m'informer de ce qui se passe dans le monde pour récupérer de l'espace, vraiment, et une qualité de réflexion, d'analyse que j'avais totalement perdue. Donc, les amis à qui je dis ça sont ahuris, bien sûr, et j'ai une amie l'autre jour qui me dit Oui, c'est bien tu. Tu peux, t'as le loisir, mais moi, je suis prof à la fac quand j'arrive devant mes étudiants, il faut que je sache un peu ce qui se passe quand même dans la vie et je lui ai dit Hé bien pourquoi, après tout, t'as le droit?

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En fait, t'as le droit d'arriver devant eux et de leur dire Désolé, mes étudiantes, mes étudiants. Peut être que je vais vous sembler à l'ouest sur des choses, mais ce n'est pas grave. Je vous le dis et je m'y autorise et j'aimerais que vous m'y autorisez. Et elle m'a regardé et m'a dit C'est une bonne idée. On peut vraiment prendre ce droit à la déconnexion et le droit de ne plus être complètement malmené parce que je trouve que c'est de la maltraitance par ce flux d'information de magma bouillant.

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C'était un droit que j'invite tout le monde à apprendre. Trop forte? Anne-Sophie Jacques plus forte que son striatum. Mais est ce qu'elle pourra tenir longtemps comme ça? Surtout que si j'ai bien compris Sébastien Belair, le smartphone de D-Track, pas seulement notre besoin primitif d'information dans notre cerveau préhistorique. Il y a aussi d'autres besoins qui nous rendent tout aussi dépendants à notre smartphone. Le besoin de statut social, par exemple.

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Aujourd'hui, on arrive dans un monde où les possibilités d'avoir du statut social sont rendues illimitées par le côté virtuel de la chose.

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Quand vous allez sur les réseaux sociaux aujourd'hui, vous avez deux milliards de personnes par jour qui se connectent à des réseaux sociaux et qui peuvent tous, quelque part, gagner du statut social sur un mode virtuel.

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Ça, c'est des choses qu'on observe en Irem aujourd'hui dans les laboratoires de neurosciences. On peut voir en direct ce qui se passe dans le cerveau d'un internaute quand il va sur un réseau social, quand il gagne un like. Libération de dopamine quand il perd alike, privation de dopamine. Évidemment, il faut y retourner sans arrêt pour maintenir la machine à dopamine en route.

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A cela s'ajoute aussi un besoin peut être même antérieur à l'homme sur la planète qui existait déjà chez les premiers êtres vivants, même chez les premières bactéries, il y a des milliards d'années, dans les océans qui avaient un principe fondamental ancré dans leurs gènes, c'est de minimiser les dépenses d'énergie. Quand vous êtes un être vivant dans un milieu hostile, vous devez sans arrêt minimiser vos dépenses d'énergie et maximiser vos entrées d'énergie, ce qui fait que vous vivez. Ça s'appelle l'homéostasie et dans le cerveau humain, ça se matérialise par des neurones très précis de notre striatum qui nous récompense par de la dopamine à chaque fois qu'on arrive à minimiser nos efforts.

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Donc, on cherche en permanence à en faire le moins possible.

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Alors, quand vous avez la possibilité d'avoir de l'information et d'avoir du statut social tout en minimisant vos efforts simplement en touchant un écran, en sortant de appareil de votre poche.

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Là, vous avez finalement la quadrature du cercle. Vous arrivez à résoudre l'équation ultime de notre striatum qui veut avoir le plus d'informations et le plus de statut social tout en faisant le moins d'efforts possible.

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Vertigineux. Un petit peu les neurosciences, ça pourrait même rendre carrément fataliste. Faut se méfier. Mais ça y est. Enfin, j'ai l'impression de comprendre pourquoi je me sens comme un zombie, incapable de réagir, de décrocher de ce foutu smartphone. Et c'est peut être ça, le déclic que j'attendais désespérément depuis le début. Tilté que dans cette histoire, mon cerveau est pris au piège de son propre jeu. Alors, bien sûr, c'est juste un début, un modeste frémissement.

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Mais peut être que je tire là une piste pour reprendre le contrôle. Résister un peu plus dignement à toute cette économie du numérique qui, pendant ce temps, exploite joyeusement les faiblesses de mon striatum et mes données personnelles. L'hiver dernier, j'avais installé un jeu de Scrabble pour jouer au Scrabble. Je pouvais jouer avec ma sœur. C'était super et c'était un super environnement avec des couleurs chatoyantes. C'était chaleureux et j'ai réalisé que je commençais à jouer, à aller en me couchant vers 22 heures et qu'à une heure du matin, j'étais toujours dessus.

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Le dispositif faisait que j'avais toujours envie de faire une autre partie et donc il faut justement interroger cet usage qui fait qu'on bloque, on bloque littéralement, on bloque parce que l'application, le jeu, en l'occurrence l'environnement, fait tout pour qu'on reste là.

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Pourquoi il en reste? Parce que plus je joue et plus ils sont susceptibles de capter à la fois de mon attention, ça c'est super, donc de me plaindre de la pub. Parce qu'évidemment, comme je suis radine et que je veux pas payer pour un jeu en ligne, j'ai la version gratuite.

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Donc j'ai des pubs qui m'arrive à chaque fin de jeu et elles veulent que je reste aussi parce que c'est une façon pour elles de savoir exactement ce que je fais, à quelle heure je le fais. Et donc, ça en dit beaucoup aussi de moi et de mes comportements. C'est ça la donnée, en fait. Nos données personnelles, c'est pas juste.

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J'ai écrit un mail où j'ai fait un jeu. Quand j'ouvre cette fenêtre avec cette application, je permet à l'opérateur, à celui qui a développé l'appli, de rentrer dans mon intimité, d'être avec moi dans mon lit, sous ma couette, à jouer au jeu débile. Et quand on dit il faut faire attention à nos données. Il faut surtout faire attention à ce qu'on donne de nous. Il y a des choses qui sont de l'ordre du privé, de nos affects, de nos émotions, de nos de nos ressentis qu'on ne peut pas leur donner en les donnant.

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On devient des objets qui sont autant de petits pions à qui on peut vendre n'importe quoi, n'importe où, n'importe comment, n'importe quand. Et c'est de ça dont on doit se protéger en. Pour se souvenir de la puissance que représentent en fait nos données, j'aime bien regarder. Finalement, qu'est ce que représente la puissance financière aujourd'hui des entreprises qui en tirent le plus profit que sont Google, Apple, Facebook, etc. Et si on regarde leur valeur en Bourse, c'est de l'or du 1000 milliards, donc ça a dépassé la valorisation de ex-homme, donc du pétrole.

[00:39:53]

En fait, aujourd'hui, le minerai, la matière première qui est la plus rentable à extraire, ce sont nos données personnelles. Le problème, c'est qu'en fait, aujourd'hui, il y a d'autres acteurs qui utilisent ces capacités de ciblage qui sont extrêmement puissantes, qui sont des acteurs politiques à leurs intérêts. Ce n'est plus d'utiliser cette capacité de ciblage pour convertir à l'achat, mais ça va être pour convertir, voir le monde, d'une certaine manière, pour être influencé dans l'exercice de ses droits en tant que citoyen au sein d'une démocratie.

[00:40:31]

Il explique très bien Anne-Sophie GIAC et Maxime Guedj. Il donne des exemples concrets et tout, mais personnellement, savoir tout ça ne m'a jamais empêché de cliquer sur j'accepte. Moi, j'accepte. Dès qu'un site ou une application demande si je suis d'accord avec les conditions générales d'utilisation, j'accepte la gestion des cookies. J'accepte tout, mais à présent, j'ai une petite clé à actionner et elle est dans ma tête.

[00:40:56]

Donc, vous avez une partie plus consciente de votre cerveau située à l'avant, le cortex préfrontal. Qui peut être certains? Tandia, non. Attends, prends le temps de la réflexion. Plus on nous propose les choses rapidement. Plus notre cerveau s'est habitué à attendre, de plus en plus de personnes vont être finalement confrontés à une offre instantanée. Faut il céder et donc pas être obligé de muscler la partie frontale du cerveau qui nous permettrait d'attendre?

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C'est un cercle vicieux. Plus vous, des habitués et votre cerveau frontal à agir, plus vous avez besoin de produits et d'offres instantanées, et plus les offres instantanées prospèrent. Cela va toujours plus vite et on est de moins en moins capables de patienter et d'opposer finalement à l'attrait de l'instantanéité. Le souci de responsabilité et le souci rationnel de protection de nos données de réflexion désorientation que l'on veut donner à nos existences ou de comptes qu'on demande aussi à long terme à ceux qui nous gouvernent.

[00:42:08]

Concrètement, si je veux mettre Firefox sur iOS.

[00:42:15]

Suffit d'aller dans l'App Store et vous tapez Firefox. Alors voilà. Ne vous moquez pas. C'est pas le grand soir. Juste une petite réforme individuelle avec l'aide de Maxime Guedj. J'ai installé sur mon smartphone un navigateur qui ne vend pas mes données personnelles. Firefox est un navigateur comme Chrome ou Safari. Sauf qu'il est libre. Ça vaut ce que ça vaut. C'est juste un début. Et surtout, il est maintenu par. Alors voilà, il faut. Bien sûr, il y a une demande qui est venue et d'ailleurs, je ne sais même pas, au fond, si c'est vraiment grâce à la partie préfrontal de mon cortex.

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Navigateur Web. Mais ce que j'ai compris, c'est que la cohérence, c'est un peu comme les abdominaux, ça s'exerce. Au début, c'est horrible. On fait des pédalos sur son tapis, on a envie de crever. Et puis, jour après jour, on a moins mal. Après, on se tient plus droit, on se regarde dans la glace et on est quand même plus content de soi. Qui est déjà assis sur Arte. Radio Webcam vivant avant la fin du monde est un podcast produit chaque mois par Arte Radio.

[00:43:35]

Vous pouvez l'écouter sur son site Arte Radio Punctum, son appli gratuite Soundcloud, Deezer ou votre plateforme d'écoute préférée. Commenter, partager, abonnez vous aux podcasts et mettez lui des étoiles pour soutenir l'émission et la planète.